lundi 17 mars 2014

Histoire du pêcheur (partie XXV)

Histoire du pêcheur (Partie XXV)

Poèmes de "la série Mille et une Nuits":
Histoire du pêcheur (Partie XVI)
Histoire du pêcheur (Partie XVII)



Je m’écriai : « Tombeau, ô, que n’engloutis-tu
Ce traître moribond et cette femme sans vertu !
Que ne consumes-tu l’amant et la maîtresse !
A ces mots je vis se lever la traîtresse,
Pareille à une furie. « Ah ! Cruel, c’est donc toi
Qui causes ma douleur, et tu oses sous ce toit
Venir insulter une amante qui soupire !
A cause de toi, l’objet de mes amours respire
Mais ne vit point ; maudite soit ta barbare main,
De mon cœur qui souffre ô bourreau inhumain ! »
« Oui, c’est moi ! Criai-je, transporté de colère,
Je devais te traiter de la même manière
Que ce monstre infâme que j’ai châtié justement !
Oui, je vais te traiter aussi augustement
Que les larrons et les traîtres, et couper ta tête. »
Et, furieux comme la houle et la tempête,
Je tirai mon sabre afin de la punir.
Au lieu d’en trembler, je la vis vers moi venir
Et me dire avec un sinistre sourire :
« Ô, roi, je te prie de modérer ton ire. »
Elle prononça en même temps d’obscurs talismans
Et dit : « Par la vertu de mes enchantements
Deviens moitié marbre et moitié homme tout à l’heure. »
Et depuis, seigneur, en ces lieux je demeure,
Mort parmi les vivants, vivant parmi les morts.
Cette magicienne cruelle et sans remords
Quand elle m’infligea cette métamorphose fatale
Détruisit aussi ma belle capitale
Qui était très peuplée, et perdant la raison,
Anéantit les places, les marchés, les maisons
Et toute la ville, jadis florissante et verte.
Elle en fit cet étang et cette vallée déserte,
Les poissons de quatre couleurs sont à l’étang
A l’image des quatre espèces d’habitants
Prisonniers, comme moi de ce palais sombre
Où je demeure dans la solitude et l’ombre,
Les blancs les Musulmans, les Chrétiens les bleus,
Les rouges les Perses, adorateurs du feu,
Et les jaunes les Juifs. Quant aux quatre collines,
Elles étaient quatre îles. La magicienne maline
Me le dit elle-même, fière de ses méfaits
Et m’annonçant de sa rage les noirs effets.
Mais elle trouva sans doute cette punition légère,
Car elle vient chaque jour, cruelle mégère,
Sur mes épaules nues me donner cent coups puissants
De nerf de bœuf, et qui me mettent tout en sang.
Ce supplice fini, d’une étoffe de poil de chèvre
Avant de s’en aller moqueusement me couvre
Et met par-dessus cette vilaine robe de brocard. »
Ce jeune homme qui pleurait attendrit le vieillard
Qui écoutait, sans mot dire, son récit étrange.
« Ô, Créateur dont les décrets jamais ne changent !
S’écria le jeune roi, vous châtiez sagement
Et je me soumets, Dieu, à tous vos jugements.
J’espère dans l’au-delà vos douces récompenses
Car votre bonté est infinie et immense. »



[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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