mercredi 22 janvier 2014

Histoire de Sindbad le Marin (Quatrième voyage, partie VI)

Histoire de Sindbad le marin (quatrième voyage, partie VI) 

Poèmes de "la série Mille et une Nuits":
 

Malgré mon désespoir et toute ma rage,
Après quelques moments je repris courage
Et au lieu d’appeler la mort à mon secours
Décidai tenacement de prolonger mes jours.
Oubliant mon dégoût de ce cimetière,
Je pris le pain et l’eau qui étaient dans ma bière
Et en mangeai un peu. Une grande obscurité
Me cachait, presque avec la même austérité
Que la nuit, du jour les rayons bénéfiques.
Il me sembla toutefois que cette grotte antique
Etait plus spacieuse que je ne l’avais cru.
Mes provisions finies, mon trépas me parut
Tout proche. J’entendis soudain lever la pierre ;
La mort et la peur sont de sombres conseillères,
Le défunt était un homme, et sa femme en pleurs
Criait et gémissait d’effroi et de douleur.
J’avais l’esprit brouillé par une forte famine
Et par la soif, et cette femme frêle comme une gamine
Ne pouvait résister aux cent terribles coups
Que je lui donnai, plein d’un étrange courroux,
Comme si je voulais assouvir une vengeance,
Avec un énorme os, sans aucune indulgence.
Je pris sa nourriture et son eau, mon butin,
Et mangeai et bus en voyant les yeux éteints
De ma victime, dont la mort était aussi sûre
Que la mienne, et dont les mortelles blessures
Ensanglantaient la tête. Quand l’esprit me revint,
De mon effroyable forfait je me souvins
Et pleurai amèrement, assis dans les ombres
De cette grotte aussi sinistre que sombre.
Au septième jour, il ne me restait qu’un morceau
De pain décharné, et seulement un peu d’eau.
Je crus tout à coup ouïr quelque chose marcher vite ;
Je m’en approchai, cette ombre prit la fuite
Et s’arrêtait, soufflant, et toujours en fuyant
Un revenant qu’elle trouvait sans doute effrayant.
Je la poursuivis fort longtemps, intrépide.
Bien que cette chose fût plus que moi rapide,
Que je la perdisse trois fois et la retrouvai,
Je continuai à la suivre et j’arrivai
Enfin devant une large et étrange brèche
D’où je sentis venir une brise fraîche
Et, chose singulière ! vis le soleil rayonner.
J’en sortis et je fus dehors, fort étonné
De me retrouver dans l’île, tout près des ondes.
Ma joie fut tellement violente et profonde
Que je m’évanouis sur-le-champ. A mon réveil,
Je vis avec amour la mer et le soleil
Et hors de ces lieux où j’allai par des sauvages
Etre enterré, je me prosternai au rivage
Pour remercier Dieu de son infinie bonté.
Ne vous étonnez point si je viens vous conter
Ce récit avec une émotion toujours vive,
Quand on est sauvé d’une mort certaine, chers convives,
C’est comme si on était par Dieu ressuscité.
Je sus après que ce tombeau était hanté
Par une bête de mer qui y trouvait son havre
En venant, affamée, ronger les cadavres.
Je revins à la grotte après m’être nourri
De fruits, ramasser dans ce cimetière pourri
De riches étoffes, des rubis et des pierreries
Et maintes belles choses, ma faim et ma soif guéries.
Nul ne pouvait me voir car ce mont inhumain
Etait si haut qu’aucun salutaire chemin
Ne menait à la ville. Des marins me virent
Et je montai avec eux sur leur navire.
Je leur parlai de cette île et de ces dangers
Et des anthropophages. Comme ils furent étrangers
Comme moi, en peu de temps ils la quittèrent.
Nous passâmes par maintes merveilleuses terres,
L’île des Cloches, de Serendib, de Kela,
Et je revins enfin, de ces aventures las,
A ma demeure et à ma terre natale
Me reposer doucement, loin des ondes fatales. »

Sindbad acheva son récit, et se taisant
A Hindbad étonné fit le même présent,
L’invitant à revenir à la nuit suivante
A sa demeure, avec des prières ferventes,
Ainsi que les autres convives, pour écouter
De son cinquième voyage le récit redouté.

[FIN DU QUATRIÈME VOYAGE DE SINDBAD LE MARIN]

Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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