lundi 20 janvier 2014

Histoire de Sindbad le Marin (Quatrième voyage, partie IV)

Histoire de Sindbad le marin (quatrième voyage, partie IV) 

Poèmes de "la série Mille et une Nuits":


Le roi me dit un jour : « Mes sujets te chérissent
Comme je te chéris, et tes affaires fleurissent ;
J’en suis content pour toi. Sans vouloir te presser,
J’ai, mon cher Sindbad, une prière à t’adresser. »
« Soyez assuré de ma pleine obéissance,
De ma loyauté et de ma reconnaissance,
Sire. Et sachez que faire tout ce qui vous plaira
Me sera doux, et que votre altesse me verra
Honoré d’exaucer toutes ses prières. »
Lui répondis-je. « A une dame belle et point fière,
Répliqua le roi, je veux que tu sois marié.
Elle t’aimera et tu ne seras point contrarié
Par ses caprices ; elle est d’une grande retenue.
Chaque fois que ta patrie te sera revenue
Dans ses bras bien-aimants tu seras consolé. »
A ma douce patrie je rêvais de m’envoler
Et bien que mon séjour me fût agréable
Et ma femme fort belle, sage, riche et noble,
Je voulais partir à la première occasion,
Comme si mon destin sombre, avec dérision,
Chaque fois que j’étais serein, raillant mon zèle,
Me faisait naître, à la place des pieds, des ailes.

Je songeais ainsi quand la femme de mon voisin
Qui devint mon ami, lui mourut un matin
Car elle était malade et plus que lui vieille.
J’allai le consoler. Sa tristesse sans pareille
Etait si grande que j’en fus comme étonné.
Ému, je lui dis : « Le Seigneur nous a donné
La vie, et il peut quand il lui plaît la reprendre.
Que la tienne soit longue, et que cette amitié tendre
Dans l’éternité puisse aussi vous réunir. »
« Qu’elle soit longue ! Hélas, elle va bientôt finir !
S’écria mon voisin, plein d’amertume.
Sindbad, tu ne connais pas encore nos coutumes,
On enterre la femme morte et le mari vivant
Et quand il meurt elle va, au tombeau le suivant.
Je vais être enterré donc avec ma femme. »
De cette coutume barbare et infâme
Je tremblai en plaignant mon ami abattu.
Le cadavre de sa femme fut revêtu
De tous ses joyaux et de ses habits de noces,
Elle fut transportée dans un grand carrosse,
Son mari à la tête du deuil, jusqu’à un mont
Dont le sommet semblait l’antre d’un noir démon.
On y leva une pierre qui couvrait l’ouverture
D’un puits profond comme un abîme, dont l’étroiture
Ne laissait passer qu’une seule personne à la fois.
Le pauvre homme tremblait, malgré toute sa foi.
On descendit la morte et, sans aucun reproche,
Il embrassa tous ses amis et tous ses proches
Et on le mit dans une bière, vivant fardeau,
Avec, auprès de lui, sept pains et un pot d’eau.
Il suivit sa femme. Quand la cérémonie
A la fois cruelle et étrange, fut finie,
On remit la pierre sur le puits et on alla
En laissant le mort et la morte ensemble là. 

[A SUIVRE]



Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène 

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