lundi 7 avril 2014

Histoire de trois calenders, fils de rois, et de cinq dames de Bagdad (XI)

Histoire de trois calenders, fils de rois, et de cinq dames de bagdad (partie XI)

Poèmes de "la série Mille et une Nuits":
 
Le porteur revint, de deux chiennes sombres suivi,
Attachées à une chaîne. Toute l’assemblée vit
De coups de fouet sur elles les sinistres traces,
Pauvres créatures que leurs fers embarrassent.
Le porteur, suivant les commandements des sœurs,
S’avança au milieu de la salle, le cœur
Serré à cause de leur état pitoyable.
Zobéide vint et dit : « Il m’est désagréable
De faire ceci, mais c’est là notre devoir. »
Elle se retroussa, de sorte qu’on pouvait voir
La blancheur de sa chair tendre et sensuelle,
Les bras jusqu’au coude, et elle prit, cruelle,
Le fouet qu’Amine lui présenta. « Porteur,
Dit-elle avec une noble et étrange hauteur,
Remettez à ma sœur Amine une de ces chiennes
Et amenez-moi l’autre, et que vos bras la tiennent. »
Le porteur le fit. De Zobéide approché,
La chienne qu’il tenait, le front tristement penché,
Poussait des cris d’une manière suppliante.
Mais sans écouter ses plaintes déchirantes,
Zobéide lui donna mille coups de fouet
Dont elle ensanglanta son dos rouge à souhait.
Quand  cette punition l’eut enfin épuisée,
Elle et la chienne se regardèrent, brisées,
Et pleurèrent l’une et l’autre. Elle tira son mouchoir
Et essuya les pleurs qu’elle avait laissé choir
Ainsi que les larmes de la chienne fouettée.
Elle la baisa et la remit, ensanglantée,
Au porteur à qui elle dit de faire venir
L’autre chienne qu’elle allait comme sa sœur punir.
Elle la maltraita de la même manière,
Sans s’émouvoir de ses muettes prières,
La baisa elle aussi et pleura amèrement.
Les  invités furent surpris de ces tourments
Et de l’exécution cruelle qu’ils virent.
Après tant de choses qui les ravirent,
Ils ne comprenaient point pourquoi cette femme pleurait
Et baisa ces chiennes que pourtant elle torturait.
Le Calife surtout, plus impatient que les autres,
De sa curiosité peinait à rester maître,
Voulant comprendre ce châtiment mystérieux.
Il fit à son vizir mille signes curieux
Pour qu’il s’en informât. Mais le vizir, plus sage,
Feignit de ne point le voir, tournant le visage
De l’autre côté de la salle. Il fut pressé
Tant de fois par Haroun qu’il lui dit, lassé,
Par d’autres signes, qu’il ne pouvait satisfaire
Sa curiosité, car il craignait de déplaire
Aux trois hôtesses après le serment solennel
Qu’ils leur firent d’être des spectateurs éternels
Et de ne point poser de questions malvenues,
Et se tut, malgré ses signes, avec retenue.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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