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mercredi 25 mars 2015

Conte: La Houle de Chelin (Partie IV)

CONTE: LA HOULE DE CHELIN (PARTIE Iv)


IV. De quelle manière le marin Faîto, aidé par une fée, voulut se venger

Dans la demeure que le marin habitait,
Il y avait trois petits enfants dont le dernier était
Au berceau, et faisait un beau tintamarre.
Un jour leur mère à la fontaine de la Mare
Alla chercher de l’eau, et laissa le poupon
Tout seul à la maison, couvert par un coupon.
On le lui enleva pendant son absence
En profitant de sa frêleur et innocence,
Et à sa place on mit un bien hideux marmot
Qui, bien qu’il fût petit, tel les enfants normaux
De sa race, semblait un vieux de la paroisse.
Quand sa mère revint, pleine d’angoisse,
Elle ne trouva pas au berceau son chéri,
Et en voyant un monstre elle jeta un cri
Et chez sa voisine courut. « Ah ! lui dit-elle
En pleurant, je suis pleine d’une frayeur mortelle !
Mon enfant a été volé ! et on a mis
Un monstre à sa place ! Au secours, mes amis ! »
« Les fées de Chelin, lui dit-on, sont les coupables
Et de ce changement elles sont responsables,
Si tu veux ravoir ton fils, va dans le foyer
Allumer un grand feu ; quand il va rougeoyer
Et que le bois flambera, il faut que tu casses
Des œufs, et tu poseras ensuite les carcasses
Parmi la cendre, autour du foyer, y mettant
De l’eau, et tu prendras, comme si l’allaitant,
L’enfant sur tes genoux, qu’il faut que tu écoutes. »
La bonne femme le fit, malgré ses doutes,
L’enfant autour de lui regarda, étonné,
Et dit : « De vivre cent ans il me fut donné,
Jamais je n’avais vu ces petits pots qui bouillent. »
« Tu vas trembler comme de la pluie Gribouille !
S’écria la mère en prenant son couteau.
Où est donc mon enfant, vil sorcier, diableteau ? 
Dis-le-moi ou je vais te tuer, noir traître ! »
Aussitôt elle vit devant elle paraître
Une fée qui lui dit : « A mon fils ne fais rien,
Et je vais te rendre, en bonne santé, le tien. »
« C’est maintenant qu’il faut me le rendre, mégère,
S’écria-t-elle encor, ou il mourra ! » Légère,
La fée disparut. D’un endroit peu éloigné
Elle revint avec son enfant bien soigné
Et qui n’avait aucun mal, et dit à la mère :
« Je suis de la race d’Antifer ; amère,
Je quitte la Houle et le pays sans revenir.
Ma vengeance est finie, rien ne m’y va retenir,
Et vous ne nous verrez plus ici en Bretagne. »
Ni près de la Houle, ni près de le montagne,
On ne revit la fée, ses sœurs ou le matelot
Qui, dit-on en tremblant, hante toujours les flots.

[FIN DU CONTE: LA HOULE DE CHELIN]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

mardi 24 mars 2015

Conte: La Houle de Chelin (Partie III)

CONTE: LA HOULE DE CHELIN (PARTIE IIi)

 
III. L’incroyable rencontre que fit le jeune matelot, et ce qui s’ensuivit

Auprès de la Houle de Chelin, une terre
Bordait la falaise haute et où nul n’erre,
Cette terre aux parents du marin appartenait,
Et avec ses bestiaux souvent il y venait
Pour qu’ils pâturassent, jamais las de la marche,
Et allait au Heussé pêcher à la perche.
Un jour qu’autour de lui le marin regardait
Et que le beau poisson à lui venir tardait,
Il vit de loin un homme, à l’entrée de la Houle,
Qui n’était pas souvent fréquentée de la foule,
Et qui lui rappela Faîto, le matelot mort
Qui les attaqua quand il fut conduit au port.
Cet homme est singulier, se dit-il, j’allais croire
Que c’est Faîto ! Devant cette grotte noire,
A cette heure de la marée, que cherche-t-il ? »
Le lendemain matin, à l’aurore au front subtil,
Il conduisit ses vaches à la même pâture,
Et il ne revit plus l’étrange créature
En allant à la pêche ; mais, à l’heure du soir,
Alors qu’il commençait lentement à faire noir,
Il vit qu’il manquait une en comptant ses vaches.
« Viens, Blanchette, héla-t-il. Où est-ce que tu te caches ? »
Comme elle ne vint pas, il se mit à chercher
En pensant qu’elle avait glissé sur le rocher,
Et descendit jusqu’à la grève silencieuse.
Il ne trouva pas la vache séditieuse,
Mais en faisant auprès de la Houle cent tours,
Il vit des bouses sur les rochers d’alentour,
Et se dit : « Ah ! c’est bien Faîto qui l’a prise
Pour se venger de ce qu’il croit une traitrise. »
Il raconta l’affaire à ses parents éblouis
D’abord, et qui rirent ensuite de lui
Et lui dirent, incrédules, que son histoire
Etait incroyable, et que, de mémoire,
Nul ne les a jamais volés auparavant.
Il perdit deux moutons, un mois après. « Bravant
Ma colère, dit-il, c’est Faîto, sans doute,
Pirate dans la mer et brigand sur les routes,
Qui m’a volé, et je vais guetter le coquin
Pour avoir le cœur net, et punir ce faquin. »
Le lendemain, il prit sur son dos un sac de hardes
Qu’on venait de laver, et en restant en garde,
Le porta sur un tertre exposé au soleil
Et chargea son fusil, à un soldat pareil,
En se cachant derrière un rocher énorme.
Il vit venir une fée et le marin difforme
Qui se mirent aussitôt, ensemble, à ramasser
Le linge ; l’arme en joue et prêt à les chasser,
Il ajusta le vieux marin avec adresse,
Mais, bien qu’il le blessât, voilà qu’il se redresse
Et s’avance vers lui, hardi, sans s’émouvoir.
« Ah ! sorcier, je ne crains pas tes sombres pouvoirs !
S’écria le jeune matelot avec colère.
La mort t’attend et elle sera ton salaire,
Tu n’es pas invincible et je vais le prouver. »
« Je suis Faîto, je suis venu te retrouver,
Lui dit le vieux marin, et j’ai volé tes bêtes
Pour me venger, et je te casserai la tête. »
Et l’autre railla : « Tu le fais en discutant. »
Les deux se prirent à bras-le-corps ; en luttant
Le pied leur glissa, et ils dégringolèrent
Jusque sur les rochers. Puissants et colères,
Ils ne se firent, quand ils tombèrent, aucun mal,
Et chacun d’eux lutta comme un sombre animal.
Fatigués du combat enfin, ils s’insultèrent,
Et tous les deux blessés, les gaillards se quittèrent.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

lundi 23 mars 2015

Conte: La Houle de Chelin (Partie II)

CONTE: LA HOULE DE CHELIN (PARTIE Ii)


II. Ce que le capitaine décida de faire de Faîto, et ce qui arriva par la suite

Le capitaine alla voir les amarrages
Et laissa le vieil homme finir son ouvrage.
Cependant le matelot de Saint-Cast eut grand peur
En songeant à Faîto, le vieux marin trompeur,
Et dit au commandant : « Ce Faîto, capitaine,
Qui nous vient d’on ne sait quelle terre lointaine,
Je crois que vous devez bientôt le remercier.
Je ne l’ai jamais vu à Saint-Cast ; ce sorcier
M’a décrit la Houle de Chelin, une grotte
De mon pays, près de laquelle nul ne trotte,
Et qu’elle va jusqu’à Lamballe a affirmé. »
« Par cet homme je suis comme vous alarmé,
Lui dit le capitaine, dès que nous toucherons terre,
Je vais le débarquer, que loin de nous il erre. »
Quand le navire dans un port eut abordé,
Il dit au vieux Faîto : « Je vous ai regardé,
Vous êtes un bon matelot et brave au service,
Mais n’êtes point jeune, et votre âge est votre vice.
Voici votre paye et un présent mérité
Et que je vous donne en toute sincérité. »
Faîto répondit : « C’est vous qui êtes le maître,
De descendre à terre daignez me permettre,
Et ne soyez surtout pas inquiet pour mon sort. »
Dans un petit canot il descendit au port
Et on ne pensait plus le revoir. Le voyage
Continua vers les Antilles ; au sillage
Du puissant navire qui marchait rondement,
On vit, après avoir entendu un grondement,
Un vaisseau qui sembla jaillir des ondes ingrates,
Et on sut que c’était un vaisseau de pirates.
Le capitaine vit qu’il ne pouvait pas fuir,
Il ordonna alors à ses matelots sans cuirs
D’apporter sur le pont aussitôt leurs armes
Et de se défendre bravement et sans alarmes.
Les marins combattirent bien courageusement
Ces vils pirates qui chargeaient rageusement ;
Ils furent plus forts qu’eux et les exterminèrent,
Sans épargner Faîto qu’ils assassinèrent.
Le capitaine en fut content, car il tremblait,
Disait-il, de Faîto qui un sorcier semblait.
Le vaisseau poursuivit sans accident sa route,
Et après deux ans de tempêtes et de doutes
Arriva aux Antilles. On acheta et vendit
Puis à Saint-Malo, sans hasard, on se rendit,
Et le matelot à ses moutons et ses poulettes
Revint chez ses parents vivre à la Roulette,
Et il ne pensait plus à Faîto le marin
Qu’il avait oublié en redevenant serein.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

dimanche 22 mars 2015

Conte: La Houle de Chelin (Partie I)

CONTE: La houle de chelin (PARTIE i)

I. L’étrange rencontre que fit un matelot de Saint-Cast à bord d’un navire, et que fit après lui le capitaine

Il y avait un marin de Saint-Cast bien hardi
Et connu pour être un bon gaillard dégourdi,
Qui s’alla embarquer à bord d’un navire
Qui dans les flots puissants jamais ne chavire
Et devait faire un long voyage de trois ans
– c’est pour cette raison qu’il était bien pesant –
De Saint-Malo à un pays exotique.
On choisit donc de jeunes matelots athlétiques
Qui pussent supporter ce voyage lointain,
Pareils, sur le vaisseau, à des héros hautains.
Quelques jours après, le matelot fit connaissance
D’un autre marin dont la lointaine naissance
Lui semblait précéder les autres de trente ans,
Et qui semblait, à le regarder, inquiétant.
« N’es-tu pas de Saint-Cast, toi ? » lui dit son confrère.
« Si », répondit le matelot d’une voix fière.
« Alors dis, tu connais la Houle de Chelin ? »
Le matelot répondit au vieil homme malin
Qu’il l’avait vue et qu’elle était peu profonde.
« Parbleu ! s’écria le vieux, plus que ces ondes
Elle est profonde, et tu ne saurais deviner
Où cette grotte va, mon garçon, pateliner. »
« Où finit-elle donc, cette grotte seulette ?
Va-t-elle plus loin que l’Isle et la Roulette ? »
Demanda le matelot. « Plus loin elle s’étend,
C’est la vérité et non ce que je prétends :
Sache que cette grotte va jusqu’à Lamballe
Et que ses griffes sont sous sa cathédrale. »
A cette réponse de l’étrange matelot,
Ils se turent tous deux. En contemplant les flots,
Notre héros surpris pensait à ces vanteries
Et se dit que c’étaient de vaines plaisanteries.
Le capitaine, le lendemain, du pont passé,
Etait étonné de l’air ancien et cassé
Du vieux marin, et il pensait qu’il est étrange
Qu’un tel homme, semblant faible et âgé, s’arrange
Pour monter à son bord, vieux comme les chemins.
Il le salua, et en lui tendant la main
Lui demanda : « Ami, d’où est-ce que vous êtes ? »
« Je suis Faîto de Saint-Malo, et les tempêtes
Ne m’ont point effrayé. Vous me semblez surpris !
Dans votre équipage, chef, je suis compris,
L’avez-vous oublié ? La mémoire est volage. »
Répondit le vieil homme. « Vous avez de l’âge,
Reprit le capitaine, sans vouloir offenser,
Et je n’ai engagé, veillant à y penser,
Que des matelots forts et encore jeunes. »
« Sachez que, même si cela vous étonne,
Repartit le vieil homme, je suis fort comme fer,
Et jeune dans ma race, la race d’Antifer. » 

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

vendredi 23 janvier 2015

Conte: La Houle du Châtelet (Partie V)

V. Le présent que la jeune fille reçut de sa filleule, et ce que lui arriva quand elle se maria

La jeune fille, qui dix ans dans la houle séjourna
Sans le savoir, à sa demeure retourna.
Sa mère, en la voyant, s’écria : « Malheureuse !
Nous te croyions noyée dans la mer ténébreuse
Ou tombée des falaises. Où est-ce que tu étais ?
Et qu’est-ce qui, pendant tout ce temps, t’arrêtait ? »
« Ne me grondez pas, mère, répondit la jeune fille.
Jamais je ne quitterai ma chère famille,
Et je suis partie il y a deux jours pour nommer
L’enfant de la fée, qui m’a permis de chômer
Pour qu’à sa houle cachée aux humains elle m’invite.
Je n’y suis restée que deux jours et suis revenue fort vite. »
« Deux jours ! s’écria une autre fois la maman,
Tu oses me le redire ainsi, arrogamment !
Tu es restée dix ans, c’est pourquoi je te gronde,
Vois comme tu es haute sur tes jambes et gironde. »
La jeune fille, étonnée, se vit dans un miroir,
Ne pouvant croire qu’elle devint femme en deux soirs,
Ses frères et sœurs, petits quand elle était partie,
Devinrent aussi grand qu’elle quand elle fut sortie
De la grotte, et elle les prit pour des étrangers, 
Comme eux en la voyant de la sorte changer.
Elle demanda d’abord qu’on la laissât seule,
Et tricota une paire de bas pour sa filleule
Qu’elle alla porter à la houle, sans courir
Cette fois de la portière qui vint lui ouvrir.
Les fées lui furent bonnes et hospitalières
Et l’accueillirent avec leur joie régulière,
Elle y passa cinq ans en y passant un jour,
Avant de partir, sa filleule, avec amour
L’embrassa, et lui fit présent d’une bourse
En lui disant : « Vous pourrez faire toutes vos courses
Grâce à cette bourse emplie d’or. Quand vous y prendrez
Une pièce, une autre viendra ; vous entendrez
Un bruit plaisant, et vivrez comme une reine.
Mais souvenez-vous bien, ma chère marraine,
Que si un autre que vous y puise, elle perdra
Toutes ses vertus, et votre cœur s’en mordra,
Car votre richesse deviendra éphémère. 
Ne m’oubliez pas, je vous aime comme une mère. »
Comme elle était jolie, la jeune fille, en allant
A son village, ne manqua pas de galants
Pour lui faire la cour, et en était charmée.
Ses frères partirent s’enrôler dans l’armée
Et ses sœurs se marièrent ou allèrent au couvent.
Un jeune homme fort beau qui la courtisait souvent
Lui plut ; elle consentit à être son épouse,
N’étant pas cachottière et de son or jalouse,
Elle lui parla de sa bourse aux magiques pouvoirs,
En pensant ainsi faire son conjugal devoir.
Son mari, croyant ce prodige imaginaire,
En prit une pièce, et comme une bourse ordinaire
Elle s’épuisa bien vite. Nul ne sait, aujourd’hui,
Ce qui se passa, si l’époux fut éconduit
Par sa femme en colère, et si cette dernière
Revint à la grotte ou demeura casanière.

[FIN DU CONTE: LA HOULE DU CHÂTELET]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

jeudi 22 janvier 2015

Conte: La Houle du Châtelet (Partie IV)

CONTE: LA HOULE DU CHÂTELET (PARTIE IV) 


IV. Comment la petite pâtoure grandit fort vite

Avant qu’on vînt chercher les quatre vaches, le soir,
La patronne vint à la petite fille pour la voir
Et dit à la pâtoure, douce et souveraine :
« De mon enfant veux-tu être la marraine ? »
La jeune fille répondit : « Oui, madame, je veux bien. »
« N’en jase à personne, même à ta mère n’en dis rien,
Ordonna la fée, ou tu te trouveras punie
Et de tes repas de chaque jour démunie.
Je t’avertirai quand il te faudra venir. »
La petite fille, qui devait se retenir,
Ne dit point son secret, et comme d’habitude,
Allait pâturer les vaches dans la solitude.
Quelque temps après, une fée vint la rencontrer
Et lui dit qu’elle allait le lendemain lui montrer
Pour qu’elle nommât l’enfant, le chemin de la houle.
« Demain, lui dit-elle, évite les yeux de la foule,
Sois ici à midi, on viendra te chercher. »
La pâtoure était une jolie fille ; au marché,
Elle alla acheter une robe mignonette
Que lui vendit à bas prix un marchand honnête,
S’arrangea de son mieux, et comme convenu,
Elle vint, à midi, aux champs aux épis grenus.
A la porte de la houle elle fut conduite
Et, effrayée, allait prendre la fuite
En voyant la vieille portière au dos garni
De moules reluisantes et d’étranges bernis.
Mais elle rassura la fille à courir preste
Et lui dit : « Ne crains rien, mon enfant, et reste.
Nul mal ne te sera fait, laisse-moi te guider. »
Comme la jeune pâtoure ne pouvait se décider,
Une autre fée, jeune et jolie, vint la prendre
Par la main, et l’aida dans la houle à se rendre.
Quand elle sortit de cet antre où le temps est court
Et plus rapidement que dans notre monde court,
Elle ne croyait rester que deux jours dans la grotte,
Mais sa filleule était déjà grande et fiérote,
Et elle y demeura dix ans à son insu.
Sa mère et ses frères, grâce à elle cossus,
La cherchèrent partout avec un grand malaise,
Puis crurent qu’elle se noya ou tomba d’une falaise,
Ne la trouvant nulle part, et pleurèrent sa mort.
Sa mère était la plus triste, et pleine de remords,
Pensait être la cause de cette perte cruelle.
Une fée ne tarda pas à venir à elle
Et lui demanda, souriant avec douceur,
Qu’une autre de ses filles vînt remplacer sa sœur,
Qui alla à sa place, joyeuse moucheronne,
Garder toute la journée les vaches de la patronne.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

mercredi 21 janvier 2015

Conte: La Houle du Châtelet (Partie III)

CONTE: LA HOULE DU CHÂTELET (PARTIE III) 


III. La proposition que la maîtresse des fées fit à la veuve

La veuve ne voulut pas, le lendemain, se lasser
A rechercher ses coques et à les ramasser,
Mais revenir avec un présent à sa demeure.
Elle alla à la grotte des fées à la même heure
Que la veille ; la vieille portière lui ouvrit,
Et à l’entrée de la houle elle découvrit
Une belle dame qui lui dit : « Sois la bienvenue
Dans ma grotte enchantée et par le temps chenue.
Dis-moi, as-tu trouvé mon pain bon à manger ? »
« Excusez-moi, madame, d’ainsi vous déranger,
Répondit la veuve, oui, je vous remercie
De ne pas être pour les pauvresses endurcie.
Il est si bon que tout le bourg s’en est lesté
Et qu’avant la fin du jour rien n’en est resté. »
La bonne fée lui dit, souriante et gentillette :
« Je te donnerai un pain qui gardera ses miettes
Et sa fraîcheur, si tu le gardes bien caché.
N’en parle à personne, pour que nul ne soit fâché,
Et n’en fais manger qu’à tes enfants que tu aimes,
Ou il disparaîtra, comme l’autre, le soir même.
Je n’attends de toi qu’une seule chose en retour :
Je possède quatre vaches et n’ai point de pâtours,
Promets-moi que chaque jour une de tes filles
Viendra me les garder. Pour cette guenille,
Sans vendre tes coques, il ne te manquera plus rien. »
« C’est bien aimable à vous, madame. Je veux bien,
Répondit la veuve. Mais je n’ai pas pu entendre
Ou voir vos vaches. Où ma fille ira-t-elle les prendre ? »
La fée lui expliqua : « Elle viendra chaque matin
Dans un champ qui n’est pas de la grotte lointain,
A huit heures, où elle les gardera toute la journée.
Quand elle sera, le soir, chez elle retournée,
Nous viendrons les chercher et ici les ramener. »
L’aînée des filles de la veuve venait affener,
Chaque matin, les vaches des fées qui pâturaient
Et, contentes, dans le champ verdoyant couraient.
Les voisins la voyaient, sa gaule à la main,
Et, les vaches n’étant point visibles aux humains,
Maintes gens étonnées maintes fois prièrent
Cette fille de douze ans sur l’herbe des forières
De leur dire ce que toute seule elle faisait.
D’une voix ingénue cette dernière leur disait
Qu’elle gardait les vaches des fées, et ils en riaient
Et de revenir à sa demeure lui criaient,
Mais elle continuait à garder son troupeau,
Et les fées lui donnaient chaque jour du repos
Et lui apportaient à manger, contentes d’elle,
Laborieuse, bien que petite, et fidèle.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène