jeudi 22 janvier 2015

Conte: La Houle du Châtelet (Partie IV)

CONTE: LA HOULE DU CHÂTELET (PARTIE IV) 


IV. Comment la petite pâtoure grandit fort vite

Avant qu’on vînt chercher les quatre vaches, le soir,
La patronne vint à la petite fille pour la voir
Et dit à la pâtoure, douce et souveraine :
« De mon enfant veux-tu être la marraine ? »
La jeune fille répondit : « Oui, madame, je veux bien. »
« N’en jase à personne, même à ta mère n’en dis rien,
Ordonna la fée, ou tu te trouveras punie
Et de tes repas de chaque jour démunie.
Je t’avertirai quand il te faudra venir. »
La petite fille, qui devait se retenir,
Ne dit point son secret, et comme d’habitude,
Allait pâturer les vaches dans la solitude.
Quelque temps après, une fée vint la rencontrer
Et lui dit qu’elle allait le lendemain lui montrer
Pour qu’elle nommât l’enfant, le chemin de la houle.
« Demain, lui dit-elle, évite les yeux de la foule,
Sois ici à midi, on viendra te chercher. »
La pâtoure était une jolie fille ; au marché,
Elle alla acheter une robe mignonette
Que lui vendit à bas prix un marchand honnête,
S’arrangea de son mieux, et comme convenu,
Elle vint, à midi, aux champs aux épis grenus.
A la porte de la houle elle fut conduite
Et, effrayée, allait prendre la fuite
En voyant la vieille portière au dos garni
De moules reluisantes et d’étranges bernis.
Mais elle rassura la fille à courir preste
Et lui dit : « Ne crains rien, mon enfant, et reste.
Nul mal ne te sera fait, laisse-moi te guider. »
Comme la jeune pâtoure ne pouvait se décider,
Une autre fée, jeune et jolie, vint la prendre
Par la main, et l’aida dans la houle à se rendre.
Quand elle sortit de cet antre où le temps est court
Et plus rapidement que dans notre monde court,
Elle ne croyait rester que deux jours dans la grotte,
Mais sa filleule était déjà grande et fiérote,
Et elle y demeura dix ans à son insu.
Sa mère et ses frères, grâce à elle cossus,
La cherchèrent partout avec un grand malaise,
Puis crurent qu’elle se noya ou tomba d’une falaise,
Ne la trouvant nulle part, et pleurèrent sa mort.
Sa mère était la plus triste, et pleine de remords,
Pensait être la cause de cette perte cruelle.
Une fée ne tarda pas à venir à elle
Et lui demanda, souriant avec douceur,
Qu’une autre de ses filles vînt remplacer sa sœur,
Qui alla à sa place, joyeuse moucheronne,
Garder toute la journée les vaches de la patronne.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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