CONTE: La houle du châtelet (PARTIE I)
I. L’histoire de deux laboureurs, qui eurent
commerce avec des fées
Il y avait à
Saint-Cast un laboureur noiraud
Du nom de Marc
Bourdais, appelé bonhomme Maraud.
Un jour que lui
et son domestique charruaient
Près de la
pointe du Châtelet qu’ils saluaient,
Marc entendit
soudain sous la terre corner,
Et il arrêta, pour
ouïr, de la retourner,
Et dit au
domestique : « Est-ce le son d’une trompe ?
Gars, ce n’est
point là un farceur qui nous trompe ! »
« C’est,
répondit-il, des fées le corne enchanté. »
« Des fées !
Bien que j’aie des bras et de la santé,
Je me sens las
et j’ai faim. Crie à nos voisines
De nous donner
une gâche de pain de leur cuisine. »
Le bonhomme s’arrêta,
et fortement cria
Avec politesse,
aux bonnes fées qu’il pria :
« Fées, apportez-nous,
s’il vous plaît, une gâche. »
Et il
tremblotait, bien qu’il ne fût pas lâche.
Il finit, avec
son maître, d’ensemencer
Le sillon qu’ils
venaient, à l’aube, de commencer ;
Ils trouvèrent
un beau pain près d’une chenillette,
Bien enveloppé
dans une blanche serviette.
Le bonhomme
Maraud dit : « Je veux bien manger
De la gâche aux
fées. Mais n’y a-t-il point de danger ? »
« Oui,
mangeons ! répondit le bon domestique
En admirant
cette gâche de pain rustique,
Elle est trop
belle pour ne pas lui faire honneur. »
« Manges-en
le premier et j’en serai preneur. »
Dit Marc. Ils
sortirent le pain de la serviette blanche
Et en coupèrent
chacun une bonne tranche ;
Il était tout
beurré et bon comme un gâteau,
Et ils en
mangèrent comme deux diableteaux
Puis eurent très
soif, et tous les deux crièrent :
« Apportez-nous
à boire, s’il vous plaît. » Leur prière
Fut exaucée, car
ils virent aussitôt, ravis,
Un pot de cidre
et un verre. « Ma foi, m’est avis
Que le cidre est
aussi bon que la gâche est bonne !
S’écria Marc.
Jouissons de ce qu’on nous donne. »
Le cidre était
bien clair et de belle couleur,
Ils en burent
rapidement, pareils à deux voleurs,
Et dirent qu’ils
n’avaient point bu d’aussi agréable.
Le soir, ils
racontèrent leur récit incroyable
A leurs voisins,
réjouis de leur magique festin.
« Mes
pauvres gens, la mort sera votre destin,
Et de manger
ainsi et boire vous êtes bêtes. »
Leur dirent
leurs amis en hochant la tête.
Ils ne furent
point malades, et partirent labourer
Le lendemain
matin, comptant bien savourer
Un autre repas
des fées hospitalières,
Contents d’aller
à leur corvée journalière.
Ils sentirent l’odeur
de galettes de blé noir
Venir de sous
terre, sans qu’ils ne pussent les voir.
« Ah !
dit bonhomme Maraud, ces bonnes drôlettes
Se mettent
aujourd’hui à faire de la galette.
Demande-leur de
nous en faire goûter. » « Ma foi,
Priez-les
vous-même de nous les donner, cette fois,
Car je ne veux
pas les ennuyer encore,
Et elles se
fâcheront de m’entendre à chaque aurore. »
Lui dit le
domestique. Le bonhomme, vieux farceur,
Se mit à crier
aux fées, sans aucune douceur :
« Je sens
de la galette, fée, dans ta demeure,
Il faut m’en
apporter, maintenant, de la meilleure ! »
Ils trouvèrent
deux galettes au bout de leur sillon,
Qui semblaient
délicieuses, dans un beau corbillon.
Le bonhomme s’écria : « Ces
galettes ont une mine
Qui fait plaisir
à voir. Elles viennent d’une chaumine,
Mangeons-les
sans tarder, elles vont bientôt froidir. »
Mais ils mirent
peu de temps à s’agaillairdir,
Et virent que
leurs galettes, quand ils les coupèrent,
Etaient remplies
de poils. « Ah ! vieille vipère,
S’écria le
bonhomme de son audace puni,
Je ne veux pas
de ton mets de tes poils muni !
Tu te moques de
moi et crois avoir du vice,
Mais sache que j’en
ai autant à ton service ;
Reprends ton
infâme galette et mange-la,
Nous l’aurions
mangée si en enfer il gela. »
Les galettes
disparurent, ce qui fâcha nos trognes
Qui se
querellèrent et finirent leur besogne.
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2166.
dimanche 18 janvier 2015
Conte: La Houle du Châtelet (Partie I)
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