LE SOMMEIL DE MERLIN L’ENCHANTEUR (dixième PARTIE)
X
Comme la mer calme, par la brise
caressée,
Devient silencieuse bien qu’elle fût
courroucée,
La tempête se calma après plusieurs
appels
Et le farouche orage, qui semblait
éternel,
Se tut, et la forêt devint rayonnante.
Une vapeur monta de la source
bouillonnante
Et dans cette vapeur Merlin vit s’élever
Une tour en ruine qui paraissait rêver,
Ouverte et creuse et toute habillée de
lierre.
Une femme, réveillée par le bruit de la
pierre
Jetée par le barde, et ses incantations,
S’endormait calmement, vivante tentation,
Dans cette niche de verdure, sous un toit
d’aubépine
Et de chèvrefeuille, paresseuse et
divine,
La tête appuyée sur son coude aussi blanc
Que la neige, et des gouttes de rosée
tremblant
Sur sa chair rose et sur sa robe verte.
Sa chevelure était une mer, et certes
Etait fauvement dorée, et elle s’enroulait
A son bras et son cou, candides comme le
lait.
Son doux corps respirait la grâce enlaçante
Des bois et des rivières que le ciel
enchante.
Merlin, en la voyant, demeura interdit,
N’osant point s’approcher. Mais, redevenu
hardi,
Caressa de sa harpe les mélodieuses
cordes.
La fée ouvrit les yeux ; cieux que
nul ne sonde,
Ils avaient le sourire céleste et étonné
Et la mélancolie des lacs abandonnés
Qui reflètent la couleur du temps qui s’envole.
Son front reluisait comme une auréole,
Elevant vers Merlin sa baguette de
coudrier,
Elle lui dit : « C’est
toi, Merlin ? J’avais prié
Pour que tu vinsses à moi, et dans tous
mes songes,
Je te voyais, car ton souvenir me ronge
Comme le vautour ronge sa proie en l’assaillant ! »
« Qui es-tu, belle fée ? »
Dit Merlin en tressaillant.
« Ne me connais-tu pas? Jadis je fus
druidesse,
Jadis je commandais, telle une déesse,
Aux éléments tremblants et par mes sorts
surpris.
Hélas ! Les prêtres noirs et les
moines gris
Firent tomber sur moi leurs malédictions
sournoises !
Merlin, je suis Viviane, la fée gauloise,
Je suis ta Viviane et je revis grâce à
toi ! »
« Viviane, Viviane ! Ce nom que
je dis deux fois
M’est doux, et sa divine musique m’est
familière ! »
S’écria la barde, ébloui par la lumière
De cette fée, et par ses charmes
redoutés.
Elle continua : « Ta harpe
a ressuscité
Mon âme, grâce à tes chants soudain
réveillée !
Cette robe légère dont tu me vois
habillée
Et qui montre de mon corps tous les
blancs détails,
Etait mon linceul et du destin mon seul
bail.
Si tu veux embrasser mes lèvres
vermeilles,
Des trois mondes chante-moi les douces
merveilles,
Et fait vibrer les cordes de ta harpe à
nouveau ! »
L’enchanteur amoureux, avec un zèle
dévot,
Exauça la prière de la radieuse captive
Qui l’écoutait, devenue soudain attentive,
Tandis que ses gestes et ses regards
tentateurs
Incarnaient les pensées du prophétique
chanteur
Et son éternel et mystérieux sourire
S’illuminait à chaque mouvement de la
lyre,
Et disait ses extases et ses rêves
vivants.
Enthousiasmé, Merlin s’arrêta en rêvant
Et vit soudain Viviane, fée à la peau
rose,
A genoux devant lui, dans une lubrique
pose,
Eprise et de sa moelle courbée se nourrissant.
Elle se releva, et en le saisissant
Avec sa main droite, comme une terre
humide molle,
Qu’elle mit amoureusement sur sa grande
épaule,
Il ne vit pas que sa harpe avait glissé
Dans la main gauche de Viviane. Terrassé
Par sa divine beauté, il ne voyait plus
qu’elle
Et l’appelait sa déesse, sa nymphe et sa
belle,
Et un instant après se trouva assis
Dans la tour de la fée, les yeux
obscurcis
Par les ténèbres de ses charmes qui
brillent,
Seul avec sa beauté, sur un lit de
jonquilles.
Viviane enlaçait, assise sur ses genoux,
Sa conquête, en lui disant des poèmes
doux ;
Elle était caressante et était enjouée.
Merlin lui dit, d’une voix par l’amour
enrouée :
« Je t’aime, je t’adore ! Sache
que je suis prêt
A mourir pour te plaire et te dire mes
secrets ! »
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
|
La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2180.
mercredi 29 août 2012
Le sommeil de Merlin l'enchanteur (dixième partie)
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