dimanche 26 août 2012

Le sommeil de Merlin l’enchanteur (septième partie)


LE SOMMEIL DE MERLIN L’ENCHANTEUR  (septième PARTIE)



VII

Un sommeil profond, dans cette lande nue,
D’une félicité sublime et inconnue
Emplit le cœur du barde. Les ondes du Léthé
Dans son cœur harmonieux semblaient doucement chanter,
Une lumière radieuse comme une divine victoire
Effaçait les noms et les choses de sa mémoire
Et les yeux de son âme s’ouvrirent tout à coup.
Il vit une créature au visage blanc et doux
Qui reluisait comme une étoile lointaine,
Et qui était si belle qu’elle était hautaine ;
Il s’enivrait de son angélique beauté,
Admirait son charme et sa puissante santé,
Car son âme de son âme était éprise.
Sur la pointe d’un grand rocher assise,
Elle tenait sous son aile une harpe d’argent,
Et à Merlin qui la contemplait en songeant
Dit : « N’en doute point, je suis celle que tu cherches,
Vers moi tu t’envoles et vers moi tu marches,
Je suis ta sœur céleste et ta douce moitié !
Jadis, avant que ton père ne fût châtié,
T’en souviens-tu ? Dans un monde divin nous fûmes
Eternellement unis. Comme les autels qui fument
Et emplissent les cieux de l’odeur des encens,
Nos deux cœurs répandaient un parfum puissant !
Tu m’appelais ton amante et ta Radiance,
Nous errions dans les prés verts comme l’enfance,
Notre foyer était l’Atlantide, sur nous
Les fruits de la sagesse tombaient, et à genoux
Nous priions la nature immense et infinie ;
Nous conversions avec les célestes génies
Qui des mondes sont les divins animateurs,
Qui sont nos confidents et sont nos créateurs,
Nous rayonnions comme le soleil rayonne !
Mais pour conquérir à nouveau ta couronne,
De moi tu fus, malgré mes prières, séparé.
Depuis je te pleure, ô, amant adoré,
Dans les félicités du ciel je suis blême ! »
Le prophète murmura : « S’il est vrai que tu m’aimes,
Descends sur la Terre ! » « Merlin, tu dois savoir
Que, femme de la Terre, je perdrais mon pouvoir
Et des éléments je subirai l’empire.
C’est toi que j’aime et c’est pour toi que je soupire,
Et c’est notre destin d’être toujours unis
Dans cette planète étroite et le ciel infini !
Pour toi, je braverai du sort les sombres ruses,
Je serai ta force, ton génie et ta Muse !
Tu entendras ma voix et tu me reverras
Quand le sommeil pesant qui t’appesantira
Te fera voyager au monde des songes. »
« Je t’aime, divin esprit, et ton amour me ronge !
S’écria Merlin. Au nom de tous mes émois,
Ange aux ailes blanches et radieuses, laisse-moi
De ta rêveuse présence un éternel gage. »
« Vois-tu cette harpe qui gémit et qui soulage
Les hommes et les anges ? Elle est à toi.
Tu seras, grâce à elle, le guide d’un roi,
L’enchanteur des hommes et le voyant du peuple.
Les trois mondes tremblent quand ses cordes tremblent,
Et je te parlerai quand tu la toucheras.
C’est Radiance amoureuse que tu invoqueras,
Alors n’oublie point ce nom ! » La voix cristalline
De cette apparition mystérieuse et divine
Fit soupirer Merlin qu’enflammait le désir.
Il voulut regarder Radiance et la saisir,
Mais il ne vit que deux ailes, vastes et amoureuses,
Qui sur sa tête se déployaient, lumineuses,
Une lueur dans l’espace, sur son front un baiser,
Et il se trouva seul, par ses feux embrasé. 

Quand les bardes royaux de la grotte sortirent,
Merlin s’éveillait, et surpris ils le virent
A son cou une étoile, la harpe dans ses bras.
Taliésinn reconnut, en voyant son aura,
Et en voyant aussi ces deux divins signes,
A son disciple qu’il aimait les dons insignes
De l’inspiration et de la magie. Chantant,
L’élu prédit, devant tous les bardes contents,
Des Bretons victorieux les futures victoires
Et du roi Arthur la grandeur et la gloire,
Il chanta la terre et il chanta les flots,
Et des bardes il reçut la couronne de bouleau
Et l’écharpe bleue, et dans la grotte dorée
Fut consacré prophète après l’épreuve sacrée.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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