LE SOMMEIL DE MERLIN L’ENCHANTEUR (DEUXIÈME PARTIE)
II
Voilé d’un nuage
sombre, l’Ange proscrit
Apparut à la nonne
au cœur vaguement épris
Des êtres maudits
et des choses funèbres.
Son front étoilé
brillait dans les ténèbres,
Une comète y
traînait sa sinistre lueur,
Ses yeux, qui
osèrent braver le Seigneur,
Etaient pourprés ;
on en voyait tomber des larmes
D’une éternelle
douleur, souvenirs des doux charmes
Du ciel perdu, de
la chute et de ses remords.
Autour de ses
flancs, le noir serpent de la mort
Qui étreint les
hommes, les mondes et les créatures,
S’enroulait trois
fois, et comme l’aigle qui torture
Prométhée,
torturait sa proie éternellement.
Carmélis leva les
yeux et dit doucement
Au spectre
foudroyé : « Qui es-tu, fantôme ? »
« Je suis le
seul ange que maudissent les hommes,
Répondit Lucifer.
L’Abhorré, le Tombé
Qui devant l’Éternel
ne s’est point courbé.
Je suis damné,
mais je suis aussi nécessaire,
Ma désobéissance a
été sincère
Et vous obéissez
parce que vous avez peur.
On m’appelle le
Déchu, le Trompeur,
Mais tout serait,
sans moi, une ombre qui passe !
Je tiens la
colonne du temps et de l’espace,
Je suis le roi de
l’air et du monde inférieur,
Toutes les âmes
bannies passent à l’intérieur
De mon royaume,
par les brises remuées,
Avant de remonter
aux éternelles nuées
Ou de s’en aller
dans les ténébreux enfers.
Les souffrances
que je cause maintiennent l’univers,
Mais j’en souffre
au centuple et j’en gémis moi-même. »
« Pauvre
archange tombé et que nul cœur n’aime !
S’écria Carmélis.
Dans mes mains je prendrai
Une de tes larmes,
et je la porterai
Comme on porte un
fardeau sublime et céleste,
A tes ennemis qui
t’abhorrent et te détestent,
A tes frères les
archanges et les verbes vivants
D’Élohim. Ils
verront cette larme en rêvant
Et elle emplira
leurs cœurs que tu courrouces
De la divine
clémence et de la pitié douce. »
« Ils ne
peuvent rien pour moi. Mais si tu plains le sort
De celui qui brave
la griffe qui ronge son corps,
Veux-tu sauver une
âme qui erre pourchassée
Dans le royaume de
l’air, de son mouvement lassée,
En l’adoptant
comme un fils ? » Demanda Lucifer.
« La foi peut
sauver toutes les âmes de l’enfer ;
Je le veux car je
t’aime, âme maudite et ardente ! »
Dit à Lucifer la
dormeuse imprudente.
« Alors je
reviendrai ! » dit l’archange puissant,
Et il déploya ses
ailes en s’effaçant
Comme les météores
qui dans l’abîme pullulent.
Une nuit, la nonne
qui dormait dans sa cellule
D’un sommeil
agité, vit entrer un pèlerin
Courbé sur son
bâton, au visage serein
Caché par son
sombre capuchon. Tranquille,
Bien qu’il fût
épuisé, il demanda l’asile
D’une voix
suppliante et douce. « Eh bien ! Couche-toi
Sur ces dalles, et
dors sans crainte sous ce toit. »
Dit Carmélis sans
peur. Le pèlerin devant elle
S’agenouilla.
Soudain, elle vit des ailes
Noires comme la
nuit, surgir de ses haillons,
Et ses yeux s’emplirent
tout à coup de rayons.
Carmélis vit l’ange
maudit sans voile
Qui au front
portait la radieuse étoile
De la science
rebelle et de l’obscur orgueil.
Ses ailes frémissaient,
ténébreuses comme le deuil,
Et touchaient la
voûte, larges et crépusculaires,
Et ses yeux
étaient pleins d’amour et de colère.
Carmélis frissonna
et n’osa point bouger.
Comme si elle
était seule, en train de songer
A quelque chose de
noir devant cette ombre énorme,
Clouée sur sa
couche, elle contemplait cette forme
Mystérieuse,
fascinée par sa sombre splendeur,
Et, fleur des
ténèbres, respirait son odeur.
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2180.
mardi 21 août 2012
Le sommeil de Merlin l’enchanteur (deuxième partie)
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