mercredi 1 juillet 2015

Conte: La soupe aux pierres (Partie VI)

CONTE: LA SOUPE AUX PIERRES (PARTIE Vi)


VI. Ce que le Seigneur fit pour se venger de Marie, et comment sa sœur Anne lui fut charitable malgré ses mauvaises actions

Le Seigneur s’en alla, en manant déguisé,
Châtier la sombre sœur dont il fut méprisé
Qu’il frappa de mille terribles désastres
Pour punir son orgueil haut comme les astres.
Anne pleurait, le cœur plein de douce bonté,
Mais de Dieu ne pouvait changer la volonté.
On criait au secours, de grands cris résonnaient,
Pour annoncer le feu les cloches qui sonnaient
Rendaient des bruits affreux ; la flamme grandissait
Qu’on ne pouvait éteindre, et on la maudissait.
Tous les braves efforts étaient inutiles,
Et on vit tout à coup, éphémère et futile,
La maison de Marie s’écrouler maussadement
Comme un fauve blessé poussant un grondement.
La vengeance de Dieu accomplie, à Marie
Quand s’éteignit enfin cette flamme en furie,
Il ne restait plus rien, ni chevaux, ni moutons,
Ni bœufs, et ses enfants bien nourris et gloutons
Devinrent tout à coup les plus pauvres hères,
Et tous réduits à la plus grande misère,
Personne ne voulut chez soi les recevoir,
Les aider ou faire son chrétien devoir
Car personne n’aimait la mère sans doute.
En montrant ses mains vides elle errait sur les routes
Et disait à tous : « S’il vous plaît, la charité ! »
Mais on la punissait avec sévérité
Et l’ignorait pour sa méchanceté passée.
Triste cependant et de la marche lassée,
Elle arriva un jour au foyer de sa sœur
Et l’implora avec contrition et douceur :
« Anne, ma bonne sœur ! Je n’ai plus de demeure
Et mes pauvres enfants affamés se meurent.
Au nom du Tout-Puissant, daigne me pardonner
Et un morceau de pain seulement me donner. »
« Sans doute, ma chère, dit la douce Anne, entre. »
Pour guérir la faim qui lui tordait le ventre,
Anne lui donna, sans songer à la châtier,
De la viande, du vin et un pain tout entier.
« Mange, mange, Marie, ma sœur, lui disait-elle.
Où sont donc tes enfants ? » « Hélas ! La faim mortelle,
Lui répondit Marie, les a tous emportés. »
« Pauvre sœur ! Mais est-ce la faim ou la fierté
Qui t’a poussée à me mentir de la sorte ? »
« J’ai été méchante et t’ai fermé ma porte
Et j’ai voulu, ma sœur, te faire ainsi pitié,
Car je craignais de toi la même inimitié. »
« De cette ruse tu n’as point besoin ; reste,
Tu oublieras ici tes anciens jours funestes,
Et puisque je suis riche t’invite à demeurer. »
Pour la première fois Anne la vit pleurer,
Elle accepta son offre et resta chez elle
Et s’occupa de ses enfants avec zèle,
Comme s’ils étaient les siens, les aimant doucement
Jusqu’à sa mort qui vint, à son vieillissement,
Frapper à la porte et courtoisement attendre
Et sourire aux deux sœurs d’une manière tendre.

[FIN DU CONTE: LA SOUPE AUX PIERRES]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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