la solitude de lucifer
Franz von Stuck,
Lucifer (1890)
Pareils
à deux flambeaux aux rayons funèbres,
Les
yeux de Lucifer brillent dans les ténèbres,
Et
sur son roc assis, effrayant et pensif,
Il
est un flot brisé sur le monde récif.
Sur
l’éternité il ploie ses ailes noires,
Condamné,
exilé, sans sceptre et sans gloire ;
Un
croissant de lune, tombé près de lui,
De
l’arbre du Néant fruit pesant qui reluit,
Lui
rappelle sa nuit éternelle et morne
Et
comme l’univers lui-même sans bornes
Qui
le couvre telle un insondable linceul.
Ne
point mourir et vivre éternellement seul !
Etre
proscrit partout comme le vent qui passe !
Ne
pas pouvoir lever au ciel ses mains lasses
Pour
demander la mort ou demander l’enfer !
Demeurer
enchaîné à d’invisibles fers
Lourds
comme les astres et tombant des mondes !
Le
Démon songe dans la nuit profonde,
Nu
dans l’immensité et le froid de l’hiver
Qui
s’appesantit sur le chétif univers
Telle
une maladie puissante et funeste,
Rose
qui s’épanouit en répandant la peste
Et
dont les pétales sont immenses et noirs
Empêchant
les cœurs de battre et les yeux de voir.
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2194.
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mercredi 25 janvier 2017
La solitude de Lucifer
mercredi 6 mai 2015
Conte: Du Jongleur qui alla en enfer (Partie III)
CONTE: DU JONGLEUR QUI ALLA EN ENFER (PARTIE IiI)
III. Comment se termina la partie que le ménétrier
joua contre saint Pierre, et ce que fit Lucifer
Le ménétrier va, dans la chaudière
immense,
Chercher quelques âmes, et la partie
commence,
Pierre étale son or, et au bord du
fourneau
Les deux jours s’assoient dans les
gouffres infernaux.
Le saint gagnait toujours, malgré toute
l’adresse
De son adversaire qui, sans nulle
paresse,
Redoublait et même triplait tous ses
paris,
Mais perdait toujours et en était fort
marri.
Ne comprenant rien à cette infortune
cruelle
Et qui lui était, plus est, perpétuelle,
Il s’étonna d’abord de sa dextérité
Puis se dit qu’il trichait au jeu en
vérité
Car il ne pouvait perdre autant de fois
de suite.
Il se fâcha donc de l’indigne conduite
De son adversaire, s’emporta, l’injuria
Et qu’il ne paierait point une âme lui cria.
Son adversaire lui dit qu’il n’était qu’un
fourbe,
Ils se battirent et ils se prirent à la
barbe,
Le saint était le plus fort et il le
rossa.
De cette querelle bientôt il se lassa
Et proposa à saint Pierre une autre
partie.
« Toutes les âmes de la chaudière sorties,
L’avertit le saint, n’y vont plus y
revenir,
Car cette fois je ne vais plus me
retenir
Pour te jeter dedans. » Chevaliers ou
moines,
Roturiers ou princes, chanoinesses ou
chanoines,
Le ménétrier lui jura qu’il choisirait
Parmi toutes ces âmes celles qu’il
désirait
Et promit de payer, cette fois, sans
traitrise.
A cette partie, à sa plus grande
surprise,
Notre ménétrier ne fut pas plus heureux,
Et au jeu n’étant point toutefois un
peureux,
Joua cent âmes, mille âmes, les perdit
toutes,
Ce qui rendit le saint très content sans
doute.
Certain de perdre face au prodigieux
joueur,
Il se leva, disant qu’il lui faut un
voueur
Pour gagner la partie, maudissant l’infortune
Qui sur terre comme en enfer l’importune.
Le saint, sans s’occuper de ses
malédictions,
Alla sauver de leur éternelle affliction
Des âmes à la chaudière. Toutes les
victimes
Criaient en l’implorant d’être
magnanime.
Mais le ménétrier furieux y accourut,
Et comme jadis sur terre resté bourru
Et aventurier, il résolut sans attendre,
Dans sa folie, de tout gagner ou tout
perdre.
Il proposa au saint, qui ne voulait pas
mieux,
De jouer toutes les âmes, et l’apôtre
vieux
Gagna encore et prit toutes ces âmes
heureuses
Au paradis, loin de la géhenne affreuse.
Lucifer arriva quelques heures plus tard
Avec sa troupe, et fut courroucé et
hagard
De voir tous ses brasiers éteints et
livides
Et sa vaste chaudière devenue soudain
vide.
Il appela le chauffeur : « Par
mes scorpions et rats
Tu seras dévoré ! Qu’as-tu fait,
scélérat ?
Où sont mes prisonniers ? Je ne
vois nulle âme,
Prépare-toi à être embrasé par la
flamme,
Je vais t’écorcher vif, et comme un bon
repas
Te cuire, sans même t’accorder le
trépas. »
Le ménétrier, qui tremblait de tous ses
membres,
Conta à Lucifer toute l’affaire sombre
En accusant du sort la noire inimitié
Et en implorant de son maître la pitié.
« Quel est donc le butor qui à mon
royaume,
S’écria Lucifer, a amené cet homme ?
Qu’on l’amène à son tour, il va s’en
repentir. »
On lui amena donc, sans un instant
ralentir,
Le pauvre diablotin. D’une verte manière
On l’étrilla ; jusqu’à son heure
dernière
De ne plus se charger d’aucun ménétrier
Il jura. Quand on eut fini de l’étriller,
Le monarque ordonna : « Chassez
d’ici ce hère,
Et votre châtiment sera des plus sévères
Si vous osez faire venir des musiciens.
Dieu peut le recevoir à l’éden. Il est
sien
Car il aime la joie, et moi je l’abhorre. »
Le chanteur ne se fit pas prier encore,
Il se sauva et fut reçu au paradis.
Ménétriers, jongleurs, aucun ne vous l’a
dit :
Réjouissez-vous, que le Diable vous emporte !
Ce ménétrier vous a fermé la porte
De l’enfer, et vous n’y serez jamais
entrés
Grâce à cet homme que saint Pierre a
rencontré.
[FIN DU CONTE: DU JONGLEUR QUI ALLA EN ENFER]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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mardi 5 mai 2015
Conte: Du Jongleur qui alla en enfer (Partie II)
CONTE: DU JONGLEUR QUI ALLA EN ENFER (PARTIE Ii)
II. Ce que saint Pierre, déguisé en vieil homme,
convainquit le ménétrier de faire
Un jour Lucifer,
las d’entendre les mêmes râles,
Pour qu’ils
fissent ensemble une battue générale
Convoqua ses
suppôts, et avant de partir
Appela le chauffeur,
qu’il prit soin d’avertir
Qu’il devait se
charger pendant son absence
De sa mission,
et que la moindre licence
Qu’il
accorderait aux captifs, ferait de lui
L’éternel repas
de la flamme qui reluit.
« Sire,
partez en paix. Que rien ne vous retarde,
Dit le
ménétrier. Ils sont sous bonne garde,
Je ne me
lasserai point de vous obéir
Et je fais le
serment de ne point vous trahir. »
« Je le
saurai, lui dit-il, si tu es traître,
De ces lieux que
tu vois je suis l’unique maître,
Et donnerai l’ordre
de te faire rôtir. »
Dès qu’il vit l’armée
de démons enfin partir,
Saint Pierre,
qui guettait patiemment l’heure
D’entrer sans
souci à l’infernale demeure,
Y alla, en
vieillard habilement déguisé,
Qui par le
fardeau des années était brisé,
Avec une barbe
blanche et la tête baissée
Et de longues
moustaches qui étaient bien tressées.
Il accosta notre
ménétrier : « L’ami,
Pour jouer aux
dés ma mère au monde m’a mis
Bien qu’elle ne
fût pas de mon sort avertie.
Il y a de l’argent.
Veux-tu faire une partie ? »
Et il lui montra
sa bourse emplie d’écus d’or.
« Je n’ai
plus rien, lui dit le bonhomme, et je dors
En enfer, hélas !
je n’ai, pour seule mise,
Que cette loque
qui me sert de chemise.
Ne me tentez
donc point et partez, étranger,
Cessez, car je
travaille, d’ainsi me déranger. »
Saint Pierre
répliqua : « Tu as bien autre chose
A miser, et seul
un brave joueur l’ose,
Ce sont ces
jolies âmes de damnés que je vois. »
« Quoi ?
s’écria le pauvre hère, baissez la voix !
Si Lucifer
entend ce que vous osez dire,
Il nous fera
rôtir tous les deux, plein d’ire.
Trouvez-moi
quelque autre monnaie. » « Sombre idiot !
Repartit saint
Pierre, aux néants primordiaux
Ton maître de
chasser avait l’habitude,
Cinq ou six âmes
sur une telle multitude
Sont invisibles.
Allons, il ne va rien savoir,
Je mets vingt
sous au jeu, et tu peux les avoir,
Regarde ces
belles pièces toutes neuves !
Amène-moi des
âmes de pauvres et de veuves,
Si je m’en vais,
tu vas seul ici séjourner
Sans me voir
plus jamais à ces lieux retourner. »
Malgré l’avertissement
qu’il venait d’entendre,
Le ménétrier,
qui avait peur de perdre,
Consentit à
jouer quelques coups seulement
Et une âme à la
fois, contemplant pâlement
Les dés, sans
pouvoir y tenir. « Tope pour une,
Dit l’apôtre,
mâle ou femelle, blonde ou brune,
C’est comme tu l’entends,
je te laisse choisir,
Et tu peux en
miser, mon bonhomme, à loisir. »
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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lundi 4 mai 2015
Conte: Du Jongleur qui alla en enfer (Partie I)
CONTE: du jongleur qui alla en enfer (PARTIE I)
I. Comment un ménétrier alla en enfer, et la mission
dont Lucifer le chargea
A Sens, jadis,
vivait un doux ménétrier,
Bon garçon mais
errant comme un aventurier,
Homme dérangé
qui hantait les cavernes
Et qui dépensait
tous ses sous à la taverne.
Gagnait-il
quelque argent ? Vite il se déridait
A secouer les
dés ou aux pots qu’il vidait.
Sans le sou, il
mettait son violon en gage.
Aussi,
déguenillé, n’ayant point de bagage
Autre que sa
chemise, souvent même nu-pieds,
Par la bise ou
la pluie comme aux manants il sied
Il allait, sur
la tête un chapel de branches,
Demandant de
mettre la semaine en dimanches
Au Seigneur
tout-puissant, et cependant content.
Il mourut enfin
et ne vécut point longtemps.
Un jeune diable,
encore novice,
Qui cherchait
une âme souillée par le vice
Depuis un mois,
sans qu’il ne pût l’escamoter,
Vit notre violoneux,
et de le ligoter
S’empressa, et
joyeux, emporta son âme
Jusqu’à la
géhenne rougie par les flammes.
A cette même
heure, aussi fiers que des monts,
De la chasse
revenaient de sinistres démons ;
Lucifer, sur la
tête sa royale couronne,
Pour les voir
arriver assis sur son trône,
Les attendait.
Chacun d’eux à ses pieds jetait
Sa proie, et du
poids de son fardeau haletait,
Il y avait des
champions portant encor le heaume,
Des marchands,
des voleurs et des gentilshommes
Et même des
moines, tous poussant d’affreux cris
Et d’être les
hôtes de Lucifer surpris.
Le noir
monarque, dont l’âme est sombre et altière,
Fit jeter les
captifs dans sa vaste chaudière
Quand il les eut
d’abord tous bien examinés,
Puis il ferma la
porte et sans être chagriné
Demanda s’il y
avait encore du monde.
« Oui,
répondit-on, un pauvre manant immonde
N’est toujours
pas rentré. Il est fait comme un bœuf
Et c’est un
pauvre idiot, bien simple et bien neuf. »
Le diablotin
parut en ce moment même
Et le ménétrier
déguenillé et blême.
Lucifer ordonna : « Ah !
approche, mon beau.
Es-tu voleur,
espion ? Ou serais-tu ribaud ? »
« Non,
sire, répondit-il, dans ma vie physique
J’étais
ménétrier, et sur terre en musique
Je suis le plus
docte, sans vouloir me vanter.
Vous ne
gagneriez donc rien à m’épouvanter,
Au lieu de me
mettre au supplice, je propose
De vous égayer
par des chansons non moroses. »
« Des
chansons ! s’écria le cruel Lucifer,
Ce n’est point
la musique qu’il me faut en enfer.
Vois-tu cette
chaudière bien haute et bien large ?
De la faire
chauffer, chanteur, je te charge,
Et, parbleu !
tu veilleras qu’il y ait toujours bon feu.
Si tu le
refuses, tu y seras sous peu,
A te plonger
dedans mes démons seront prestes. »
Notre homme se
rendit aussitôt à son poste,
Content d’échapper
à l’éternelle affliction,
Et s’acquitta
comme il se doit de sa fonction.
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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vendredi 6 juillet 2012
La bataille d’Armageddon
La bataille d’Armageddon
Sur le mont
Megiddo haut comme le ciel,
L’archange Lucifer
et l’archange Michel
Armés de leurs
épées, méditent et se regardent.
L’immensité
tremble, ténébreuse et hagarde,
Car voici venir
l’heure du combat final
Du jour contre la
nuit, du Bien contre le Mal,
Qui fait
tressaillir toutes les pâles créatures.
Michel est revêtu
de sa sombre armure
Et a sa lame qu’on
voit reluire de loin,
Lucifer
orgueilleux n’a que l’épée au poing.
Les deux rivaux
attendent que le clairon sonne
Le duel terrible,
et l’éternité frissonne
En les voyant tous
les deux se contempler là.
Lucifer, le
premier, parle et dit : « Je suis las
D’attendre
éternellement que Dieu enfin daigne
Souffler dans son
clairon pour que ses fils saignent ;
Ce combat est
l’une de ses divines dérisions !
A ses yeux nous
sommes poussières et illusions,
Il peut te tuer et
me faire disparaître
Mais il veut que
notre sang coule pour s’en repaître
Car il est cruel,
et sans doute il sourit
En nous regardant
tous les deux avec mépris !
Pourquoi avoir
créé le Mal s’il l’abhorre ?
A quoi sert la
nuit ? A quoi sert l’aurore ?
A quoi sert toute
l’immense création ?
Pourquoi créer les
hommes que bercent les passions
Et les châtier
ensuite pour leurs sombres fautes ?
Punit-on la cime
parce qu’elle est haute ?
Châtie-t-on un
aveugle parce qu’il ne voit pas ?
Pour plaire à ce
bourreau nous courons au trépas !
Ne combattons
point. Ne sommes-nous pas frères ? »
« Tu as
désobéi à notre saint père
Répond Michel. Et
tu dois êtes châtié.
Ne me tente point
car mon cœur est sans pitié.
Père t’a coupé les
ailes, je te couperai la tête
Pour que son
œuvre, encore inachevée, soit complète.
Pourquoi le
Bien ? Pourquoi le Mal ? Vaines questions !
Nous lutterons
parce que Dieu veut que nous luttions.
Tu trembles car tu
sens venir ton heure dernière,
Comme la tête de
Josias, ta tête altière
Quand tu seras
vaincu, dans ce mont tombera »
« Prends
garde, Michel, car tu peux perdre ton bras »
Dit Lucifer
railleur, le sourire aux lèvres.
Soudain, comme à
la tête monte la fièvre
Et de sa victime
pâle rougit le font,
On entend monter
le son du divin clairon
Et le combat
affreux dans l’ombre commence.
Ô, des
flamboyantes épées choc immense !
Courroux
inexorable, éternelle horreur !
Des deux épées on
voit jaillir des lueurs,
Le matin impatient
dans l’azur se lève
Réveillé par le
bruit terrible des glaives,
Les deux frères
luttent comme deux ennemis,
La géhenne hurle
et le paradis gémit,
Dans le ciel on
entend Dieu qui soupire.
Lucifer a aux
lèvres son ténébreux sourire
Et le vaillant
Michel a la flamme aux yeux ;
A son frère il
assène un coup si furieux
Et si puissant, qu’il
choit, blessé à la jambe.
Le regardant avec
ses yeux qui flambent,
Il lui dit : « Mon
frère, repose-toi un peu,
Tu périras debout,
tel est l’arrêt de Dieu »
De la balafre de
Lucifer, béante,
Deux gouttes de
sang, noires et comme les monts géantes,
Plus pesantes que
les flots de l’océan,
Fardeaux sombres
et énormes, sont tombées du néant
Dans le monde
éphémère où vivent les hommes,
L’une est devenue
Gomorrhe, l’autre Sodome.
Dans l’ombre
épouvantée le combat se poursuit,
Les fers reluisent
comme le soleil reluit
Et à la nuit
blessée font maintes cicatrices.
Michel gémit tout
à coup, atteint à la cuisse ;
Trois plumes de
ses ailes nous sont tombées dessus
Pour devenir
Moïse, Mahomet et Jésus.
Lucifer rugit
comme la houle et à son frère
Dit : « Tu
m’as épargné, je ne vais pas le faire,
Michel, tu
périras, debout ou endormi ! »
Et lui assène un
coup dont Dieu lui-même frémit,
Tellement farouche
que son épée est restée
Dans l’immense roc
qu’elle n’a pu occire plantée.
Cette vaste épée,
c’est la radieuse Excalibur
Que, quelques
siècles plus tard, a porté Arthur.
L’archange Michel,
fier, jette sa lourde épée
Et dit à son frère : « Nos
mains sont mieux trempées »
Et les voilà qui,
à mains nues et acharnés,
Combattent corps à
corps, pareils à deux damnés
Qui jamais ne s’arrêtent
et ne se reposent
Car telle est la
loi du Maître des choses,
Et qui, muets et
blêmes, luttent éternellement
En se jetant,
armes volées au firmament,
Des astres qui
jusqu’à aujourd’hui tournent
Sans jamais s’évanouir,
dans l’espace sans bornes.
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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