dimanche 5 juillet 2015

Conte: Les trois oranges (Partie I)

CONTE: Les trois oranges (PARTIE I)

I. Pourquoi le roi châtia injustement sa fille Marie, le jardin auquel elle arriva au terme de son errance, et le conseil qu’une fée lui donna

La reine d’un pays immense et prospère
Venait de mourir en faisant du roi le père
D’une fillette aussi belle que les amours
Qui s’appelait Marie, douce comme le jour.
Le roi veuf qui l’aimait de toute son âme
Porta pendant un an le deuil de sa femme ;
Mais il se remaria après, car il fallait
Qu’une reine vécût avec lui au palais.
Il en eut une autre fille, sombre offrande,
Qui était si laide quand elle devint grande
Que sa mère dit un jour au roi jalousement :
« Hier des témoins ont vu les embrasements
De Marie, votre fille, et l’officier qu’elle aime.
En vous le racontant je suis moi-même blême,
Mais il vous faut savoir ce délit abhorré
Et que votre fille vous a déshonoré.
Je ne puis vous dire sa désinvolture
Ou vous raconter ce qu’on dit de l’aventure
Qu’on murmure tout bas dans votre cour,
Car, seigneur, je veux, moi, vous porter secours ;
Ma pudeur me défend d’encore vous déplaire. »
Le roi brûla d’une terrible colère
A ces mots, et cria : « Chassez-la sans tarder !
Je ne veux plus sa voix ouïr ou la regarder !
Si je la vois ce soir, cette malheureuse,
Je la jetterai dans ma prison la plus affreuse
Où elle périra sans voir le firmament. »
La reine exécuta donc précipitamment,
Allant à la chambre de la fille innocente,
Toujours vertueuse et jamais offensante,
Sans dévoiler sa joie, le noir ordre du roi.
Marie se désolait, pleurait, tremblait d’effroi
Et voulait voir le roi, malgré sa défense,
Mais on n’écouta point son innocente enfance
Et la fillette fut obligée de partir.
Elle sentit la marche dix jours appesantir
Ses pas errants, ainsi que dix nuits entières ;
La petite, malgré elle aventurière,
Poussée sans doute par le vent de son destin,
Arriva enfin à un grand jardin lointain
Où il y avait de beaux fruits de toutes sortes,
Fardeaux que mille arbres courbés sans gémir portent.
A son entrée, Marie vit un vaste oranger
Que rien ne défendait aux curieux étrangers
Et qui portait seulement trois grosses oranges.
Quand elle les cueillit de cet arbre étrange,
Car elle avait grand faim, dès qu’elle en ouvrit un,
Il sortit du fruit, plus petite qu’un lutin,
Mais charmante et gentille, une fée bien frêle
Et qui grandit d’une façon surnaturelle
Et demanda à boire, car la soif la rongeait.
La douce Marie, qui comment l’aider songeait,
Vit qu’elle n’était pas loin d’une fontaine.
Elle donna de l’eau à la fée, certaine
D’éteindre sa soif, mais la fontaine sécha,
Et en vain d’en chercher Marie se dépêcha.
« C’est tout ? » demanda-t-elle à la bonne Marie.
« Oui, hélas ! répondit-elle, et j’en suis marrie.
Il n’y a point d’autre eau pour vous en cet endroit. »
« Adieu alors, Marie ! Adieu, fille du roi !
Je m’en irai bientôt ; mais puisque tu es bonne
Suis ce précieux conseil qu’une fée te donne :
Tu ouvriras tes deux oranges, deux fardeaux,
Seulement quand tu auras près de toi assez d’eau
Pour désaltérer leurs deux fées prisonnières. »
Et la fée disparut d’une étrange manière.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène 

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