CONTE: LA BONNE SERVANTE (PARTIE IiI)
III. Comment Ange put guérir le roi, qui la
récompensa avec gratitude
La jeune fille alla à la chambre royale,
Mais on la repoussa, et sa garde loyale
L’empêcha rudement d’entrer et de le
voir
Et se crut obligée, pour faire son
devoir,
De lui donner des coups de pied au
derrière
En chassant des lieux cette hardie
roturière.
Ange en était triste et s’en alla, mais
devint
Plus inquiète pour son roi, et bientôt
revint.
Elle implora ainsi le gardien : « Je
vous prie
De me laisser entrer, pour notre roi
marrie,
Monsieur le gardien. » « Non,
va-t’en sans revenir,
Répondit le rude homme, ou je vais te
punir. »
« Le roi se porte-t-il bien ? » « Mais
que t’importe ?
Ne viens plus, morveuse, devant cette
porte. »
Il la prit par le bras et la jeta dehors
Quand elle s’approcha un peu, et cria : « Sors ! »
La bonne servante vit, le lendemain, l’ange
Apparaître, aux ailes blanches comme des
langes,
Qui lui dit : « Prends
cette herbe enchantée et fais-en
Une tisane que le roi agonisant
Doit boire pour vivre. » Ange fit
la tisane
Puis pria à genoux, la bonne paysanne,
Et devant le roi elle alla se présenter
Rapidement, car il lui fallait
diligenter.
Elle fut repoussée comme d’habitude
Par le méchant gardien avec promptitude,
Et désolée, la pauvre Ange s’en
retournait,
Quand elle vit une vieille qui
séjournait
Au palais depuis trente ans, en long
veuvage.
Ange lui dit : « Pourriez-vous
porter ce breuvage
Au roi notre seigneur pour qu’il se
porte mieux ? »
La vieille veuve, qui avait un bon cœur
pieux,
Consentit. Dès que le roi entre ses
lèvres
Sentit passer cette tisane, sa fièvre
Disparut. Redevenu soudain vif et
vermeil,
Il se réveilla de son macabre sommeil.
« Ah ! je vais bien !
dit-il, et je vous révèle
Que je me sens empli de jeunesse
nouvelle. »
Après quelques instants, le roi content
voulut,
Quand il eut déjeuné, comme au passé
goulu,
Savoir qui lui avait ainsi rendu la vie
Qui par la maladie allait être ravie.
Mais nul ne le savait. « Je veux
maintenant le voir,
Répéta le monarque, et son nom savoir. »
La veuve, s’approchant, dit alors : « Altesse,
C’est la servante, Ange, pleine de
tristesse
De vous voir malade, qui a pu vous
guérir,
Et comme son père je l’ai vue vous
chérir. »
On appela la fille qui arriva en larmes,
Pour son maître le roi encore emplie d’alarmes.
« Monseigneur va-t-il mieux ? »
demanda-t-elle. « Oui,
Répondit le roi, que tu m’as guéri j’ai
ouï,
Grâce à un breuvage. Dis-moi, ma petite,
Qui t’a aidée à le faire, que je l’invite
Et le récompense comme tu le seras. »
« Mais votre majesté, quand elle le
saura,
Me croira-t-elle ? » « Oui,
même si c’est étrange,
Parle, ma chère enfant. » « C’est
un ange. » « Un ange ? »
« Oui. » « Eh bien !
puisque j’ai un ange pour médecin,
Fais tout ce qu’il dira, accomplis ses
desseins. »
« Vous ne tarderez pas, répondit la
servante
Plus que les médecins érudits savante,
A être complètement guéri. » « J’en
suis content,
Dit le roi, et il me faut vivre assez
longtemps
Pour louer Dieu et pour que je te
récompense.
Tu seras mon premier médecin, et je
pense
Que tu as assez de bonté et de raison
Pour commander à tous les gens de ma
maison. »
Ange en fut fort heureuse et couverte de
gloire.
On donna en quelques jours à manger et à
boire
Pour fêter la santé du roi enfin guéri.
Ange n’oublia pas ses bons manants
chéris
Qui venaient aux portes demander l’aumône ;
Elle dit à ses gens : « Que
toujours on leur donne
A boire et à manger, et ne manquent de
rien. »
Et leur fit, dans sa vie, infiniment de
bien.
Quand la bonne fille mourut, tout le
royaume
En fut attristé et en deuil ;
femmes et hommes
La pleurèrent, pendant douze jours qu’on
donna
Le majestueux deuil, nul cloche ne sonna
Et on interrompit les jeux et les
danses.
Qui aurait pu avoir assez d’outrecuidance
Pour se réjouir après un si sombre
malheur
Que moi-même je vous raconte avec pâleur ?
[FIN DU CONTE: LA BONNE SERVANTE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2164.
samedi 4 juillet 2015
Conte: La bonne servante (Partie III)
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