samedi 27 juin 2015

Conte: La soupe aux pierres (Partie III)

CONTE: LA SOUPE AUX PIERRES (PARTIE IiI)


III. La solution que trouva Anne pour faire patienter ses malheureux enfants

Le cœur d’Anne était plein d’une douleur mortelle.
« Que vais-je à mes petits donner ? se disait-elle ;
A l’heure qu’il est, ils m’attendent pâlement,
Les pauvres ! Ah, Seigneur ! S’ils pouvaient seulement
Patienter jusqu’à ce que le matin reluise,
Que je trouve quoi faire ! Mais la faim les épuise,
Je leur ai promis la soupe et ils sont soupiers. »
Elle eut tout à coup une idée ; dans du papier
Elle enveloppa trois belles pierres polies
Sans qu’on la vît faire cette étrange folie.
A la maison toute joyeuse elle semblait
Alors que du destin son triste cœur tremblait.
« François, as-tu cherché de l’eau ? » « Oui, ma mère,
Répondit le petit d’une voix amère.
As-tu de la viande ? » « Oui, j’en ai apporté.
Jean, à trouver du bon bois je t’ai exhorté,
En as-tu trouvé ? » « Oui, mère. Mais la viande –
J’ai trop faim, pour cela je te le demande –
A cuire va-t-elle demeurer trop longtemps ? »
« Non, répondit Anne, jouez, soyez contents,
Je vous appellerai quand elle sera cuite. »
Les enfants, tout joyeux, s’en allèrent de suite
En rêvant de manger et terrasser enfin
Cette ténébreuse et insupportable faim.
Dès qu’ils sortirent, Anne, sans fermer sa paupière,
Mit au feu la marmite et y mit les trois pierres.
Quelque temps après, les enfants rentrèrent, las.
« La viande est-elle cuite ? » « Non, pas encore. » « Hélas ! 
Nous avons grand faim ! Pour qu’elle soit tendre
Combien de temps allons-nous, maman, attendre ? »
« Peu de temps. Jouez, en attendant, mes chéris. »
Les pauvres, comme s’ils avaient déjà péri,
Pour jouer, cependant, n’avaient plus de force,
Alors qu’ils étaient vifs, ces fiers enfants de Corse.
N’en pouvant plus, l’aîné s’écria : « Ah ! maman !
Tu nous fais attendre, et en nous affamant
Tu nous promets un bon repas qui nous tarde.
La viande cuit-elle toujours, mère ? Regarde
Pour voir si tu n’as point fait d’erreur. » « Sur ce feu,
Elle sera bientôt prête. Attendez un peu. »
Et Anne soupirait de son sombre mensonge.
Ses misérables fils que la famine ronge
Attendirent longtemps ; Anne ajoutait de l’eau,
Et ils éclatèrent bruyamment en sanglots
Quand elle leur dit qu’elle n’était point cuite encore
Alors qu’on était à une heure de l’aurore.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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