CONTE: LAI DU PALEFROI VAIR (HISTOIRE DU CHEVAL GRIS) (PARTIE Vi)
VI. Le bonheur des deux amants, qui devinrent mari
et femme
Pour qu’on pût arriver chez Guillaume,
il fallait
Passer à gué une rivière. Il y allait,
L’intrépide cheval. Le bruit que ses pas
firent
Et sa brusquerie à pâlir Nina suffirent.
De sa triste rêverie quand la pauvrette
sort,
Elle voit le chemin désert comme la mort
Où il n’y nul vivant, hélas, qui
séjourne.
Pour appeler son parrain elle se
retourne
Mais ne voit personne. L’inquiétude et
le froid
La faisaient tressaillir et l’emplissaient
d’effroi,
Mais l’idée de fuir cet hymen qu’on lui
destine
La rendit plus hardie et aussi moins
chagrine
Et elle ne retint plus le cheval béni.
De traverser le gué noir dès qu’il eut
fini,
Le cheval arriva bientôt chez son
maître.
Le guetteur, quand il vit la beauté
paraître,
Corna pour avertir et vint lui demander
Ce qu’elle venait à telle heure
truander,
Ne la reconnaissant point dans l’ombre
pesante,
A travers la porte. Une voix séduisante
L’étonna quand elle lui dit : « Ouvrez,
je cours,
Des voleurs me poursuivent, venez à mon
secours ! »
L’autre par le guichet tout d’abord
regarde
Et voit une jeune beauté fort hagarde
Sur un palefroi gris, vêtue d’un riche
manteau.
Il court pour avertir le maître du
château
Car il prit Nina pour une fée favorable
Venue pour consoler son seigneur honorable.
Celui-ci, affligé encore, s’éplorait
Pour Nina, la douce beauté qu’il
adorait,
Et soupirait comme ses serviteurs
fidèles.
Quand il sut qu’une femme venait,
au-devant d’elle
Il alla courtoisement lui ouvrir, et
sans voix,
Ô joie inespérée ! ô, bonheur !
il voit
Sa mie, qui dans ses bras aussitôt s’élance
En criant : « Sauvez-moi »,
et avecque violence
Le serre de toutes ses forces avec les
siens
En se retournant pour voir s’il n’y
avait rien,
Donnant l’air de craindre d’être
vraiment ravie
Et de trembler comme elle le disait pour
sa vie.
« Rassurez-vous, s’écrie Guillaume,
je vous tiens,
Et à moi, cette fois, vous retenir
revient.
Nul ne vous ravira encore à ma flamme,
Dussé-je en trépasser et en perdre l’âme ! »
Il fait lever le pont. Pour jouir d’un
bonheur doux,
Il veut aussi devenir de sa beauté l’époux,
Et sans tarder il la conduit à la
chapelle
En ordonnant à son chapelain qu’il
appelle
De les marier. La joie enivra de plaisir
Tout le château, content de voir tous
les désirs
De son maître comblés après une nuit
sombre
Moins emplie que son bon cœur ténébreux
d’ombre.
Cependant à Médot tout le monde arriva.
De ne point voir Nina là on invectiva
D’abord le chevalier qui dormait encore
Et qui se réveilla, étonné, à l’aurore.
On soupçonna ensuite que Nina s’égara
Dans les bois, et à la chercher se
prépara,
Quand un écuyer vint de la part de
Guillaume
Inviter le père et tous les gentilshommes
A se rendre chez lui. Tous les convives
hideux
Y coururent. Guillaume alla au-devant d’eux
Leur présentant Nina, devenue sa femme.
On se révolta de la trahison infâme,
Mais Guillaume pria les gens d’être
écouté
Et leur dit qu’il n’avait point Nina
filouté
Et de ses amours il leur conta l’histoire.
Les vieillards applaudirent sa douce
victoire,
Blanchis dans des canons d’honneur et
loyauté,
Du père et de l’oncle virent la cruauté
Et pressèrent le père de ratifier l’union,
Et celui-ci ne put avoir autre opinion.
Peu de temps après, lui et l’oncle
moururent,
Guillaume et sa femme, qui se
secoururent
Pour vivre, devinrent les plus riches
seigneurs
De Champagne, et vécurent heureux et
sans frayeur.
[FIN DU CONTE: LAI DU PALEFROI VAIR (HISTOIRE DU CHEVAL GRIS)]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
|
La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2164.
samedi 23 mai 2015
Conte: Lai du Palefroi Vair (Histoire du cheval gris) (Partie VI)
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Mon avis sur cet article: