mardi 19 mai 2015

Conte: Lai du Palefroi Vair (Histoire du cheval gris) (Partie I)

CONTE: lai du palefroi vair (histoire du cheval gris) (partie I)

I. Les amours de Guillaume et de Nina, et ce qu’en pensa le père de cette dernière

Un chevalier nommé messire Guillaume
Vivait en Champagne, le plus preux du royaume,
Brave et honorable, mais pauvre, hélas! d’avoir.
Bien que ses travaux se fissent partout savoir,
Notre héros n’avait qu’une petite terre
Qui valait deux cents livres, et chevalier qui erre,
Il devait subsister par sa seule valeur.
Pour un homme tel que lui quel sombre malheur !
Car il avait l’honneur, la vertu, le courage.
Aux tournois il bravait ses ennemis avec rage
Et sans qu’il saluât les dames galamment,
Mais du bouclier et de la lance l’amant,
Il chargeait, la tête baissée, comme la foudre,
Et à la défaite ne pouvant se résoudre,
Il ne se retirait que quand il fut vainqueur,
Les cris de la foule faisant battre son cœur.
A ce guerrier, seigneurs, si je rends justice
Et loue sa bravoure qui n’était point factice,
C’est parce que c’est ainsi que notre Créateur
Nous donnera à voir ses preux imitateurs.

Dans le voisinage du héros, vieux et chiche,
Demeurait un seigneur qui était veuf et riche,
Père d’une beauté douce nommée Nina
Qui embrasa de mille feux, plut et chagrina.
Son château était dans les bois de Champagne,
Un fier édifice, haut comme une montagne,
Qui était à une lieue de celui, chétif,
De notre chevalier dont il semblait captif
Car il semblait une prison dont il fut maître.
Le château du vieillard ne daignait rien promettre
Aux voyageurs ou aux galants, toujours nombreux,
Parce que défendu par un fossé ténébreux
Et une forte haie d’épines, de sorte
Que nul n’accédait à la lointaine porte
De ce château bâti sur un tertre escarpé
Que par le pont-levis. Ce manoir usurpé
A la nature était la paisible retraite
Du vieillard et de sa fille, et les amourettes
S’y brisaient ainsi que les flots sur les écueils,
Et la beauté était dans ce rude cercueil
Avec son père, noble et toujours déférente,
Qui gagnait chaque année mille livres de rente.
Cette fortune et son front beau comme le jour
Sans surprise excitaient convoitise et amour
Et de ses soupirants augmentaient le nombre.
Guillaume en était et il en était sombre,
Voulant plaire à sa douce bien-aimée à tout prix
Dont il était devenu profondément épris
Et par la courtoisie et par de beaux faits d’armes.
Il y parvint, mais il lui en coûta des larmes
Quand son père qui vit souvent le chevalier
Lui devint soudain froid et inhospitalier
Et défendit à sa fille avec colère
De parler à Guillaume qui semblait lui plaire.
Son âge, de surcroît, l’empêchait de sortir
Pour chasser dans les bois ou pour se divertir,
Ce qui laissait les deux amants dans l’impuissance
De communiquer, et sans espoir d’absence.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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