jeudi 5 février 2015

Conte: Le Pilote de Boulogne (Partie V)

CONTE: LE PILOTE DE BOULOGNE (PARTIE V)


V. Comment le jeune prince se vengea de son beau-père et retrouva sa femme chérie

Le jeune prince marcha en suivant la boule.
Il vit, dans une forêt, un lion près d’une houle,
Plus loin un ours, derrière lui un grand léopard.
De sa viande et son pain il leur donna une part,
Et ils le laissèrent partir sans dommage.
Margot, la bonne fée et puissante mage,
Lui avait dit que dans la forêt il verrait
Un grand château désert qu’un feu illuminerait,
Avec une table servie et des lumières,
Mais qu’il n’y allait voir nulle âme coutumière.
La boule entra dans la cour, monta dans le perron,
La porte devant elle s’ouvrit ; comme un larron
Qui se hâte, pris de peur, de prendre la fuite,
Le prince se hâta d’entrer à sa suite,
S’y chauffa, se mit à table, et bien qu’étranger,
Une main lui servait à boire et à manger.
Il se coucha ensuite dans un lit bien tendre,
Et quand il s’éveilla, lui semblant l’attendre,
Trouva son déjeuner qui était succulent.
Il s’en régala bien mais sans qu’il ne fût lent,
Car il voulait partir, et rester n’est pas sage,
Lui dit la fée Margot. Il vit sur son passage,
Sur le point de quitter ce magnifique palais
Et quand vers la sortie promptement il allait,
De jeunes filles habillées de blanc, ravissantes,
Et qui, en vérité, étaient des fées puissantes.
« Voulez-vous danser ? » dit la première fée. « Non »
Répondit-il ; la fée dont savait le nom
L’ayant prévenu de tout ce qu’il devait faire.
« Dansez un peu avec moi, je vais vous plaire. »
Lui dit la seconde. Il refusa durement
Et fit la même réponse à l’autre fièrement.
La troisième s’écria : « Vous êtes bien sévère ! »
Et laissa tomber sa pantoufle de verre,
En s’en allant, qu’il se hâta de ramasser.
Elle dit, voyant ce qui venait de se passer :
« Gardez la pantoufle charmée qui est mienne,
Prenez-la et dites, quand vous voudrez que je vienne : 
« Belle fille, à moi ! » et je viendrai rapidement. »
Le jeune prince la remercia doucement
Et suivit encore la boule salutaire.
Il vit sur sa route trois fantômes austères,
Le plus grand s’écria : « Où vas-tu, sombre humain,
Petit ver de terre, poussière de mes mains ? »
Il prit sa pantoufle et dit : « A moi, belle fille ! »
Ella apparut, belle comme le soleil qui brille,
Et demanda : « Seigneur, quel est votre désir ? »
Il répondit : « Si vous voulez me faire plaisir,
Détruisez ces fantômes. Qu’ils s’en aillent en poussière. »
Et la fée exauça aussitôt sa prière.
Le prince, aidé par la boule, marcha longtemps,
Et arriva enfin à Boulogne, content
D’avoir revu ses vieux parents. A sa mère
Il reprocha doucement, mais d’une façon amère,
De lui avoir donné un conseil si mauvais.
Confiant en la fée qui de bon cœur le sauvait,
Il acheta un navire et lui dit : « J’espère
Que tu m’aideras à me venger de mon beau-père
Qui me traita avec une grande cruauté. »
La fée dont le pouvoir égalait la beauté
Lui dit : « Prenez vingt-neuf matelots. Soyez preste
A vous rendre à Naz ; je me charge du reste. »
Le navire arriva au royaume en tirant
Des coups de canon. Les officiers du tyran
Vinrent demander ce qu’il voulait. Tranquille,
Le fils du pilote leur dit : « Je veux la ville. »
Ils rapportèrent ces braves paroles au roi,
Qui dit aux officiers, en riant sans effroi :
« Demandez-lui s’il veut que son navire coule
Aujourd’hui ou demain, à ce jeune homme sans ciboule. »
« Je ne partira point et je ne vous crains pas. »
Leur dit le prince. « Vous voulez votre trépas,
Lui répondit-on, en nous bravant de la sorte !
Qui êtes-vous ? » La colère du roi fut très forte
Quand il apprit qui il était. Il ordonna
De couler le navire hardi, et s’étonna
Du courage de ce jeune homme et de son siège.
Ses hommes ne pouvaient tirer, pris au piège,
Une moitié loucha et l’autre éternua.
Il atteignit le roi sans peine il le tua
Et alla retrouver sa gracieuse épouse.
Les fées même de leurs noces furent jalouses,
On y mangea et on s’y soûla à loisir,
Joyeux de contempler les sangliers rosir
Et se remplir de vin les coupes pesantes
Qui faisaient taire  les bouches médisantes.

[FIN DU CONTE: LE PILOTE DE BOULOGNE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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