dimanche 1 février 2015

Conte: Le Pilote de Boulogne (Partie III)

CONTE: LE PILOTE DE BOULOGNE (PARTIE III)


III. De quelle manière le jeune prince, pour avoir trahi sa foi, fut châtié par le roi

Le fils du pilote raconta à sa femme
Ce que lui dit sa mère. « Tu sais que je t’aime,
Lui dit-elle. Je veux bien te souffrir de me voir,
Mais mon père pourrait vite s’en apercevoir,
Car des magiciens du pays il est proche.
Il ne va pas seulement faire des reproches ;
Sans remords de tes grades il te priverait,
Et de nous deux avec cruauté se vengerait. »
Mais la princesse, blanche comme une hirondelle,
Ôta son voile. A la main une chandelle,
Son mari s’approchait pour mieux la contempler,
Impatient, avant qu’il ne l’entendît l’appeler,
Et sur sa joue il laissa tomber une flammèche
Qui la brûla. Hagarde et la gorge sèche,
Elle s’écria : « Ah ! mon père va maintenant savoir
Que je l’ai trahi et n’ai pas fait mon devoir !
Nous sommes perdus ! Il nous châtiera sans vergogne. »
Le vaisseau, cependant, quitta la Boulogne
Et revint à Naz. En arrivant au pays,
Le roi dit au prince : « Avez-vous obéi
A mes ordres ? » « Oui » lui répondit le jeune homme.
Pour s’en assurer, il demanda à sa femme :
« Est-ce que ton mari a voulu te dévoiler ? »
« Non, père. » Dit-elle. « Il est mieux de vous en aller,
Repartit le roi, si vous me dites des mensonges,
Car vous n’imaginerez point, même dans vos songes,
Le sort qui vous attend si vous m’osez braver. »
Seul avec sa fille, il lui dit : « Pour te laver
Des soupçons, ôte ton voile, ma douce mignonette. »
Elle le fit. Pour voir, le roi mit ses lunettes,
Et en apercevant la brûlure s’écria :
« Malheureuse, disparais ! » Sa fille le pria
D’épargner son mari ; mais, devenant redoutable,
Il entra dans une colère épouvantable,
Et envoya chercher ses puissants magiciens,
Ses fées et ses sorciers aux savoirs anciens,
Et il leur demanda aussitôt de rendre
Le plus difforme des hommes son pauvre gendre.
Un sorcier dit : « Borgne d’un œil, de l’autre il louchera. »
« Il sera bossu quand mon charme le touchera,
Dit un autre sorcier, par devant et par derrière. »
« A son dos je ferai tourner sa tête altière. »
« Sa bouche sera fendue jusqu’aux oreilles. » « Son nez
Sera un prodige dont vous vous étonnez. »
« Il sera boiteux et ne marchera qu’avec peine. »
Quand les sorciers firent ces vœux pleins de haine,
Le pauvre garçon fut horrible à voir. Fougueux,
Le roi le chassa de sa cour comme un fou gueux.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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