CONTE: LA MULE SANS FREIN (PARTIE V)
V. Les prouesses du chevalier Gauvain, qui rendit à
la dame son frein promis
A midi, on conduit le valeureux champion
A l’arène. Apparaît un énorme lion
Qui creusait la terre et qui rongeait sa
chaîne
En écumant avec sauvagerie et haine.
Il fond sur le héros, par le sang
attiré,
Qui voit, mais sans frémir, son haubert
déchiré,
Et à la fin d’un long combat tue la bête
Et d’une autre coupa, plus grande, la
tête.
Ne voyant plus d’ennemi, il demanda,
vaillant,
Le frein. Sans répondre, le géant
bienveillant
Le reconduit à sa chambre pour qu’il
répare
Ses forces, car avant qu’il ne s’en
empare
Il lui fallait combattre un ennemi plus
puissant.
C’était un chevalier des travaux
vieillissant
Et qui avait planté les pieux de l’enceinte,
Célébrant sa valeur qui n’était point
feinte
Avec les têtes de ces ennemis terrassés.
Ils s’éloignent et on voit leurs lances
s’embrasser
Et voler en éclats. Leurs chevaux se
séparent,
Et ils combattent à pieds, rugissent,
chargent, parent,
Leur écu étincelle et leurs farouches
yeux.
Le combat dura deux heures, sombre et
furieux,
Et les deux chevaliers sont emplis de
rage ;
Gauvain fond sur l’ennemi, redouble de
courage,
Et en lui assenant un prodigieux coup
Lui brisa son heaume et allait couper
son cou,
Mais son adversaire lui demanda la vie
Et se rendit pour qu’elle ne lui fût
point ravie.
Le héros avait droit au frein qu’il
mérita,
Mais la châtelaine que sa victoire
irrita
Tenta de le séduire. Pour célébrer sa gloire,
Le nain vint l’inviter, suite à sa
victoire,
A un majestueux et auguste festin.
La dame, qui voulait un différent destin
Pour Gauvain, le reçut avec respect et
joie,
Couverte, sur son trône, de joyaux et de
soie.
Elle lui dit : « Messire,
vous êtes un grand guerrier,
Vous méritez le frein, mais je viens
vous prier
De renoncer à vos droits vaillants, et d’être
Mon chevalier, ainsi que mon époux et
maître.
La dame sur la mule est en effet ma sœur,
Elle m’a pris le frein et vous mes
défenseurs.
Je vous rendrai riche, et votre bras
invincible
Pourra exercer sa valeur sur d’autres
cibles. »
La dame était fort belle, et pendant le
repas
Elle servit Gauvain, et jusqu’à son
trépas
Promit de lui être fidèle. Mais ces
offres
Ne séduisirent point Gauvain. Après ces
affres,
Il voulait revenir, victorieux et loyal,
Avec le frein de la dame au château
royal.
On le lui donna donc, et sa quête finie,
Vit, libérés d’une sinistre tyrannie,
Surpris, les habitants qui ne pouvaient
sortir
A cause des lions, lui dire avant de
partir
Qu’il était leur sauveur, et louer son
courage
En lui baisant la main, et son heureux
ouvrage.
Gauvain rentra donc au château avec le
frein,
Content de sa valeur, confiant et
serein.
On l’accueillit avec une grande fête
Et l’appela le preux, l’ennemi de la
défaite
Et le grand chevalier aux éternels
travaux.
Mais la dame, courant vers des hasards
nouveaux,
– Voyez, messires, la malignité des
femmes –
Prit le frein, et le soir, dédaignant la
flamme
Du héros qui brava pour elle mille
hasards,
S’enfuit sur sa mule à l’abri des
regards.
[FIN DU CONTE: LA MULE SANS FREIN]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2164.
mardi 12 mai 2015
Conte: La Mule sans frein (Partie V)
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