lundi 11 mai 2015

Conte: La Mule sans frein (Partie III)

CONTE: LA MULE SANS FREIN (PARTIE IIi)


III. Le preux Gauvain, et comment se déroula sa périlleuse mission

La demoiselle était bien triste et affligée,
Déchue de son premier espoir d’être obligée
Par les preux chevaliers d’Artus, et s’éplorait.  
Le courageux Gauvain, qui aussi l’adorait
Et qui était d’Artus la plus puissante épée,
Ame belliqueuse et vaillante et bien trempée,
Proposa hardiment son prodigieux secours.
Mais il voulut, avant qu’il ne quittât la cour,
Comme maître Queux, un baiser de bon augure.
Il avait plus belle et plus noble figure,
Et maintenant on savait les périls à courir ;
La dame donc le lui accorda sans souffrir,
Sa valeur étant bien connue et éprouvée.
Le chevalier partit, sa requête approuvée,
Sur la mule rapide. Les serpents et les lions
Fondirent, farouches, sur notre champion
Comme sur maître Queux, mais avec vaillance
Il tira son épée, empli de confiance,
Et allait combattre. Mais le vaillant héros
Remit sa grande épée sans férir au fourreau
Quand il vit s’incliner toutes les bêtes fières
Devant la mule. Enfin il atteint la rivière,
Voit le tronc de sapin, se recommande à Dieu
Et s’élance, sur ce pont mortel, brave et pieux.
Lisse et bombé, le pont formait une route étroite
Que ne pouvait suivre la plus maigre et adroite
Des bêtes de l’enfer. L’impassible Gauvain
Resta bien droit, et les flots rugissaient en vain
Pour l’engloutir sous eux, profonds et sauvages.
Le héros aborda heureusement au rivage,
Et là se présenta un château fortifié
Qui eût repoussé les plus preux et terrifié,
Garni de quatre cents pieux qui, ô, épouvante !
Portaient chacun une sombre tête sanglante
A l’exception d’un seul, sans nul décernement,
Qui semblait attendre ce terrible ornement.
D’abiminaux fossés emplis de flots blêmes
Entouraient la forteresse qui tournait sur elle-même
Comme une meule sur son pivot, ou le sabot
Que sur sa courroie fait pirouetter un nabot.
Nul pont ne traversait le fossé ; la muraille
Semblait inatteignable, immense et qui raille
Tous ses vaillants efforts. Il songea un moment,
Et le brave Gauvain se demandait comment
Exercer sa valeur en ce lieux sinistres,
D’une douce beauté amoureux ministre.
Il attendit, sage, et il demeura prudent
Malgré sa bravoure et malgré son zèle ardent,
Se disant que cette forteresse tournante
Dans ses révolutions qu’il trouvait étonnantes
Lui offrirait quelque porte, et déterminé
A ne point revenir, quitte à être exterminé,
Avant qu’il n’accomplît sa mission hasardeuse.
Il se tint donc devant la forteresse hideuse,
Dès qu’il vit une porte il piqua prestement
Sa mule qui franchit le fossé lestement,
Et le voici entré dans le château sombre,
Ne voyant autour de lui qu’une vaste ombre.   

[A SUIVRE]

Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène 

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