lundi 30 mars 2015

Conte: Le Château suspendu dans les airs (Partie V)

CONTE: LE CHÂTEAU SUSPENDU DANS LES AIRS (PARTIE V) 


V. Comment le pêcheur sauva sa princesse, et de quelle manière son ravisseur fut châtié par le roi

La femme du pêcheur était à sa fenêtre,
Innocente comme l’enfant qui vient de naître ;
Apercevant son mari appelé par le devoir,
Elle le reconnut, heureuse de le voir,
Car elle l’aimait bien, et elle était ravie
Par un homme cruel qui menaçait sa vie
Et qui jurait, pour la fléchir, de la tuer.
Elle s’empressa donc, de loin, de saluer
Son époux, et lui dit, sans être entendue :
« En vous voyant, seigneur, mon âme m’est rendue.
L’usurpateur, de tout mortel s’effarouchant,
Ne quitte jamais la tabatière ; en couchant
Il la met, le fourbe, et ferme la porte,
Avant de dormir, sous son oreiller, de sorte
Qu’on ne peut la prendre sans le réveiller.
Je l’ai su en allant, mon cher, le surveiller.
Sachez que je vous suis et vous serai fidèle. »
Le pêcheur raconta tout ce qu’on fit d’elle
Au roi des Rats et des Souris, l’heureux époux
De sa troisième sœur, avec un grand courroux.
Après avoir songé à un stratagème,
Il lui dit : « Pour sauver la princesse que j’aime,
Ordonne à un de tes sujets obéissants
D’aller dans la chambre pour fourrer, roi puissant,
Sa queue dans sa bouche qui sera entrouverte ;
Quand il toussera, ce qui causera sa perte,
Et pendant qu’il sera assis sur son séant,
Je reprendrai ma femme et mon château géant
Quand je lui reprendrai enfin ma tabatière. »
Sur le dos de l’aigle aux ailes altières
Le pêcheur revint au château, en apportant
Une souris avec lui et un rat sortant
Sa longue queue, noire comme une vieille enclume,
En venant avec lui, de ses blanches plumes.
Quand le seigneur se mit à ronfler, bien nourri,
Elle courut jusqu’à sa chambre, et la souris
Lui fourra sa queue dans la bouche ; mais courte,
L’homme la lui serra d’une façon si forte,
Sans qu’il se réveillât, qu’il la fit cuiter.
Le rat à la longue queue entra sans bruiter
Et il fourra sa queue jusque dans la gorge
De l’homme qui dormait comme un fer dans la forge.
Il s’éveilla, cette fois, toussant et crachant,
A moitié étranglé. Le pêcheur, se cachant
Auprès du lit, prit sa tabatière enchantée
Et l’ouvrit, par la fée obéissante hantée,
Qui lui dit : « Maître, que puis-je pour vous servir ? »
« Transporter cet homme qui a osé ravir
Ma princesse, ainsi que mon château prospère,
Là où il fut, dans le jardin de mon beau-père. »
Répondit le pêcheur. Et le château allait,
Et dans le jardin du roi, face à son palais,
Fut enfin posé et resta immobile.
Le roi, en le voyant, crut être débile
Et qu’il eut la berlue, mais il vit arriver
Son gendre et sa fille chérie. Sans se priver
De l’embrasser, ils lui racontèrent l’histoire,
La lâcheté du seigneur, du pêcheur la victoire ;
Le roi fut bien joyeux et châtia l’amant
Qu’il fit écarteler par quatre chevaux fumants.
Le pêcheur et sa femme vécurent sans peine
Jusqu’à la fin de leur vie serein et sereine,
Mais, de peur d’un nouvel accident, il cacha
Sa tabatière qu’à son ventre il attacha.

[FIN DU CONTE: LE CHÂTEAU SUSPENDU DANS LES AIRS]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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