samedi 3 janvier 2015

Conte: La Belle aux clés d'or (Partie V)

CONTE: LA BELLE AUX CLÉS D'OR (PARTIE V) 



V. Ce que fit le jeune prince pour ne point mourir, et ce qui lui arriva quand il devint l’époux de la Belle aux clés d’or

Le prince alla trouver sa jument en pleurant,
Et lui dit : « Ce roi est un ignoble tyran !
Pour obéir à sa femme vengeresse,
Il va me faire périr, parce que sa maîtresse
Exige ma mort s’il veut être son époux.
Ô, vous me manquez, jours inoubliables et doux
Où j’étais aimé par un bienveillant père !
Hélas ! Cette fois, ma chère, je désespère,
Car le roi veut me faire brûler sur le bûcher,
Et mes prières et mes pleurs ne peuvent le toucher ;
Pour avoir obéi à tous ses caprices,
Il a choisi de me livrer au supplice. »
La jument dit au jeune prince : « Ne tremble pas,
C’est le roi lui-même qui court à son trépas.
Tu n’auras besoin ni d’un vaisseau ni d’une voile,
Tu vas t’habiller, des pieds à la tête, en toile,
Et tu verseras cette bouteille sur tes habits
Pour que tu ne succombes point à cet acabit.
Tu ne brûleras pas, tu seras invisible,
Va alors parler à ce roi impassible
Derrière la foule qui ne pourra pas te voir. »
Le lendemain le roi, croyant faire son devoir,
Fit apporter deux cents fagots. On mit la flamme
Et on plaça à son milieu le jeune homme.
Il ne brûla point ; il en sortit et alla
Et derrière la foule nombreuse au roi parla :
« Je suis vivant, ingrat. Ta flamme est inutile,
Et je me ris, maintenant, de tes caprices futiles. »
Le roi lui demanda : « Comment es-tu sorti
Des flammes fatales, et du bûcher parti ? »
« J’ai acheté des habits de toile : grâce à elle,
Dit le berger, la flamme m’a épargné. » La Belle
Aux clés d’or entendit la fin de ce discours,
Et dit au roi : « Faites comme ce vaillant pâtour
Si vous voulez que je devienne votre épouse. »
« C’est facile. » dit le roi à l’âme jalouse,
Se fit faire un habit comme celui du berger,
Et monta au bûcher, insoucieux du danger.
La flamme l’embrasa et il devint cendres.
La princesse dit au jeune berger, d’une voix tendre :
« C’est toi qui es digne de devenir mon époux. »
N’étant point insensible à ses charmes si doux,
Il était bien content, et alla tout dire
A la jument blanche. « Tu dois d’abord m’occire,
Lui dit-elle, et couper mon cœur en deux morceaux. »
Le prince refusa et eut un vif sursaut,
Mais la jument lui dit : « Il faut que tu le fasses,
C’est moi qui le veux. » En se voilant la face,
Car il ne pouvait la tuer qu’avec remords,
Le jeune prince le fit. Et quand, après sa mort,
Il coupa son cœur en deux, une dame plus belle
Que la princesse qui fut au roi rebelle
En sortit et lui dit : « Ingrat, tu vas souffrir.
Maintes fois tu allais certainement mourir,
Et je t’ai sauvé, mais tu aimes cette princesse
Et tu m’as fait périr. Pour cette bassesse,
Tu seras, toute ta vie, sombre et malheureux. »
Elle disparut et ne revint plus. Amoureux,
Le jeune homme épousa la princesse altière,
Mais fut malheureux et mourut dans la misère.

[FIN DU CONTE: LA BELLE AUX CLÉS D'OR]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène 

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