LES SONGES DE SAINT PATRICE (septième PARTIE)
VII
Mais Laégaïr,
c’est une âme antique et fière
Que bercent les
tambours de la guerre meurtrière,
Sa volonté n’est
point courbée devant le mal,
Comme s’il avait
sur ses yeux un bandeau fatal
Et qui cache aux
rois la vérité radieuse.
Il éleva sa voix
devenue furieuse
Et dit à l’assemblée : « Ô,
chefs, ô, druides anciens !
Allez-vous
souffrir que ce sombre magicien
Séduise les cœurs de
nos filles innocentes ?
Malheur à l’Irlande
qui pleure et se lamente
Si elle tombe dans
le piège de ce démon ! »
Et au druide
Dubtak dit : « Va, et sur ce mont
Où les aigles
envoyés par les dieux surveillent
Les tombeaux des
géants endormis que réveillent
Les blasphèmes de
cet homme, avec lui lutter
Pour le salut du
ciel et des divinités ! »
Le roi et ses
sujets dans les ténèbres virent
Le druide Dubtak
et saint Patrice qui gravirent
L’obscure
montagne, noire comme un fourreau,
Et qu’on appelle
la Frontière des héros.
Au geste de
Dubtak, une farouche nuée
D’aigles, qui
emplit le ciel de la même huée,
Apparut, montrant
ses griffes acérées au saint.
Le déchirer était
le sauvage dessein
De ces créatures
hasardeuses et fauves,
Et Dubtak, qui
leva fièrement sa tête chauve,
S’écria : « Patrice,
tu mourras comme un gueux !
Brave donc, si tu
le peux, ces aigles fougueux
Et dont le dîner
est ta chair délicieuse ! »
Comme la mer
tourmentée devient silencieuse
Quand la houle se
tait, ces aigles, brusquement,
Devinrent hirondelles,
et dans le firmament
Chantèrent des
chants de paix et s’envolèrent.
Les pierres
sacrées de la montagne tremblèrent
Et les faces
livides des héros d’autrefois
Devant la face
radieuse du héros de la foi
Apparurent, et
étaient menaçantes et pâles.
Tous ces vieux
héros poussaient d’affreux râles
Et se réveillèrent
de leurs tombeaux oubliés
En brandissant
leurs lances et leurs grands boucliers.
Ils dirent à
Dubtak : « Chassez l’homme funeste
Que les dieux
abhorrent et que le ciel déteste,
Et qui vient
troubler notre éternel repos
Confident des
démons, de l’enfer le suppôt ! »
Mais Patrice
étendit sa main et dit une prière
Et les mânes des
héros trépassés crièrent ;
Fantômes, nuages
et tempêtes, blêmes éclairs,
Disparurent soudain
et s’envolèrent dans l’air
Quand cinq
sublimes rayons de ses doigts sortirent.
Débarrassée de ces
spectres qui se retirent
Et s’en vont en
enfer, leur éternel séjour,
La montagne sacrée
s’emplit d’un divin jour
Qui éclaira les
chênes et éclaira les tombes,
D’un parfum de
roseraies, d’un vol de colombes
Et de la lueur
vaste d’une splendide étoile
Qui du noir
firmament déchira le voile
Et montra le divin
Royaume qui reluit,
Les menus angelots
par les rayons éblouis
Qui se réveillent
comme des enfants, chantent et sourient,
Les fleuves qui
roucoulent et les anges qui prient,
Les trois
archanges et les mille séraphins
Qui attendent l’heure
terrible de la fin,
Le paradis fleuri
et l’ardente géhenne
D’où sortent des
cris de désespoir et de haine.
Dubtak ébloui à
saint Patrice demanda :
« Qu’est-ce
que ce royaume que nul devin ne sonda ?
Qu’est-ce que
cette étoile ? Est-ce l’un de tes mirages ? »
« Non, Dubtak.
Cette étoile, c’est l’étoile des mages
Qui a montré l’enfant
divin, rayon ardent,
Aux sages d’Orient
et aux sages d’Occident.
Quand Dieu révéla
au monde son mystère,
Son verbe éternel
est descendu sur la terre
Et il envoya aux hommes
son fils adoré.
Lève ta tête et tu
le verras transfiguré
Dans sa blanche et
douce gloire, si tu contemples
Cette étoile, qui
est son berceau et son temple. »
Dubtak leva ses
yeux, voulant se hasarder
A lire cette
étoile et à la regarder,
Mais il baissa,
devant ce flambeau qui rayonne,
Sa tête et s’écria : « Mes
esprits m’abandonnent !
De cet astre je ne
puis soutenir l’éclat
Et c’est bien le
berceau d’un dieu que je vois là ! »
Et tomba, terrassé
par la lumière divine,
Qui vient du
firmament et qui l’illumine
Et qui éblouit la
Terre et ses éphémères rois
En remplissant les
cœurs des coupables d’effroi.
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
|
La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2180.
mercredi 8 août 2012
Les songes de saint Patrice (septième partie)
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