CONTE: L'église de saint jean
La piève de
Santa-Lucia-di-Tallano
Que les monts
entouraient comme de grands anneaux
Avait des
églises dans tous ses villages
Hormis Poggio,
objet de tous les persiflages.
Les habitants,
froissés, se dirent un jour : « Il faut
Que nous
érigions notre église sans défaut. »
Ils se réunirent
sur la place publique,
Pansus et bien
maigres, riches et faméliques,
Et déclarèrent
tous, avant que de partir,
Que dans un
champ désert il la fallait bâtir.
Ils ne tardèrent
point, dans leur enthousiasme,
A se mettre au
travail, guidés par leur fantasme ;
Hommes, femmes
et enfants, appelés par leur foi,
Travaillèrent si
bien, tant de jours, tant de fois,
Qu’ils
apportèrent tout, matériaux et pierres,
Au lieu convenu
à force de prières.
Les truelles, les
pics et les pioches en main,
Les maçons de
Poggio vinrent le lendemain,
Mais ils ne
trouvèrent point, à leur surprise,
La pierre, comme
si le diable l’avait prise.
Tout le village
s’en émut. Qui est l’auteur
De l’ignoble
larcin ? Et – par le Créateur ! –
Comment a-t-il
porté une pierre si lourde ?
Qui croirait des
autres villages à cette bourde ?
On chercha donc
un autre endroit, et on trouva
Une belle vallée
où seul l’oiseau va.
« Des
plaisantins nous ont joué une farce »,
Dirent les
villageois, et leurs ardeurs éparses
Réunies, les
voilà charriant les matériaux
Et poussant
ensemble de grands cris victoriaux.
Cela dura
longtemps malgré leur prestesse
Car les routes
étaient mauvaises hôtesses.
Le lendemain
matin, ô surprise et effroi !
La pierre avait
changé subitement d’endroit,
Et les
Poggiolinchi étaient en colère.
« C’est une
farce que nul chrétien ne tolère !
C’est le diable
qui veut décourager nos cœurs,
Bâtissons notre
église et nous serons vainqueurs. »
Et tous les
travailleurs, malgré leur grande rage,
Se remirent
bientôt tous ensemble à l’ouvrage.
A minuit, des
malins dirent : « Ne partons pas.
Et reposons ici,
cette nuit, nos bras las.
Nous saurons qui
nous a joué ce tour infâme. »
Et ils restèrent
tous, hommes, enfants et femmes.
On chargea les armes
et on se cacha sans bruit
Pour que de ce
mystère on fût enfin instruits.
Une heure
passée, on vit venir un âne
Et un homme.
« Par saint Pancrace et saint Antoine !
S’écria un
paysan, je veux bien faire feu ! »
«Mais non,
conseilla un autre, attendons un peu
Et nous saurons
comment les farceurs s’y prennent
Pour transporter
tous ces fardeaux l’âme sereine. »
L’homme
chargeait l’âne de tous les pesants faix
Qui auraient
écrasé cent grands chevaux bien faits
Et qui
semblaient pour lui légers comme la soie.
La colère de
tous se transforma en joie ;
On cria au
miracle à la vue de l’exploit.
« Qui
êtes-vous, saint homme ? Au nom de quelle loi
Prenez-vous
chaque soir toute notre pierre ? »
« Je suis
saint Jean. J’ai ouï toutes vos prières,
Comme vous
bâtissez l’église à mon honneur,
Je suis venu
ici, bonne gens, en préveneur :
Cette terre est
maudite et j’en suis chagriné,
Mais un enfant y
a été assassiné
Ainsi que sa
mère, par un misérable. »
Quand il eut dit
ces mots, le passant vénérable
Disparut avec l’âne,
et suivant son dessein,
On bâtit l’église
là où voulut le saint.
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2164.
samedi 6 août 2016
Conte: L'église de saint Jean
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