mardi 28 juillet 2015

Conte: Marie au fil d'or

CONTE: marie au fil d'or

Un homme se maria deux fois. De sa première
Il eut une fille au front empli de lumière
Qui s’appelait Marie, et de sa seconde eut
Une fille méchante et laide, confondu
Par le destin qui lui fit deux présents contraires.
La charmante Marie savait, pour se distraire,
Don que sa mère, fée, lui fit généreusement,
Avant de disparaître un jour mystérieusement,
Transformer en fil d’or le lin de sa quenouille.
Sa marâtre, plus laide aussi qu’une grenouille,
Jalouse de Marie, car son don l’inquiétait,
Dans tout le royaume fit croire que c’était
Sa fille qui savait filer de la sorte.
Le roi vint lui-même un jour frapper à sa porte,
De cet enfant voulant contempler le talent.
« Qui est là ? » « Le roi. De votre fille chaland,
Pour contempler son don je viens à votre âtre. »
« Entrez, seigneur le roi. » lui dit la marâtre.
Elle alla ensuite sa laideron trouver :
« Le roi est là, dit-elle, il faut lui prouver
Que tu sais bien filer. Tu ne seras pas lasse,
J’ai recouvert cette rucca de filasse
Et elle est de fil d’or chargée. Tu dois tirer
Seulement par ce bout, et on va t’admirer.
Tu dois éblouir surtout le roi qui te surveille,
Car il vient pour te voir faire des merveilles. »
Elle se présenta devant le roi qui dit :
« On conte qu’à filer tes doigts sont érudits.
Voyons ce que tu sais faire. » Mais la laide,
Ne faisant rien sans que sa mère ne l’aide,
Ne put pas tirer un petit fil par le bout,
Et ses doigts tremblaient tant qu’elle embrouilla tout.
La petite Marie, restée silencieuse,
Voulut lui montrer. « Va-t’en, petite audacieuse !
Cria la marâtre, tu ne sais pas filer. »
« Je puis faire ce fil, dit Marie, rutiler,
Si le roi le permet. » « Tu n’en sais rien, certes !
Va-t’en ! Ta punition sera sinon verte. »
Mais le roi la rappela quand elle allait partir.
« Sais-tu filer ? » « Non, mon seigneur. Je dois sortir. »
« Qui te l’a dit ? » « C’est ce que pense ma mère. »
« Et moi je crois qu’elle conte des chimères.
Prends cette quenouille et essaye. » Elle la prit,
Et le roi, tout ébloui, croyait perdre l’esprit
En voyant tirer des fils d’or la fileuse
Qu’il embrassa, trouvant la chose fabuleuse.
Mais la marâtre dit : « Seigneur, elle a rusé,
Je ne souffre point que le roi soit abusé !
Qu’elle file cette quenouille, car coupable,
Elle n’en sera pas cette fois capable.
Sachez que ce fil d’or par ma fille était fait. »
Et elle lui donna à filer, vilain faix,
Une quenouille de radiculacciu. « Peste !
Jura le roi. Vous lui faites un présent funeste !
Nul ne pourra filer cela et n’a ce don. »
Mais la douce Marie dit : « Seigneur roi, pardon,
Moi je sais le filer, vous pouvez me croire. »
Et devant sa sombre marâtre imprécatoire
En tournant son fuseau bientôt elle tira
Des fils d’or, et le roi étonné l’admira
Et dit à sa marâtre avec grande colère :
« Mentir à ton roi ne semble pas te déplaire !
La petite Marie va bientôt épouser
Mon fils, et deux fois plus tu vas l’en jalouser,
Car elle deviendra ton auguste reine. »
« Non, seigneur, faites de ma fille la souveraine. »
« Ta fille ? Qu’en ferai-je ? Et son visage est tel
Qu’elle est aussi laide que le péché mortel !
En dormant cette nuit as-tu fait ce songe ?
Je vais, pour ton audace et ton mensonge,
Te châtier, et tu ne verras plus l’horizon
Quand je te jetterai dans ma plus sombre prison. »
« Pardon, sire, grâce ! » S’écria la marâtre.
« Non, je t’emprisonnerai et te ferai battre. »
Mais la bonne Marie, en voyant son effroi,
De lui pardonner supplia tant le roi
Qu’il le fit et emmena la nouvelle princesse
En maudissant de sa marâtre la bassesse.
Elle montrait à tous son bon sourire doux,
Le prince consentit à être son époux,
Elle tissa de fil d’or et en fut pourvue
La plus belle robe de noces qu’on ait vue.

[FIN DU CONTE: MARIE AU FIL D'OR]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Mon avis sur cet article: