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lundi 3 août 2020

Re-L'habitude

RE-L'habitude

D’après le poème  « L’habitude » d’Auguste Angellier (1848-1911) duquel je ne garde ici que la première strophe

 

La tranquille habitude aux mains silencieuses

Panse, de jour en jour, nos plus grandes blessures ;

Elle met sur nos cœurs ses bandelettes sûres

Et leur verse sans fin ses huiles oublieuses ;

 

Les plus douces choses deviennent comparables,

Quand nous y pensons, aux choses les plus amères,

Les vieilles vérités et les jeunes chimères

Confondent les esprits des hommes misérables.

 

Le présent, le passé, le futur, trois têtes

De la même hydre qui embrase notre vie

Jusqu’à ce qu’elle nous soit par la mort ravie

Et qu’on soit emportés par la même tempête

 

À la grève battue par des flots sauvages

Qui vont et reviennent comme des souvenirs sombres

Et comme des spectres qui errent dans l’ombre

Faisant de notre esprit leur étrange rivage !

 

L’habitude ! c’est un fer et c’est une chaîne !

Elle nous guérit et elle nous empoisonne

Tout ce que nous montre le soleil qui rayonne

Devient une même chose géante et vaine,

 

Tout ce que nous cache la nuit ténébreuse

Devient une entité sans nom et sans forme,

Et le monde est petit bien qu’il soit énorme,

Et empli d’illusions vagues et nombreuses.



Par : Mohamed Yosri Ben Hemdène

jeudi 16 mars 2017

Télémaque et Eucharis

télémaque et eucharis

Raymond Auguste Quinsac Monvoisin, Télémaque et Eucharis (1824)

Eucharis, éplorée et charmante,
Dans l’ombre gémit et se lamente
En voyant Télémaque avec lenteur
S’envoler comme une sombre senteur.

Parti d’Ithaque chercher son père,
Il sillonne le monde et l’espère
Comme Eucharis espère son amant ;
Dans maintes mers et sous maints firmaments
Il a cherché Ulysse, doux et brave,
Des autres pères voyant les épaves
En tremblant des monstres et des écueils
Et de voir en grandes lettres le Deuil
Qu’écrit la mer, cette sinistre encre,
Partout où il jetait sa lourde ancre ! 

Eucharis sait qu’il ne reviendra pas
Et qu’il ira, même après le trépas,
Dans la barque de Charon, parmi les mânes,
Chercher Ulysse, et pleure comme Ariane,
Tandis que pour l’empêcher de revoir 
Ses yeux, son tuteur, qui est le Devoir,
Lui tient la main comme à un garçon frêle
Et éloigne Télémaque d’elle.


Par : Mohamed Yosri Ben Hemdène 

samedi 14 janvier 2017

Le Sacrifice

LE sacrifice

Auguste Gendron, Le tribut d'Athènes au minotaure (1876)

Dans leur terrible nef, les vierges gémissantes,
D’un monstre sans merci nourritures impuissantes,
Sont toutes emportées, sur l’onde de la mort,
Au rivage fatal et à l’ultime port.
Le cor du rameur qui appelle la bête
Hurle sinistrement comme une tempête
Dans le labyrinthe où le Taureau mugit.
Dans les ombres une gueule invisible rugit,
Montrant ses dents polies comme une pleine lune.

Les vierges, qui tremblent de leur infortune
Et qui ne reverront plus les rayons du jour,
Assoiffées de baisers, rêvaient pourtant d’amour,
D’être des amantes ou d’être des épouses,
De rendre les unes et les autres jalouses,
De vivre bien longtemps, de ne jamais mourir !
Nul héros ne viendra, hélas, les secourir !
Elles pleurent, elles s’enlacent et se consolent,
Jadis radieuses et pour plaire frivoles,
Du marbre et des pierres du sombre monument
Elles sombrent imiter la morne gravité ;
Victimes d’un péril qu’elles ne peuvent éviter,
Elles contemplent une dernière fois leurs charmes
Dans le fleuve sous leur nef, fait de leur larmes.


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène 

dimanche 1 janvier 2017

Le Baiser

Le baiser

Auguste Rodin, Le Baiser (1886)

Couverts d’un invisible voile
Qui leur cache le radieux firmament,
Des amoureux s’endorment éternellement
Dans un rêve d’amour et d’étoiles.

Enlacés comme les branches d’un arbre
Qui pousse dans les grands bois oubliés,
Tous deux sont éternellement liés
Dans leur charmante prison de marbre !

A l’abri du tumulte du monde
Et de l’humanité aux sombres bruits,
Leur amour pousse, nocturne fruit,
Ils s’embrassent dans une paix profonde,

Captifs de leur allégorie de pierre, 
Se mangeant sans merci après la mort,
Ils s’aiment et se dévorent sans remords
Et leur sueur est une prière !

Ils garderont toujours la même pose,
Dans leur rêve puissant restant figés,
Eternellement épris et affligés 
Sans raison, comme ils sont heureux sans cause.


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

samedi 29 octobre 2016

La relégation d’Ovide

la relégation d'ovide

Eugène Delacroix, Ovide chez les Scythes (1859)

A mon cher ami: Florian David

A Tomis, parmi les Grecs et les Gètes,
Chaque soir, chaque aube et chaque matin,
Ovide exilé, morne poète,
Emplit de soupirs le monde latin.

Il contemple les sinistres ondes,
Le cœur torturé, une larme à l’œil,
Et leur dit : « Que vous êtes profondes !
Ô mer, vaste mer, tu es un écueil ! »

Aux vents il dit : « Allez à Auguste !
Soyez mes émissaires, fils des dieux !
Dites-lui que d’un exil injuste
Je gémis, malgré le soleil radieux ! »

Et aux oiseaux : « Si j’avais des ailes,
Comme vous, habitants du clair azur,
Que je les déploierais avec zèle
Jusqu’à la divine Rome au front pur !

Rome aux mille beautés volages et blanches,
Rome aux marbres luisants, aux temples fiers,
Rome où comme vous sur toutes les branches
Je chantais joyeusement, jadis, hier ! »

Mourir loin de son Italie natale !
Le poète contemple, plein d’émoi,
La mer éternelle aux grâces fatales,
Se demandant : « Se souvient-on de moi ? »


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène