CONTE: L'ANNEAU ENCHANTÉ (PARTIE IiI)
III. Comment Milia sauva ses six frères charmés par
la méchante fée
Quand la fée vit Milia, elle lui laissa
choir
Son anneau enchanté, voulant aussi la
voir
Transformée en chèvre. Un oiseau aux
grandes ailes
Passa et l’emporta dans son bec avec
zèle ;
C’était celui qui fut par elle délivré
Et qui de la voir chèvre aurait été
navré.
« Pan ! Pan ! » « Entrez. »
Milia entra. « Il faut que j’aille,
Dit la maîtresse du logis, chercher
mangeaille
Pour mes bêtes, et aussi nous chercher à
manger.
Je suis bien contente de voir un
étranger !
Asseyez-vous, ma fille, car vous devez
être
Bien fatiguée. » L’oiseau frappa à
la fenêtre
Quand la vieille sortit. « Tes
frères sont charmés,
Dit-il à la fillette, dans la cave
enfermés.
Surtout n’accepte rien de cette fée
infâme
Qui est puissante et qui est méchante
femme,
Ou tu seras changée en statue. T’avertir
Je suis venu, Milia. Maintenant je dois
partir. »
Au même instant la fée entrait. Fermant
la porte,
Elle dit à Milia : « Ma
fille, j’apporte
Pour vous un vin exquis et un bien bon
gâteau
Qu’on peinerait à trouver même dans le
château.
Buvez-en et mangez-en, ces deux délices
Vous feront oublier la marche et ses
supplices. »
« Je n’ai besoin de rien, madame,
et mon désir
Est de dormir ici. Pour me faire plaisir
C’est tout ce que je veux, devant la
douce braise
De votre cheminée. » « Mettez-vous
à votre aise »,
Lui dit doucement la fée qui pensait
cependant :
« Cette fille-là est étrange ;
en l’entendant
On l’eût crue avertie. Il faut que je
frappe
Et il ne faut pas que ma victime m’échappe. »
Et elle alla chercher, cœur sombre empli
de fiel,
Un collier et des robes changeantes
comme un ciel :
« Prenez ces présents, ne soyez
point trop fière,
Car je veux vous être, ma fille,
hospitalière.
Ainsi dans le village on ne contera pas
Qu’on est venu chez moi sans manger un
repas
Et sans emporter de ma bienveillance un
gage. »
« Vous êtes bien bonne, et votre
noble langage
Me suffit. Sans vouloir ainsi vous
offenser,
Avec ces merveilles pourquoi récompenser
Une fille pauvre comme moi en errance ?
Ce n’est point que mon cœur soit plein d’indifférence,
Mais robes et collier seraient vite
gâtés,
Alors que ces présents eussent d’autres
flatté,
Par les buissons qu’il faut encor que je
traverse. »
Voyant échouer ses ruses, la fée
perverse
Montra à la fillette un bon sourire
aimant,
Cacha sa colère et dormit profondément.
L’oiseau revint frapper à la fenêtre
encore.
« Milia, dit-il, Milia, il faut qu’avant
l’aurore
Tu tues cette sombre fée, ou tu vas
périr
Toi et tes six frères que tu ne pourras
guérir.
Quand tu l’auras tuée, tu prendras sa
chemise,
Tu auras ses pouvoirs quand tu l’auras
mise. »
Milia se leva et sans faire aucun bruit
Prit un couteau sur la table, et comme
un fruit
A la méchante fée elle coupa la gorge,
Puis elle lui ôta sa chemise large,
Encore ensanglantée, dont elle se vêtit.
Son esprit s’éclaircit, et le monde
petit
Devint immense pour elle et vénérable,
Et elle comprit des mystères
impénétrables
Et de maintes choses les obscures
raisons.
Milia commença par visiter la maison
Avant d’éprouver ses pouvoirs, grande et
riche.
Elle vit deux statues placées dans une
niche
Qui étaient une reine et un roi
enchantés.
Milia descendit à la cave. Epouvantés,
Elle aperçut six boucs d’une affreuse
maigresse
Qui en la regardant criaient de
détresse.
Elle reconnut ses six frères adorés
Et leur sœur eut les yeux et le cœur
éplorés
En songeant au moyen d’annuler le
charme.
Elle se souvint tout à coup, malgré ses
larmes,
De ces mots : « Chemise,
tu m’obéiras
Et jamais, et jamais tu ne me trahiras. »
Qui étaient écrits sur la chemise
charmée.
En les disant elle pensait : « C’est
alarmée
Que je vois mes frères changés en boucs
hideux ;
Chemise, chemise, daigne avoir pitié d’eux,
Qu’ils redeviennent humains comme jadis
ils furent. »
Elle vit leurs cornes, affreuses
coiffures,
Tomber, et leurs pattes redevenir des
mains
Et des pieds, et ses frères à nouveau
des humains.
Sa joie fut immense. Ses frères l’embrassèrent
Car d’être sauvés un jour ils se
lassèrent,
Avec transports, en remerciant leur sœur
Qui les délivra de la mort, de tout leur
cœur.
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2164.
mercredi 17 juin 2015
Conte: L'anneau enchanté (Partie III)
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