vendredi 3 avril 2015

Conte: La Princesse aux pêches (Partie IV)

CONTE: LA PRINCESSE AUX PÊCHES (PARTIE Iv) 


IV. Comment le berger, qui devint roi, accomplit les deux dernières épreuves

Le roi dit au garçon : « Modère ta passion,
Tu es brave et tu as réussi ta mission
Mais tu auras demain autre chose à faire.
J’ai des pigeons qu’à tous mes oiseaux je préfère,
Que je vais envoyer loin d’ici, et donner
L’ordre de les faire repartir et ramener
Dès leur arrivée ; un peu plus tard, écolée,
Je lâcherai une deuxième volée
De pigeons, qui iront, comme les autres adroits,
En suivant le même chemin au même endroit.
Pour que de cette épreuve quitte je te tienne,
Il faut que la deuxième volée de pigeons vienne
Ici avant l’autre, et que les derniers partis
Avant les premiers soient ici. » Bien averti
Du souhait du roi, le bignet se mit en route,
Quand ils eurent mangé chacun une croûte,
Avec ses compagnons qu’il avait recueillis.
Il entendit bientôt l’harmonieux gazouillis
Des pigeons qui passaient au-dessus de sa tête ;
Il entendit, peu après, la quintette
De la seconde bande qui traversa les airs.
Lorsque le firmament en fut devenu désert,
Le garçon ordonna à la puissante oreille
De lui dire si des deux volées pareilles
La première était en route et allait revenir.
Il écouta et lui dit : « Je puis vous tenir
Pour assuré, seigneur, que la première bande
Est à trois lieues d’avance. » « Ami, je te demande,
Dit-il à celui qui fait tourner les moulins,
D’enfler ta bouche et de souffler. » Ce fut malin,
Car le premier volier de pigeons, sans prières,
Fut repoussé, frêle, à quatre lieues en arrière,
Et ceux qui partirent alors les derniers
Arrivèrent avant les autres au pigeonnier.
Le roi félicita le berger. « Ce fut preste,
Lui dit-il, mon garçon. Maintenant il te reste
Une seule épreuve, bien dure, à accomplir.
Dans une grande plaine qu’on verra se remplir
De guerriers, il y aura demain une bataille
Où mes troupes frapperont de pointe et de taille,
Mais mes ennemis sont plus forts et plus nombreux,
Et le combat, pour nous, sera bien ténébreux ;
Il faudra que grâce à toi mon armée l’emporte
Et que tu nous prêtes, dans ce combat, main-forte. »
Le lendemain, à l’aube, l’amoureux attela
Sa charrette, et sur le champ de bataille appela
Celui dont le crachat en verglas se transforme,
Et lui commanda d’une voix bien ferme
De cracher plusieurs fois sur le terrain ennemi.
Le bonhomme ne fit pas la chose à demi,
Et le terrain devint si glissant que, frêles,
Les chevaux tombaient par terre pêle-mêle.
L’homme au bissac ensuite voila d’obscurité
L’armée qui combattait avec témérité
Au point que les ennemis emplis de violence
Ne purent apercevoir la pointe de leurs lances ;
L’armée du roi était au jour, et le guerrier
Dont l’épée tranchait à sept lieues, sans le prier,
Assaillit l’ennemi, pareil à la tempête,
En faisant voler et les bras et les têtes,
Et l’armée ennemie fut détruite en peu d’instants.
Le garçon remercia ses compagnons constants
Qui, libres, s’en allèrent avec amertume,
Et il voulut avoir l’air et le costume
D’un seigneur, et à sa baguette l’ordonna.
Le roi de le revoir si changé s’étonna,
Et la princesse, qui admira sa prestance,
Devint son épouse sans nulle résistance.
Peu avant de mourir, le bon roi lui céda
Ses biens et son royaume, et lui succéda
Heureusement, pendant des années bien fastes,
En régnant justement sur ses sujets vastes.

[FIN DU CONTE: LA PRINCESSE AUX PÊCHES]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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