CONTE: GRISELIDIS (PARTIE Iv)
IV. La deuxième épreuve que le marquis fit subir à
son épouse
La femme du marquis lui resta fidèle
Et lui souriait malgré tout ce qu’il fit
d’elle.
Il sondait maintes fois ses yeux afin d’y
voir
Ressentiment ou peine, mais faisant son
devoir,
Elle ne lui montrait que son amour sans
bornes.
Jamais il ne la vit courroucée ou morne,
Et elle ne dit point le prénom interdit
De sa petite qu’elle chérissait et
perdit,
Mais Gauthier ne pouvait contempler son cœur
pâle.
Quatre années s’envolèrent ; à un
enfant mâle
La douce Griselidis donna cette fois
jour
Qu’elle nourrit comme sa sœur avec amour
Et combla de bonheur son père et sa
mère.
Mais ce bonheur ne fut, hélas, qu’éphémère,
Et le marquis, quand son fils aimé eut
deux ans,
Que sa femme en fît le sacrifice pesant
Voulut, pour éprouver encore sa
patience,
De la chagriner se faisant une science.
Au discours du marquis elle changea de
couleur
Mais voila encore sa mortelle douleur
Sans qu’il n’eût pitié de son cœur
misérable.
Voici ce que dit cette femme
incomparable,
Princesses, marquises, femmes de l’univers,
Profitez de l’exemple quand vous lirez
ces vers :
« Je ne serais, cher sire, qu’une
criminelle,
Si j’oubliais cette promesse solennelle
Que je vous fis devant Dieu et vos
barons.
J’aurais donc l’âme d’un pendard et d’un
larron
Si j’osais la trahir ; mon cœur est
l’apôtre
De votre cœur, et mes désirs sont les
vôtres,
Car en quittant chez vous, grâce à votre
bonté,
Mes anciens habits, j’ai quitté ma
volonté,
Je vous appartiens et fidèle je vous
demeure.
J’y conviens sans remords s’il vous
plaît que je meure
Car le trépas, fût-il le plus sombre et
violent,
Auprès de vous déplaire par un cœur
insolent
N’est sans doute rien, et si je vous
irrite
La mort, noble seigneur, est ce que je
mérite.
Prenez, s’il vous sied, ce que vous m’avez
donné. »
Le marquis était de plus en plus étonné.
Un autre, ébloui par cette vertu
impossible,
Eût cru sa femme sans cœur et impassible,
Mais le marquis, qui vit son épouse
nourrir
Ses deux enfants, savait que la faire
périr
Lui était plus doux que les quitter de
la sorte.
Sans être arrêté par l’amour qu’elle lui
porte
Il chargea son sergent de la même
mission,
Et ce dernier porta, empli de
compassion,
L’enfant à côté de sa sœur à Boulogne.
Après ces deux épreuves, le marquis sans
vergogne
Au cœur soupçonneux et que rien ne peut
guérir,
Alors qu’il voyait son épouse le chérir
Et lui être toujours aussi obéissante
Que quand il l’épousa, tendre et
caressante
Comme si nul malheur jamais ne la
toucha,
De sa grande vertu soudain s’effaroucha
Et décida, cruel comme la manticore,
De l’éprouver et de la tourmenter
encore.
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2182.
mardi 28 avril 2015
Conte: Griselidis (Partie IV)
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