dimanche 29 décembre 2013

Conte: les trois frères


conte: les trois frères

Autres poèmes de "la série Grimm"
 

Un homme avait trois fils aimants qu’il adorait.
La maison où avec eux leur père demeurait
Etant le seul bien qu’il possédait au monde,
Il fut plongé dans une réflexion profonde
Quand il fallait qu’il en choisît un héritier,
Ne voulant entre ses fils nulle inimitié.
Le mieux eût été sans doute de la vendre
Et d’en partager entre eux le prix sans attendre.
Mais c’était la maison de ses ancêtres aimés
Et le brave homme de la vendre était alarmé.
Il dit alors à ses fils : « Allez apprendre,
Fils chéris, chacun un métier, sans vous plaindre
D’être souvent grondés et souvent sans raison.
Celui qui héritera de cette douce maison
Y montrera le mieux son savoir-faire. »
Cette proposition semblait, les trois, leur plaire,
L’aîné choisit d’être, lui, maréchal ferrant,
Les deux autres choisirent des métiers différents
Et résolurent d’être barbier et maître d’armes.
Chacun d’eux trois, avec une volonté ferme,
Se mit chez un bon maître et devint maître aussi.
Ils étaient animés d’une même ardeur ; ainsi
L’un eut à ferrer les chevaux du roi, l’autre,
Le maître d’armes, qui n’était point un pleutre,
Reçut, en apprenant, plus d’un coup de fleuret,
Et le barbier, étant fort habile, s’emparait
De nobles têtes, et même de la tête royale.
Chacun d’eux pensait que la maison familiale
Etait sienne et qu’il n’en serait point privé.

Quand le jour convenu fut enfin arrivé,
Ils revinrent chez eux, ignorant comment faire
Pour trouver l’occasion rêvée et nécessaire
De montrer leurs talents à leur père, espérant
Lui plaire. Soudain ils virent un lièvre courant
Dans la plaine, avec une lesteté suprême.  
« Parbleu ! Celui-ci vient comme marée en carême ! »
Dit le barbier qui, plus alerte et vif qu’un chat,
Attendit que de lui le lièvre s’approcha,
Le savonna à la course, et sans une seule tache
De sang, lui rasa promptement la moustache.
« Voilà qui est bien ! Si tes frères ne font pas mieux
La maison est à toi. » dit le père, curieux
De voir quelle serait des deux frères la riposte.
Un instant après, une voiture de poste
Passa comme un éclair, lancée à fond de train,
Tellement rapide qu’elle semblait sans frein.
Le maréchal dit : « Père, admirez la droiture
De votre fils ! » Courant après la voiture,
Il enleva de ses pieds à un des chevaux
Ses quatre fers, et lui remit quatre nouveaux
Alors qu’il était en plein galop. Le père
Lui dit : « Tu es un vrai gaillard, comme ton frère !
Je ne sais quoi faire. » « Attendez de me voir,
Père ! » Dit le troisième. Il commençait à pleuvoir,
Et à ce moment-là il tira son épée
L’agitant en tous sens sur sa tête. Comme coupée,
La pluie, qui grossissait, ne tombait point sur lui
Et il resta tout sec. Par cet exploit ébloui,
Le père dit à ses fils : « Pour vous, c’est bien sévère !
Je le sais, fils. Mais il l’emporte. » Ils approuvèrent
Ce jugement, pleins d’une égale admiration.
Les trois frères s’aimant jusqu’à l’adoration,
Ils restèrent ensemble à la maison paternelle
Et y vécurent dans la joie éternelle,
Exerçant leur état, gagnant beaucoup d’argent.

Le barbier mourut, et son trépas affligeant
Emplit ses frères d’un chagrin tellement immense
Qu’ils en furent presque atteints de démence,
En tombèrent malades et périrent quelques jours
Après leur frère pour qui ils avaient tant d’amour.
Âmes dans la vie et à la mort réunies,
Pour honorer leur affection et leur génie
Et en souvenir de ces trois anges aux cœurs si beaux,
On les enterra tous trois dans le même tombeau.


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène 

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