CONTE: LES TROIS AMOUREUX DE PAULINA (PARTIE II)
II. Ce que les trois amis firent pour se venger
Sept jours passés
dans ce terrible silence,
A Carlo
Francesco dit avec violence :
« Pourquoi
te détournes-tu lorsque tu me vois,
En restant pour
moi sans yeux, et aussi sans voix ?
Que t’ai-je donc
fait, moi, pour m’éviter et feindre ?
C’est moi, en
vérité, qui dois me plaindre ! »
« Non !
s’écria Carlo, mais je fais mon devoir,
Je suis celui
que tu as refusé de voir !
Ton ami, qui
souffrait et était malade !
Que faisais-tu
alors ? Etais-tu en balade ? »
« Malade ?
S’écria Francesco, je l’étais
Et personne pour
mon destin ne s’inquiétait ! »
« Quand
cela ? » « Il y a trois mois » « Et moi de même !
A quelle
heure ? » « A minuit », « Où ? » « A
l’église ! », blêmes,
Carlo et
Francesco se regardaient. « Pourquoi ? »
Demanda
Francesco. « Le sourire narquois
De Paulina m’y a
conduit, et sa lettre... »
« Moi
aussi ! Ah, nous nous sommes pris pour des traîtres
Alors que
Paulina s’est bien jouée de nous !
Et je crois que
Petro s’est mis à ses genoux. »
Les trois amis,
enfin lucides, se parlèrent
Furent bientôt
fixés et pleins de colère,
Et ils
décidèrent alors de se venger.
Petro, qui se
calma et se prit à songer,
Dit à ses deux
amis : « Pour punir cette femme
Nous allons lui
jouer un petit tour infâme
Comme celui
qu’elle a joué sans nul effroi,
Nous coucherons
avec elle tous les trois. »
Et Petro
expliqua tout son stratagème :
« Je vais
me déguiser, chers amis que j’aime,
En pèlerin, et
la nuit, et avec civilité
J’irai lui
demander son hospitalité
Qu’elle ne
refusera point, étant très pieuse,
En voyant ma
mine pauvre et religieuse.
Avec des
provisions, un de vous montera
Sur le toit, et
dans un panier les apportera
Quand je
dirai : Seigneur, venez-moi en aide.
Ayez confiance
en moi, amis. » Et l’aède
Alla à la porte
de Paulina frapper.
« Qui
vient ? » « Un serviteur de Dieu voulant souper.
Ouvrez, pour que
notre Seigneur vous bénisse. »
On fit.
« En attendant que cette nuit finisse,
Auriez-vous un
sombre coin pour un voyageur
Qui fait
pénitence, mes aimables logeurs ? »
« Oui, mon
père, lui dit Paulina, ma demeure
Est la vôtre,
sachez-le, et à toute heure.
Nous avons du
bon vin, de la viande et du pain. »
« J’éprouvais
votre foi, mais tout cela est vain
Car le Seigneur
pourvoit à ma nourriture. »
« Comment !
Dieu vous nourrit ! » « Et ses créatures ;
Car il nourrit l’oiseau
et le ver oublié,
Tout ce qui est
faible et par les hommes humilié. »
Et le pieux
pèlerin se mit en prière.
Après quelques
instants, les yeux pleins de lumière,
Il dit : « Seigneur,
venez-moi en aide », tout haut.
Plein de viande,
de pain et de vin, sans défaut,
Un panier
descendit, grand, de la cheminée.
Paulina et sa
mère en étaient étonnées.
« Saint
homme, c’est votre dîner habituel ? »
Demanda Paulina.
« Oui, Dieu n’est point cruel
A mon égard. Et même
il m’a dit en songe
En envoyant pour
moi un bel et radieux ange
Que la première
femme qui couchera avec moi
Enfantera un
pape, un héros de la foi. »
« Et vous n’avez
couché avec aucune femme ? »
« Non, jamais. »
« Sommes-nous à vos yeux infâmes ? »
Demanda la mère
de Paulina. « Dieu ! non. »
« Ô
messager de Dieu, vous êtes noble et bon !
Prenez ma fille
alors, pour qu’elle soit bénie. »
Et Paulina, au
saint qui la trompait unie,
Etait contente
de mériter cet honneur.
Une heure après,
Petro se leva et dit : « Sœur,
Il faut que je
prie Dieu. » « Allez donc, saint père,
Dites à notre
Seigneur tout ce que j’espère. »
Petro ouvrit la
porte et Carlo vint doucement.
Une heure après
il dit à Paulina bassement :
« Il me
faut remercier Dieu, ma bonne fille. »
« Allez
donc, saint homme. » « Vous êtes bien gentille. »
Francesco vint
et dit quelques mots en latin,
Puis resta avec
sa fille jusqu’au matin.
Peu de temps
après, il y eut une grande fête
Au pays.
Paulina, rêveuse sans tête
Qui croyait
enfanter un pape, s’y rendit.
Les trois amis
aussi. Carlo vint et lui dit :
« Alors, il
est en bon chemin, notre pape ? »
Paulina en
rougit. En riant sous cape
Francesco et
Petro lui demandèrent aussi :
« Mais que
vient une sainte aujourd’hui faire ici ? »
Et ils rirent
tous les trois, impitoyables.
Paulina,
comprenant l’histoire effroyable,
Poussa un
strident cri, foudroyée tomba
Aux pieds des
trois amis, et soudain succomba.
[FIN DU CONTE: LES TROIS AMOUREUX DE PAULINA]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2166.
lundi 11 juillet 2016
Conte: Les trois amoureux de Paulina (Partie II)
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