CONTE: IL FAUT MOURIR (PARTIE IV)
IV. Le troisième pays que trouva Grantesta, et le
présent que lui fit la fée
Les aurores et les nuits passèrent,
rapides,
Les unes ténébreuses et les autres
limpides,
Et Grantesta marchait toujours, sans s’arrêter,
En pensant à la mort qu’il voulait
éviter.
Un soir, il rencontra une dame charmante
Qui lui sembla, toutefois, vaguement
alarmante,
Et qui lui demanda : « Où
vas-tu, voyageur ? »
« Chercher le doux pays que le
trépas vengeur,
Répondit Grantesta, jamais ne visite.
J’erre depuis longtemps, et mon pas
hésite. »
« Viens avec moi ; je t’y
conduirai, si tu veux. »
« Volontiers. » et la fée aux
ténébreux cheveux
– Car c’était une fée – fit soudain
apparaître
Sept grands chevaux ailés dont nul
humain n’est maître
Traînant la carrosse d’un dieu ou d’un
roi.
Grantesta y monta, malgré son effroi,
Et lui et la fée dans les airs
disparurent.
« Où allons-nous ainsi, puissante
créature ? »
« Au pays où l’on est immortel et
heureux.
Suis-moi et ne sois pas hésitant et
peureux.
De ce pays je vais te montrer la porte. »
« Oui, je me tais et que le diable
m’emporte
Si je dis le moindre mot ! Va et je
te suis. »
Ils arrivèrent enfin. Sous le ciel qui
luit,
Il vit des animaux et des fleurs qui
parlent,
Près d’une vaste mer, répandues, des
perles,
Et des arbres géants philosophant sans
bruit
Et pour les voyageurs laissant tomber
leurs fruits.
Pendant longtemps, il fut dans cette
nature
Avec sa compagne, douce créature
Qui l’aimait et veillait sans répit sur
son sort,
Bien qu’ils fussent tous deux à l’abri
de la mort.
Un jour, pourtant, il dit à la radieuse
fée :
« D’immortalité mon âme est certes
assoiffée,
Mais je veux voir ma mère et entendre sa
voix
Car je l’aime elle aussi, et qui aime
voit. »
La fée tenta, en vain, de l’en
dissuader.
« Eh bien ! si tu veux la
revoir, je vais t’aider,
Lui dit-elle enfin ; rien ne
retiendra mon zèle.
Vois-tu ce magique cheval aux blanches
ailes ?
Prends-le, il est à toi, mais ne le
quitte point,
Ou tu mourras, malgré mes inutiles
soins. »
Grantesta remercia la fée, et rapide,
Partit sur son cheval comme le ciel
limpide.
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2194.
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mardi 31 mai 2016
Conte: Il faut mourir (Partie IV)
dimanche 22 mai 2016
Conte: Il faut mourir (Partie III)
CONTE: IL FAUT MOURIR (PARTIE III)
III. Le deuxième pays où Grantesta se crut immortel
Voilà donc de nouveau Grantesta le sage
Fuyant sinistrement son propre passage,
Cherchant le doux pays où rien ne meurt jamais.
Chaque jour l’effrayait, chaque nuit
l’alarmait
Et il tremblait même de la brise qui
passe,
Ame qui veut vivre toujours, de vivre
lasse.
Il arriva enfin, cœur curieux et amer,
Sur les bords d’un grand lac, vaste
comme la mer.
Ô rêve délicieux et doucement
étrange !
Ô rive fortunées faites pour des
anges !
Mille parfums montaient confusément dans
l’air,
Invisibles oiseaux amoureux du ciel
clair,
Les arbres qui portaient leurs fruits,
joyeux hères,
Etaient appesantis par leurs faix sans
misère,
Beaux fardeaux parfumés et qui rendaient
tout gai,
Pliant les dos des branches et des
troncs fatigués.
Grantesta, dans cette naturelle
clémence,
Trouva un chêne élevé, qui était si
immense
Que toute une ville à son ombre eût pu
dormir.
Tant de beautés faisaient notre héros
frémir,
Et il frémit encor d’entendre le grand
chêne
Haut comme les nuées et que rien
n’enchaîne
Lui dire : « Que viens-tu
faire ici, vil mortel ?
Ver de terre, veux-tu donc voler dans le
ciel ? »
« Dis-moi, chêne orgueilleux à
la voix redoutable !
Tout ce qui est ici est-il impérissable ? »
« Oui » « Je ne te crains
point, alors, car rien ne meurt,
Rien ne peut me ravir la vie, je n’ai
pas peur. »
Comme pour le châtier, dès qu’il dit ses
paroles,
Voilà tout le pays charmant qui s’envole
Emporté par une tempête sans merci.
Grantesta, frémissant de ce ciel noirci
Par de lourdes nuées, vit un oiseau
sombre
S’envoler promptement dans cette
soudaine ombre
Et prendre dans son bec, invisible
fardeau,
Sans qu’elle ne tombât, une seule goutte
d’eau.
Grantesta demanda à l’oiseau sinistre :
« Qui es-tu, ô oiseau ? »
« Le fidèle ministre,
Lui répondit l’oiseau, du trépas
éternel. »
Grantesta s’écria : « Ô chêne
criminel !
Tu m’as menti, alors, et même ici la vie
Me sera par la Mort cruelle un jour
ravie ! »
« Il ne t’a point menti, dit l’oiseau ;
de ces flots
Je prends une goutte tous les ans. Vois
donc l’eau
Qui reste ! Tu vivras des millions
d’années. »
« Oui, toujours est-il que mon âme
est condamnée !
Je veux rester vivant ! Je ne
veux pas mourir !
N’y a-t-il point un pays où rien ne peut
rien périr ? »
« Ce pays existe, mais je ne puis
te dire
Où il est. » « Cache-moi ton
vilain sourire,
S’emporta Grantesta, car je le
trouverai,
Je serai immortel et te le prouverai. »
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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lundi 16 mai 2016
Conte: Il faut mourir (Partie II)
CONTE: IL FAUT MOURIR (PARTIE II)
II. Le pays que trouva Grantesta, et pour quelle
raison il crut bon de le quitter
Voilà donc
Grantesta, le cœur empli d’émois
Et courant le
monde des semaines et des mois,
Fuyant un ennemi
invisible et sombre
Et tressaillant
de voir, sous lui, sa propre ombre.
Il s’arrêta
enfin, plein d’un sinistre effroi,
Entouré de hauts
monts, dans un étrange endroit
Où il y avait
écrit, en lettres de flamme :
« Ici, on
ne meurt pas ». La joie dans l’âme,
Grantesta s’écria : « Je
serai immortel !
Voilà le pays où
rien ne meurt sous le ciel ! »
En admirant la
terre et ses herbes vertes
Ainsi que les
mille fleurs à l’aurore ouverte.
Les jours, les
mois passaient, prestes comme le vent,
De ne jamais
mourir notre savant rêvant.
Un matin,
cependant, grondant sur sa tête,
Le voici
réveillé par une tempête
Qui tordait les
arbres, grands pourtant et verts,
Et qui semblait
ployer tout le vaste univers ;
Les nuées
noircissaient le ciel, clair d’habitude,
Mille bruits
profanaient la douce solitude,
Quand tout à
coup le vent cessa, et le ciel clair
Devint empli d’oiseaux
aux chants emplissant l’air ;
Le printemps
éternel revint dans la vallée,
Ainsi que la
brise qui s’en était allée.
Grantesta
demeura surpris de ce changement,
Lorsque soudain
il vit, s’avançant étrangement,
Un monstre
rapide et hideux aux larges ailes,
Tenant dans ses
griffes un cadavre avec zèle
Dont les chairs palpitaient
et qui était fumant,
Laissant tomber
son faix comme lui alarmant
Et prenant dans
son bec un petit grain de sable
Avant qu’il ne
quittât l’endroit impérissable.
Etonné,
Grantesta se dit à haute voix :
« Que fait
ce monstre ici, et qu’est-ce que je vois ?
A quoi lui sert
ce grain de sable invisible ? »
Un rocher
répondit : « Rien n’est invincible,
Et tout est à la
mort promis et l’affliction.
Il vient
accomplir son œuvre de destruction
Et prendre un
grain de sable à ces hautes montagnes.
Mais la mort ne
viendra que quand en campagne
Elles seront
réduites en des siècles pesants. »
« Quoi !
la mort va venir ! Ce soleil reluisant,
S’écria
Grantesta, et cette douce aurore
Etaient donc
mensongers ! il faut partir encore ! »
« Reste,
dit le rocher. La mort ne va venir
Que dans
plusieurs millions d’années. » « Tout va finir !
Cela ne suffit
pas, et il faut que je parte !
Dans des
millions d’années ou dans deux, qu’importe ?
La mort viendra un
jour, inéluctablement !
Partons d’ici. »,
dit-il avec un tremblement.
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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Conte: Il faut mourir (Partie I)
CONTE: il faut mourir (partie I)
I. La quête de Grantesta
Il y avait un
homme qui était si savant
Que parmi les
sages vieillards, morts ou vivants,
Aucun ne lui
était jadis comparable.
Il s’appelait
Grantesta, héros de cette fable.
Un jour, après
avoir à Rome étudié,
Il alla voir sa
mère, au village oublié
Qu’ils
habitaient tous deux. Il se mit en route,
Et quand il s’arrêta
pour manger sa croûte,
Il vit un doux
vieillard aux longs et blancs cheveux.
« Où vas-tu ? »,
lui demanda-t-il. « Pourquoi ? » « Je veux
Suivre la route
avec toi, si ta route est mienne. »
« Je m’en
vais, et je veux que rien ne me retienne,
Surtout un gueux
de ton espèce, vain mendiant. »
« Respecte
un blanc vieillard de l’aider te priant,
Tu es jeune et
tu es fort, aide ma faiblesse. »
« Me
crois-tu ton valet ? va-t’en et me laisse.
Sais-tu quel est
mon nom ? je suis Grantesta
L’homme le plus
savant qui ici-bas resta
Après la mort,
jadis, de tous les vieux sages.
Disparais, le
vieillard, quitte mon passage. »
« Je vois,
bien qu’au départ je ne l’aie point pensé,
Répondit le vieillard,
que tu es insensé
Et que ta vanité
n’a point d’égale.
Prends garde,
car elle peut t’être fatale. »
Et voilà le
mendiant tout à coup transformé
En jeune homme,
qui dit à ce fat alarmé :
« Jamais tu
ne vaincras la mort toute-puissante,
Grand sage,
Grantesta, âme évanescente
Que le néant
prendra, comme il prend tout, un jour.
Ô, malheureux mortel,
à ta perte tu cours
On oubliera
jusqu’à ton nom, misérable. »
Grantesta s’écria :
« Ô présage effroyable !
Moi, mourir ?
que dis-tu, vaurien ? jamais, jamais !
Moi, mourir
comme un sot ? Que me dis-tu là ? Mais
Je suis le plus
sage des hommes sur terre ! »
« Tu
mourras, Grantesta. » « Jamais ! il faut que j’erre
Pour trouver le
pays où tout est éternel
Et où rien
ici-bas ne meurt sous le ciel. »
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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