mardi 25 août 2015

Conte: Bastuncedu dirida (Partie I)

CONTE: bastuncedu dirida (PARTIE i)

I. Comment un pauvre hère arriva au paradis, et le présent que saint Pierre lui fit

Un pauvre hère que la misère importune
Se mit en tête un jour d’aller faire fortune.
Il voyagea longtemps, longtemps, chercheur errant,
Et vit dans un pays un châtaignier si grand
Qu’il atteignait le ciel, et que ses vertes branches
S’enfonçaient dans les nues édéniques et blanches.
« Grimpons sur cet arbre, se dit le malheureux,
Le paradis m’attend peut-être, chaleureux,
Sur son sommet, et la fortune fuyeuse
M’accordera enfin ses faveurs radieuses. »
Le voilà qui monte, qui monte, avec ferveur.
Il arriva enfin au paradis rêveur,
Frappa à la porte, vêtu de ses hardes,
Et il vit saint Pierre, qui était de garde.
« Mon bonhomme, que veux-tu ? » « Las de ses noirs tours,
Après la fortune depuis longtemps je cours,
Et ne la trouvant point sur terre, vain mirage,
Je suis venu pour la chercher dans ces parages.
Est-elle ici, ô saint ? Ou dois-je encor courir ? »
« Oui, mais tu n’entreras point avant de mourir.
Je ne te laisserai pas passer quoi qu’il arrive. »
Le hère s’écria : « Ah ! même Dieu me prive
Des fruits abondants de ses bienfaits éternels !
Je ne suis pas, pourtant, un pécheur criminel,
Et mon seul tort est qu’il m’a fait pauvre naître !
Hélas ! daignez avoir pitié de moi, maître,
Car je veux être heureux avant que d’être mort,
Bien que je sois certain de périr de remords
Si je m’en vais d’ici aussi pauvre et hère
Que sur terre où je vis dans la grande misère. »
« Tu me sembles homme de bien, mais tu n’entreras pas,
Lui répondit le saint, sauf après ton trépas.
Mais prends cette serviette, et tu n’as qu’à l’étendre
Pour avoir ce qu’il faut. Nul n’en doit entendre
Parler ; un tel présent attire les voleurs
Qui te feront revenir à ton premier malheur. »
« Je vous le promets, grand saint. Il faut que j’aille
L’essayer sur terre et faire bonne mangeaille. »
Et il descendit du châtaignier, fort content,
Et à revenir sur terre il ne fut point longtemps.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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