lundi 8 juin 2015

Conte: Les sept paires de souliers de fer et les trois baguettes de bois (Partie III)

CONTE: LES SEPT PAIRES DE SOULIERS DE FER ET LES TROIS BAGUETTES DE BOIS (PARTIE IIi)


III. A quoi Catarinella employa son amande, sa noix et sa poire, et le conseil qu’elle donna au roi

Malgré ses fatigues , ses peines et ses effrois,
La fillette arriva dans la cité du roi.
Là, ayant vu une procession funéraire,
Elle joua de son amande, téméraire,
Car tous se recueillaient en ses funèbres instants.
Au grand étonnement des nombreux assistants,
Voici ledit défunt, qui a pour nom Charles,
Qui se lève, tout mort qu’il est, danse et parle.
Tout le monde entoura, de ce prodige ébloui,
Catarinella, et le roi était celui
Qui s’étonna le plus. Il vient et lui demande :
« Fillette, combien veux-tu de ton amande ? »
« Je ne la vends point ni pour or ni pour argent.
Pourquoi me l’acheter vous serait si urgent ?
Vous possédez tout un royaume et ses richesses,
Et je ne suis point reine, princesse ou duchesse »,
Répond-elle. Et le roi, qui à lui la voulait,
Repart : « Je te donne ma ville et mon palais. »
Mais Catarinella refusa cette offre.
Le roi, dont le cœur pour son fils encor souffre,
De la laisser aller fut, hélas, obligé.
Mais avant de partir il lui dit, affligé 
De son entêtement : « Tu es mon invitée,
Viens au palais, ce soir. Tu y seras fêtée. »
Elle consentit en adoucissant sa voix
Et vint au palais, le soir, jouant de sa noix.
La musique était si belle et vénérable
Que le roi se leva aussitôt de sa table
Pour voir ce que c’était. Preste comme un poulin,
Il vit, tournant, tournant devant lui, son moulin,
Alors qu’il n’y avait point de vent ou de tempête
Qui soufflait, ce soir-là, dans sa vaste trompette.
« Ah ! Catarinella ! dit-il avec émoi,
Ta noix est merveilleuse ! Ma belle, vends-la-moi. »
« Non, répondit-elle, elle n’est point à vendre. »
Il la pria alors de lui faire entendre
Sa musique encore, et elle prit cette fois
Sa poire enchantée en laquelle elle avait foi
Enchantant le palais avec ses mélodies.
Elle fut de toute la cour fort applaudie.
On se tut quand on vit, tel la fumée du feu,
Un immense château s’élever peu à peu
Où le fils du roi fut transformé en statue
Et la salle funeste aux portes rabattues.
Quand le roi reconnut son fils, il s’affola,
Criant : « Vends-moi ta poire, ô Catarinella !
Prends mon royaume, prends mes trésors et ma vie !
Et que mon âme soit par le diable ravie
En échange de ta poire, si tu le veux ! »
« Non, lui répondit la fillette aux blonds cheveux.
Pour que votre fils bien portant vous revienne
Suivez-moi. » « Avec vous j’irais à Vienne,
S’écria le souverain, sans être épouvanté.
Mais je ne puis plus voir le palais enchanté
Où mon fils est captif. » Dans la nuit noire
Le palais disparut, en effet, quand la poire
Se tut. « Ce n’est point là qu’il faudra le chercher,
Expliqua la fillette, moi je vais y marcher
Pour user mes souliers ainsi que mes baguettes.
Au Monte Incudine que le firmament guette
Partez à cheval pour arriver vite, roi.
Vous entendrez, quand vous serez à cet endroit,
Une voix qui vous dit de monter. Rebelle,
Vous perdrez votre fils, avertit la belle.
Il vous faudra comme moi, majesté, user
Sept paires de souliers de fer, et sans ruser
Trois baguettes de bois, pour qu’on désenchante
Votre si cher enfant. » Ame bonne et vaillante,
Le roi la remercia pour ses conseils précieux
Et partit, rapide, tel l’oiseau dans les cieux.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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