dimanche 7 juin 2015

Conte: Les sept paires de souliers de fer et les trois baguettes de bois (Partie II)

CONTE: LES SEPT PAIRES DE SOULIERS DE FER ET LES TROIS BAGUETTES DE BOIS (PARTIE Ii)


II. Les présents que deux vieillards et un ermite firent à Catarinella pendant son voyage

La beauté voyagea, apparition altière,
Pendant trente jours et trente nuits entières
Sans s’arrêter. Enfin, lasse, elle rencontra
Une immense forêt profonde où elle entra.
Contente, elle y vit une petite lumière ;
« Cela vient sans doute de quelque chaumière,
Pensa-t-elle ; si je pouvais y parvenir,
J’y passerais la nuit et pourrais l’y finir. »
Elle pressa le pas et trouva, en pierres,
En ruines, couvertes de ronces et de lierres,
Une vieille maison délabrée. « Pan ! Pan ! Pan ! »
Quelqu’un lui demanda, à la porte frappant :
« Qui êtes-vous ? » « Ouvrez-moi, je vous en supplie !
Lui répondit-elle. Par les lieues pâlie,
Je suis une pauvre fille, en réalité,
Qui demande pour la nuit hospitalité. »
Un vieillard lui ouvrit, que les années courbent
Et qui avait une longue et blanche barbe
Auguste et qui lui tombait jusqu’aux genoux.
A Catarinella il dit d’un air bien doux :
« Entrez, mon enfant ; vous voir est bon présage,
Depuis cent ans je n’ai point vu un seul visage.
Que venez-vous faire, seule en ces bois lointains ? »
« J’y viens, dit-elle à son hôte, car mon destin
Est de courir le monde, et le faisant j’espère
Que j’userai ces trois baguettes et ces sept paires. »
Et elle raconta au vieillard bienveillant
Tout ce qui lui était arrivé. S’éveillant,
Elle voulut partir après la nuit noire.
Le vieillard lui dit : « Prends, mon enfant, cette poire,
Elle te permettra quand tu veux de jouer
Une musique qui fait les fleurs éjouer.
Va au palais du roi ; à la poire enchantée
Lorsque tu diras – n’en sois point épouvantée – :
Poire, ne m’oublie pas, étonnée tu seras,
Et en quelques instants, ma fille, tu verras
Immense  et prodigieux, sortir soudain de terre
Le palais où le fils du roi est devenu pierre. »
Elle remercia pour son présent le vieillard.
Après avoir marché dans maints sombres brouillards,
Traversé des fleuves et passé des montagnes,
Elle vit bêcher, dans une vaste campagne,
Près de sa cabane un vieil homme tout chenu.
« Qui es-tu ? lui dit-il, nul ici n’est venu
Depuis que j’ai quitté les hommes et leur monde,
Aimant la solitude à cet endroit immonde. »
Elle lui raconta ses baguettes et souliers
Et toute son histoire, sans aussi oublier
De demander asile pour cette nuit sombre.
Dès que la douce aurore en dissipa l’ombre
Et alors qu’à partir elle se préparait,
Le vieillard dit à la fillette qui errait :
« Prends cette noix magique, qui te sera utile.
Il sortira de terre un moulin fertile
Lorsque tu lui diras : noix, noix, ne m’oublie pas.
Que Dieu te sauve du malheur et du trépas !
Pars, sur ton chemin tu trouveras un ermite
Qui n’a qu’une cabane et une marmite
Et qui te donnera quelque chose à son tour. »
Errant pendant un an comme les vieux pâtours,
Elle vit l’ermite et lui fit la demande
Qu’elle fit aux vieillards. « Grâce à cette amande,
Lui dit-il, tu pourras faire parler les morts
Et les faire danser même malgré leur sort.
Tu trouveras la cité après cette montagne ;
Va, que notre Seigneur t’aide et t’accompagne. »

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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