lundi 15 juin 2015

Conte: La jeune fille amoureuse du rossignol (Partie III)

CONTE: LA JEUNE FILLE AMOUREUSE DU ROSSIGNOL (PARTIE IIi)


III. Ce qui arriva à Belladonna et à son rossignol quand sa mère les trouva

A l’entrée d’un village, en cherchant la belle,
Le chapelain aperçut, auprès d’une chapelle,
Un curé qui lisait son bréviaire en courbant
Sa tête pieuse et chauve sur le livre tombant.
« Avez-vous vu passer une jeune fille,
Lui demanda-t-il, qui est belle et gentille ? »
« Qu’est-ce que vous m’avez dit ? Une fille ? Comment ?
Répondit-il, on dit la messe en ce moment. »
« Je viens ici chercher une demoiselle,
Non pour votre messe. Cette frêle oiselle
Est-elle ici venue ? » « Venez, on vous attend,
On va dire la messe, vous arrivez à temps. »
« Que le diable t’enlève, curé, avec ta messe !
De bien te rosser je te fais la promesse
Si tu m’en parles encor. » Et le chapelain furieux
Revint dire à la mère : « Un curé bien curieux
Qui près d’une chapelle lisait son bréviaire,
C’est tout ce que j’ai vu ; et malgré mes prières
De venir entendre la messe il répétait. »
« Eh bien ! dit la mère, ce curé-là, c’était
Belladonna, ma fille. Elle serait revenue
Ici avec toi si tu l’avais reconnue. »
« A voir son air grave, on s’en douterait pourtant... »
« Tais-toi, imbécile, et reste ici. En partant
Moi-même je trouverai ma fillette errante. »
Elle marcha trois jours, et la mère souffrante
Vit enfin sa fille qui parlait doucement
A son cher rossignol, en chuchotant bassement,
Assise sous un arbre, sur la fraîche herbe verte. 
Belladonna, quand elle se vit découverte,
Se changea en rosier. Mais cette fois, hélas,
Sa mère le prit. Le rossignol, triste et las,
Chantait : « Ô mère de ma charmante épouse !
Rendez-la-moi, et ne soyez pas jalouse
De notre bonheur et notre éternel amour !
Sachez qu’elle et moi nous nous aimerons pour toujours !
Notre fille d’honneur, c’était l’alouette,
Nos témoins le pinson et la sage chouette.
Rendez-moi mon épouse, ô mère au cœur hideux !
Si elle périt, nous périrons tous les deux. »
Mais sans rien écouter de ses prières amères,
Marchant rapidement vers la maison, la mère
Voulait désenchanter sa fille grâce à l’eau
Qu’une fée lui donna, vivant dans un îlot.
Mais le pauvre rosier, ô amours fatales !
Laissa tomber un,  puis deux, puis trois pétales ;
Quand la mère arriva, en pleurant son péché,
Elle le vit, hélas, tout à fait desséché.
Le rossignol l’avait amoureusement suivie.
De voir que son amante avait quitté la vie
Il chanta pendant trois jours sur le grenadier
Des airs fort tristes, sans qu’il ne fût congédié,
Au quatrième jour, réduit au silence,
Il mourut de ses feux emplis de violence.

[FIN DU CONTE: LA JEUNE FILLE AMOUREUSE DU ROSSIGNOL]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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