lundi 16 février 2015

Conte: Norouâs (Partie III)

CONTE: NOROUÂS (PARTIE III)


III. Le deuxième présent que Norouâs fit au bonhomme

Le vieux bonhomme se mit, sans s’effaroucher,
En route, et dans le même hôtel alla coucher.
Il dit à son hôtesse, qui devint plus prospère :
« Norouâs est un coquin que rosser j’espère,
Il m’a donné une serviette sans valeur,
Aux éphémères pouvoirs, ce maudit rigoleur. »
« Repassez par ici, répondit l’hôtesse,
Quand vous l’aurez puni pour sa scélératesse. »
Quand il fut, le lendemain, sur le faîte du mont,
Il se mit à crier : « Norouâs, vieux démon !
Ta serviette ne sert que deux fois éphémères !
Coquin, rends-moi mon lin et prends ta chimère ! »
Norouâs répondit : « Cesse de crier si fort,
Ou je t’enlève en l’air et te jette loin du port,
Dans la mer immense et qui sera ta tombe. »
Le bonhomme s’écria : « Pas si tu retombes
De ton mont avant ! Je ne viens pas saluer,
Rends-moi mon lin maintenant ou je vais te tuer. »
Norouâs rit bruyamment et lui dit : « Prends cet âne
Qui fut enchanté par une puissante gitane ;
Lorsque tu lui diras : « Ane, fais-moi de l’or »,
Tu en auras, bonhomme, à foison. » Alors,
Le bonhomme descendit la montagne haute,
Et pour voir s’il n’avait point fait une faute
En croyant Norouâs, dit à son animal :
« Ane, fais-moi de l’or. » Sans qu’il lui en prît mal,
Il vit l’âne lever la queue, et sur la route
Faire choir des rouleaux d’or ; les plus beaux, sans doute,
Que l’on pût voir. Content à en perdre l’esprit,
Le bonhomme ramassa, de son pactole surpris,
Les pesantes pièces dont il remplit ses poches.
Son hôtesse, qui grâce à lui ne tournait plus broche,
Vit son âne et lui dit : « Je vous vois bien gaillard ;
Avez-vous vu Norouâs ? Qu’est-ce que cet âne braillard ? »
Le bonhomme lui parla longtemps du miracle,
Et quand l’hôtesse jalouse en vit le spectacle,
Dans sa chambre la plus belle elle le fit dormir,
Alla à l’écurie où elle mit, sans frémir,
A la place de son âne un autre semblable.
Se levant après une nuit fort agréable,
Le bonhomme alla chez lui. Sa femme lui dit :
« Est-ce que Norouâs de toi encore se rit ?
T’a-t-il bien payé, cette fois ? » « Tu seras ravie,
Lui répondit-il, je le jure sur ma vie.
Sous la queue de cet âne tends ton blanc tablier,
L’or qu’il fera tomber nous fera oublier
Les jours de pauvreté et de lassitude. »
« Ane, fais-moi de l’or. » Commanda-t-il. Rude,
Il réitéra son ordre, sans rien faire choir.
« Comme un sot Norouâs a fini par te ravoir. »
Lui dit sa femme. Il fut dans une colère telle
Qu’il jura contre le vent une vengeance mortelle
Et qu’il allait tuer son inutile baudet
En entendant sa femme qui raillait et boudait.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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