samedi 14 février 2015

Conte: Norouâs (Partie I)

CONTE: norouâs (PARTIE i)

I. Pourquoi un bonhomme voulut se venger du fougueux Norouâs

Il y avait un bonhomme et une bonne femme
Qui, sans être très riches, avaient de la fame.
Ils vivaient d’un petit champ bien généreux
Où ils semaient du lin, et en étaient heureux
Car leur lin y poussait toujours à merveille,
Et il fallait, pour le garder, maintes veilles.
Quand il était bien mûr, ne cessant point d’en jouir,
Les bonnes gens l’arrachaient et le mettaient à rouir
Puis l’étendaient, pour qu’il séchât, dans la prairie.
Ils s’en réjouissaient, un jour, dans leur marcairie,
Leur lin étant plus que d’habitude abondant,
Et ils songeaient avec bonheur, en le sondant,
Aux chalands et aux belles ventes qu’ils allaient faire ;
Mais, alors qu’ils étaient ainsi à se plaire,
Il vint un violent coup de vent de Norouâs
Qui jeta leur lin sur un chêne qui s’encroua
Puis l’éparpilla dans l’océan immense.
Le bonhomme, mécontent de cette inclémence
Du destin, se mit à jurer après le vent,
Il prit son bâton à marotte, et se levant,
Pour tuer le maudit Norouâs se mit en route.
Il n’emporta avec lui que quelques croûtes,
Ne pensant voyager que deux jours seulement ;
Son voyage fut plus long. Il allait pâlement,
Se mourant de faim, plein de rage et de tristesse.
Il arriva à un hôtel, et à l’hôtesse
Dit : « Je n’ai pas le sou ; madame, par charité,
Ayez pitié d’un hère qui dit la vérité
Et ne le traitez pas avec sombre furie.
Je veux coucher dans un coin de votre écurie,
Je partirai à l’aube sans vous importuner. »
L’hôtesse eut pitié de cet homme infortuné
Et lui donna du pain et une botte de paille,
Ce qui sembla, à ce malheureux, une ripaille,
Car il avait grand faim et soif. Le lendemain,
Il remercia, avant de rebrousser chemin,
Sa bonne hôtesse et lui demanda : « Pour qu’il meure,
Pourriez-vous me dire où Norouâs demeure ? »
« Si, répondit-elle, suivez-moi, mon bon sieur »
Elle le conduisit au pied d’un mont silencieux
Où habitaient les vents puissants l’année entière.
Il vit d’abord Surouâs, et d’une voix altière
Lui demanda : « Est-ce toi, Norouâs, le coquin
Qui a abîmé mon lin ? Si tu l’es, faquin,
Je viens pour te rosser ton malfaisant derrière. »
« Parle moins fort ou fais ton ultime prière,
Lui répondit le vent. C’est Surouâs qui je suis,
Et le fougueux Norouâs que fougueusement tu suis
N’épargne ni les lins, ni les fleurs, ni les cébettes,
Et il t’enlèverait dans les airs comme une guibette. »
Norouâs vint cependant en soufflant. « Ah ! Gredin !
S’écria le bonhomme, rends-moi mon lin ! » « Bredin,
Répondit Norouâs, va-t’en ou je te rosse,
Et en soufflant sur toi, malheureux, je te brosse. »
« Non ! s’écria-t-il une autre fois, de rage plein.
Je ne partirai pas avant de voir mon lin. »
« Heureusement pour toi, je suis en bonne assiette,
Dit Norouâs. Prends cette magique serviette ;
Lorsque tu lui diras : Serviette, déplie-toi ! 
Elle sera une table servie que sous nul toit
Nul homme n’a jamais vue. Va-t’en et me quitte,
Car d’habitude je me fâche bien vite. »

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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