La tristesse de Cupidon
Et lui dit, le
cœur triste et la voix amère,
En se cachant de l’œil radieux de
Jupiter :
« Soyez
bénie, mère qui régnez aux éthers
Sur les cœurs des
dieux, comme moi sur les cœurs des hommes.
On vous adore en
Grèce, on vous adore à Rome,
Dans mille lieux
différents, sous mille noms différents,
Et quand un mortel
d’une mortelle s’éprend,
Il vous dit des
prières et il vous conjure
D’être aussi
clémente que vous êtes pure,
Et chante
doucement, de sa lyre armé,
Votre nom adoré et
son nom bien-aimé.
Vous m’avez sauvé
de la sombre colère
Du frère
tout-puissant de mon belliqueux père
En me cachant dans
les bois, loin des rayons,
Où je m’abreuvais
du sang des nobles lions
Et où je suçais le
lait des clémentes louves,
Et pour que
Jupiter jamais ne me trouve,
Aux bêtes de la
nuit vous m’avez confié,
Et pour que je
vive, vous l’avez défié.
Devenu fort, armé
de mes flèches magnanimes,
L’univers s’est
empli des cris de mes victimes ;
Comme vous on
m’adore, comme vous on me craint,
J’emplis tous les
cœurs de flamme et d’amour sans frein,
Maints hommes et
maintes femmes de mes coups se souviennent,
Comme dans les
manoirs les apparitions anciennes,
Quand j’apparais
on tremble, et les amants rêveurs
Tristes et éplorés,
me supplient avec douceur
D’attendrir le
cœur d’une insensible amante
Comme l’océan
cruelle, comme l’aurore charmante !
Mais aujourd’hui,
mère, je crois que les humains
Sont devenus
farouches, fussent-ils grecs ou romains.
Comme de son doigt
on tire une épine chétive,
Ils tirent de
leurs cœurs mes flèches captives
Et ils me sourient
sans que je sache pourquoi.
Pour qu’ils
s’aiment, j’ai maintes fois vidé mon carquois,
Mais ils
préfèrent, tous ces mortels infâmes,
Les baisers des
épées aux baisers des femmes ;
Les animaux
étaient plus doux et plus soumis
Et plus que les
hommes de mes coups ont gémi !
Ô, à moi le
cyprès, à moi l’arc de frêne !
Cet arc doré est
trop mou pour qu’ils s’éprennent
D’un sourire, ou
pour qu’ils gémissent d’une amour ! »
Vénus soupira et
dit à son fils : « Le jour
De ce siècle est
plus sombre que le jour du nôtre.
Les mortels sont
épris des guerres et des meurtres,
Ils rient des
poètes et ils rient des amoureux,
Quand ils sont
triomphants écrasent les malheureux
Et quand ils sont
vaincus maudissent notre famille
Et envoient des
flèches au soleil qui brille.
Nous ne sommes
dans leurs bouches qu’un infâme juron
Et pour nous prier
ils ne courbent plus leurs fronts ;
N’en doute point,
mon fils chéri, et désespère,
Ce siècle maudit est
le siècle de ton père. »
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2180.
vendredi 27 juillet 2012
La tristesse de Cupidon
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