CONTE: LA BÊTE À SEPT TÊTES (PARTIE Ii)
II. Ce qui arriva à Bertu, l’âne de Bertuolo, et ce
que ce dernier put faire grâce à ses deux gâteaux
Bertuolo voyagea quatre jours. Au
dernier,
L’âne était fatigué ainsi que son ânier
Qui donna à manger, ne voyant pas d’herbette,
Un morceau de gâteau à la pauvre bête.
Mais à peine fut-il goûté par l’animal
Qui était affamé, qu’il s’en trouva fort
mal
Et tomba aussitôt mort. Malgré sa
tristesse,
Bertuolo comprit avecque prestesse
Que les deux gâteaux que sa mère avait
donnés
Etaient, en vérité, par elle
empoisonnés.
« Voilà qui me sera, se dit-il,
utile,
Et m’aidera à braver les chemins
hostiles. »
Il marcha encore longtemps sans s’arrêter,
Et après cent jours vit des voleurs s’apprêter
A lui ravir sa vie ainsi que sa bourse.
Il interrompit sans rien dire sa course,
Et on lui demanda : « Où
vas-tu, étranger ? »
« J’ai bravé, répondit-il, de
sombres dangers
Pour me faire brigand, sires, comme vous
l’êtes. »
« On le saura si tu nous contes
fabulette ;
S’il n’en est pas ainsi, jeunot, tu
succomberas.
Mais viens avec nous, il nous faut de
jeunes bras. »
Le cadet les suivit jusqu’à leur caserne
Qui était une noire et sinistre caverne.
« Nous sommes las, dirent-ils, d’épier
les sentiers.
Qu’as-tu pour notre faim ? » « Un
gâteau tout entier,
Répondit le garçon, souriant avec
malice,
Qui est, en vérité, un céleste délice. »
« Et toi, que mangeras-tu ? » « J’ai
déjà mangé,
Ne soyez donc pas pour moi, sires,
dérangés. »
Les fripons, qui avaient grand faim, en
mangèrent,
Et soudain en damnés qu’ils étaient se
changèrent,
Et se mirent à se tordre et affreusement
prier,
A se rouler par terre et de mourir
prier,
Et expiraient dans les plus atroces
souffrances.
Avant de reprendre la route de la
France,
Le garçon dépouilla rapidement leur chef
Et de tous ses trésors il s’empara des
clefs.
Il arriva au haut d’une montagne immense
Où il vit deux corbeaux s’abattre avec
démence
Sur les cadavres de ses infâmes voleurs :
« Croua ! croua ! croua ! »
Il pensa : « Ce malheur
Me serait arrivé à leur place sans doute
Sans les gâteaux avant de prendre la
route,
Et sur moi chanteraient les ténébreux
corbeaux. »
Il prit du repos ; quand il revit
les tombeaux
Des voleurs, il vit, à côté des
squelettes,
Les corbeaux qui avaient fini de faire
emplette,
Qui étaient aussi morts que leur dernier
repas.
« Ah ! mon gâteau, se dit-il,
ne badine pas ! »
Et il continua, sans être livide,
Son voyage, le cœur léger et le sac
vide.
[A SUIVRE]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2166.
mardi 4 août 2015
Conte: La bête à sept têtes (Partie II)
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