CONTE: le tailleur du roi et son sergent
Un roi avait
jadis un excellent tailleur,
Parmi ses
compagnons, qui étaient les meilleurs,
Il avait un
premier garçon fort habile,
Laborieux et qu’on
ne voyait point immobile,
Malin, hélas
pour son maître, nommé Nidui.
Une fête
approchant, le tailleur fut conduit
A la cour, et
mandé par le roi son maître
Qui devait
certes les plus beaux habits mettre
Et lui livra
plusieurs riches étoffes, voulant
En faire des
habits augustes et riboulants.
Sans tarder le
maître mit son monde à l’ouvrage ;
Pour que de
voler on n’eût point le courage,
Le roi chargea
son plus fidèle chambellan
De surveiller
tous ces ouvriers excellents
Mais rusés sans
doute, et châtier avec crânerie,
S’il en voyait
jamais, la moindre friponnerie.
N’ayant jamais
vu plus adroits qu’eux sous le ciel,
Le chambellan
voulut régaler de miel
Le tailleur et
ses braves au dîner. La chose
Leur plaît,
certes, et leurs yeux sur le miel se posent
Avec cupidité.
Nidui dans ce moment
Venait de
sortir. La bonne odeur embaumant
Le nez de son
maître, il dit : « Ce miel est tendre
Et Nidui est un
rude hère. Sans l’attendre
Régalons-nous,
car il préfère son pain sec ;
Rien n’est
mieux, à ses yeux, à mettre sous le bec. »
Le drôle l’affirmait
cependant par malice
Pour avoir la
plus belle portion de ce délice
Aux dépens du
garçon. Nidui, à se retour,
Avec quelque
dépit apprit le vilain tour
Et médita une
vengeance bien prompte.
« Mon
maître est singulier, sire, et sur son compte
Je dois vous
prévenir, murmura le sournois
Au chambellan,
que son cerveau joue des tournois.
C’est un honnête
homme, mais son infortune
Est qu’il
devient toujours fou aux changements de lune,
Il lui prend des
quintes qu’on ne peut oublier,
Et on est
obligés de le battre et lier
Pour qu’il se
calme enfin. Tenez-vous sur vos gardes. »
Du chambellan la
mine devint soudain hagarde
Et il dit au
garçon tout bas avec stupeur :
« Ce que
vous me dites là, mon ami, fait peur !
De son prochain
accès dites-moi les signes. »
« Ah !
de vous en parler je me sens indigne,
Répondit le
garçon, mais il faut vous prévenir.
Vous saurez
quand la bile, seigneur, va le tenir,
En le voyant
chercher dans son ire rebelle
Çà et là, jurer
et jeter son escabelle.
Sauvez-vous
alors, ou songez à le guérir
Comme je vous l’ai
dit. » « Le lier et férir,
Repartit l’officier,
sera chose facile,
Il n’est point
assez fort pour être indocile. »
Deux jours
après, Nidui enlève adroitement
Les ciseaux du
tailleur qui avec entêtement
Se mit à les
chercher, crut qu’on les lui volèrent,
Se leva, jura et
jeta de colère
Son escabelle au
loin. Le chambellan appela
Du monde ;
comme une bête alors on attela
Le tailleur,
prétendu fou, qui crie et s’étonne,
Et jusqu’à en
être las on le bâtonne.
Délié mais
gémissant encor funestement,
Il voulait
savoir d’où lui vint ce traitement.
On le lui
apprend. Au garçon qu’il interroge
Il demande
depuis quand sa tête déroge
Et il est devenu
fou et rempli de fiel.
« Depuis le
jour, dit-il, que j’abhorre le miel. »
Cette réponse
fit devenir les choses claires
Et rire aux
dépens du tailleur sans lui plaire.
[FIN DU CONTE: LE TAILLEUR DU ROI ET SON SERGENT]
Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène
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La Muse a commencé à soupirer le 08/04/2012. Poèmes publiés sur le Blog : 2164.
mardi 26 mai 2015
Conte: Le Tailleur du Roi et son Sergent
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