mardi 14 avril 2015

Conte: Les trois Larrons (Partie II)

CONTE: LES TROIS LARRONS (PARTIE iI) 


II. Ce que les deux larrons, Haimet et son frère Barat, décidèrent de faire après avoir rendu visite à leur ancien confrère

Travers, qui n’était point un homme volage,
Retourna comme il le dit dans son village.
Sa femme l’aimait ; il devint homme de bien,
Au bout de quelques mois il ne manqua de rien
Et put même acheter un cochon, dans l’attente
De le manger, ce dont sa femme fut contente.
Il engraissa chez lui l’animal retenu
Et il le fit tuer quand Noël fut venu ;
L’ayant suspendu par les pieds à la muraille
Après qu’il lui eut bien lavé les entrailles,
Il partit pour les champs, sous le soleil radieux.
Mais le vendre eût été sans doute bien mieux,
Et vous saurez bientôt pourquoi, mes nobles sires.
Depuis son départ, les deux frères ne s’assirent
Pas une seule fois à sa table, et tous les deux
Vinrent le visiter ; de leurs visages hideux
Sa femme, occupée à filer, fut effrayée.
Par leur visite ils la virent peu égayée
Et devinèrent qu’on cachait un bien précieux.
Partout ils promenèrent leurs regards licencieux
Exercés à scruter les ténébreuses ombres
Et virent le cochon. La femme leur dit, sombre,
Que son mari n’allait revenir que le soir.
« Oh ! ce coquin ne veut donc pas nous faire asseoir
A sa table, pensèrent-ils, pour qu’il banquette
Avec sa femme, tous seuls ! Mettons-nous en quête
Du cochon, et allons sans lui donc le manger. »
Lorsque les deux fripons finirent d’arranger
Leur complot, derrière une haie ils se cachèrent
Et d’attendre la nuit sans bruiter tâchèrent.
Quand Travers vint, le soir, sa femme lui conta
La visite des deux que seule elle affronta.
« Ils m’ont fait peur, et leur mine est si mauvaise
Que je n’ai pas pu leur répondre à mon aise,
Dit-elle, et je ne sais ni leurs noms ni pourquoi
Ils sont venus ici. J’ai vu leurs yeux narquois
Fureter partout, comme s’ils cherchaient quelque chose,
Et les revoir une deuxième fois je n’ose. »
« Ah ! s’écria Travers, il me sera ardu
De garder mon cochon, et je le crois perdu.
Ce sont mes deux drôles, qui doivent là attendre
Le moment propice. Je l’aurais dû vendre. »
« Attends, lui dit sa femme, songeons un peu : cachons,
Pour qu’ils ne le voient pas, quelque part le cochon.
Au lever du jour, nous verrons quel parti prendre. »
Ce sage avis se fit par Travers entendre,
Il décrocha donc son cochon et le cacha
Sous la huche de pain ; ensuite il se coucha,
Tremblant des deux larrons et de leur étude,
Et pour son cher cochon empli d’inquiétude.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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