dimanche 15 mars 2015

Conte: Le Capitaine Pierre (Partie II)

CONTE: LE CAPITAINE PIERRE (PARTIE Ii)


II. Ce qui arriva au Capitaine Pierre et à ses deux matelots pendant leur voyage, et la curieuse rencontre que fit Pierre-Joseph

Le voyage fut paisible, et le navire allait,
Bercé par un beau vent qui doucement soufflait
En remuant la mer, son amante fort belle,
Et qui à ses caresses n’était point rebelle ;
Mais le ciel s’assombrit soudain, et l’océan
Pour naviguer devint bientôt messéant,
Quand une tempête s’éleva, formidable,
Et à laquelle nulle autre ne fut semblable.
Le vaisseau fut, pendant quatre jours, balloté
Et par les flots cruels cruellement cahoté,
Et, malgré leur force, les matelots fidèles
Perdirent le vaisseau, qui semblait muni d’ailes.
Par l’orage grondeur et les vents courroucés
Le frêle navire à la côte fut poussé,
Et il se brisa en échouant sur le sable.
Les trois hommes, pour fuir un trépas effroyable,
Se sauvèrent, et quand ils revinrent à la raison,
Des débris construisirent une petite maison,
Comme le pays était désert, et recueillaient
Les caisses avec lesquelles les flots les assaillaient
Et qui étaient remplies de biscuit et de lard.
Le capitaine un jour dit : « Il y a du sanglar
Sur cette île, ma foi, ou il y a du lièvre.
Demeurer ici, gens, me donne la fièvre,
Et manger le salé commence à me lasser.
Dans la forêt allons, camarades, chasser,
Un de nous restera faire la cuisine,
Et nous chercherons dans cette manne voisine
Du bon gibier. Celui de nous qui restera,
Quand ce sera midi, nous manifestera
Qu’il est temps de rentrer, en sonnant la cloche
Pour que nous ramenions ici nos galoches. »
Ils apportèrent la cloche restée dans les débris
Et l’accrochèrent à la porte de leur abri
Puis partirent, joyeux, laissant à la cabane
Pierre-Joseph, couvrant d’une grosse banne
La viande et le biscuit, car ils n’étaient pas sûrs
De trouver dans les bois du bon gibier mûr.
Comme Pierre-Joseph rangeait les écuelles
Et taillait le biscuit d’une main ponctuelle
Pour faire la soupe, la porte du bahut
S’ouvrit soudainement, et sans dire un salut,
Un bonhomme entra, pas plus grand que trois pouces,
Et que Pierre-Joseph prit pour une pousse.
D’une voix grêle il dit : « Hou hou hou ! que j’ai froid ! »
« Passe dans le foyer, bonhomme. En cet endroit
Sois le bienvenu, et si tu veux demeure
Et mange avec nous quand de midi viendra l’heure. »
Pendant que le marin préparait le dîner,
Le petit nain se mit, joyeux, à coquiner,
Souleva le couvercle de la grande marmite
Et commença, aussi tranquille qu’un ermite,
A jeter des cendres dans le beau pot-au-feu.
« Ah ! s’écria Joseph, je te rosserai sous peu !
Vilain ver de terre, petit grain de poussière !
C’est ainsi que pour mon action hospitalière
Tu me remercies ! Ah ! je vais te corriger
Et à quitter cette demeure t’obliger. »
Mais le nain lui jeta aux yeux la cendre âtre
Puis le frappa et le bâtit comme plâtre,
Et, comme s’il voulait encore l’humilier,
Avant de partir, le fourra sous l’escalier.

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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