lundi 16 décembre 2013

Vie de sainte Odile (Première partie)



Vie de sainte Odile (première partie)

I

Atalric était fils d’Hultrude et duc d’Alsace,
Père des Étichonides, épris de la chasse
Et des guerres, homme cruel qui gouverna
Au château d’Aubernai et à Altitona,
Construction fière bâtie sur une montagne
Qui ressemblait moins à un castel qu’à un bagne,
S’élevant sur les débris d’un sanctuaire gaulois.
Cet austrasien au cœur dur était toutefois
Un homme pieux, époux d’une femme pieuse
Qui de ses crimes portait la marque injurieuse,
Bérhésinde, fille d’une sœur de saint Léger,
 Evêque d’Autun que le duc, sans s’affliger,
Fit assassiner, comme ses deux autres confrères,
L’abbé Germain et saint Colomban, moine sincère
Qui évangélisa des royaumes entiers.

Oubliant ses meurtres, il voulait un héritier
Qui portât son nom et celui de sa race.
Il était las et la duchesse était lasse
Et tremblait, ne voyant point naître cet enfant,
Du courroux hasardeux de son duc triomphant.
Elle priait, il priait aussi, cet homme terrible
Qui, même devant Dieu, était impassible
Et ne songeait point à ses mille forfaits hideux.
Pour se venger de lui ou pour se venger d’eux,
Le Seigneur exauça leurs ferventes prières,
Mais ce n’était point la tête blonde et fière
D’un fils qu’ils virent reluire. C’était le front charmant
D’une fille aveugle-née. Atalric, alarmant,
Etait fou de rage, et il dit à sa femme :
« Par tous les saints de Dieu ! Que je perde mon âme
Si je laisse cette enfant vivre ! Une aveugle ! Ô, Dieu !
Que vous ai-je donc fait pour que ce monstre hideux
Vienne souiller ma race ? Ce n’est qu’une fille
Frêle, qui ne verra point le soleil qui brille,
Et qui n’est pas bonne à envoyer au couvent !
Ô, opprobre éternel ! Qu’ai-je fait pour qu’en rêvant
D’un héritier, d’un fils, d’une âme fière et forte,
Vous me punissiez, ô, Seigneur, de la sorte ?
Une fille ! Une aveugle ! Que je sois donc damné
Et par toutes les foudres de la terre étonné
Si cette chose survit et si moi je l’aime,
De ma honte et de mes péchés sombre emblème ! »

[A SUIVRE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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