lundi 9 juillet 2012

Le supplice de Galilée


Le supplice de Galilée


 L’échafaud reluit comme un soleil énorme
Et ouvre lentement ses ailes difformes,
La foule est là et on entend son vaste cri.
Un vieillard accablé de chaînes, qui sourit,
S’avance, auguste et doux septuagénaire,
Les immondes crachats du troupeau sanguinaire
Qu’il ne peut essuyer, malgré son âge chenu,
Tombent sur son visage et son sein presque nu
Et empourpré comme son dos par les pierres.
« Tuez cet ennemi de la sainte lumière !
Mais avant, au nom de Dieu, faites-le bien souffrir !
Bourreau, qu’il te supplie vainement de périr,
Ce rival du Christ, des prêtres et de l’Église ! »
Hurle la foule sombre et que le trépas grise
Venue voir mourir ce vieillard à l’œil si beau
Que la mort n’effraie pas, car il va au tombeau.
Mais cette hydre humaine que la haine enivre
Ne calcule point le temps qu’il lui reste à vivre
Et elle vient contempler le supplice mérité
De ce gladiateur de l’éternelle Vérité
Qui sourit sans que nul mot ne sort de sa bouche.

Monté sur l’échafaud, le prêtre farouche
Lui dit : « Pour ton salut, misérable pécheur,
Et si du Paradis tu veux voir les lueurs
Implore le pardon de Dieu et du Saint-Office !
Tu mourras rapidement, sans gémir du supplice,
Si devant Dieu tu renonces à ton orgueil »
Le sourire à la bouche et la flamme à l’œil,
Galilée est muet et rêve de quelque chose.
« Arrogant ! Même sur l’échafaud, tu oses
Railler par ton silence et l’Église et Dieu !
Mais tu parleras. Je ne connais rien de mieux
Que le brodequin, le chat et la poire
Pour ployer devant le Seigneur les âmes noires ! 
Bourreau, fais ton travail. » Le brave supplicié
Gémit sans crier de l’étreinte de l’acier.
Le prêtre lui demande, aux yeux une nuit cruelle :
« Alors, Galilée, la Terre tourne-t-elle ? »
« Oui, elle tourne » répond le condamné, fier.
Le supplice continue. « Démon qu’abhorre l’enfer,
Est-ce que la Terre tourne ? » Demande encore le prêtre.
« Elle tourne encore et vous n’en êtes point les maîtres »
Répond la victime. Et le supplice se poursuit,
Horrible et éternel. A l’homme presque évanoui
L’homme qui est debout une troisième fois demande :
« Par Dieu, mécréant ! Ton arrogance est grande !
La Terre tourne-t-elle encore ? Réponds, cœur sourd ! »
Et le héros murmure : « Oui, elle tourne toujours »


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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