mercredi 7 septembre 2016

Conte: La Croix magique (Partie IV)

CONTE: LA CROIX MAGIQUE (PARTIE IV)


IV. De quelle façon se termina l’infernale aventure de la fidèle Mariuccia

Mariuccia, cheminant dans une vague plaine,
Arriva à un grand palais, d’effroi pleine.
Sur sa porte de bronze aux battants énormes
Etaient écrits ces mots en lettres difformes :
« On ne franchit jamais deux fois ce sombre seuil. »
Mais elle entra pourtant, la brave veuve en deuil,
Et vit mille damnés marchant, la tête basse.
« Tout cela est maudit ! Ah, que je suis lasse ! »
S’écria Mariuccia, qui vit d’affreux tourments :
La flamme consumait des femmes aux traits charmants
Des hommes allongés étaient mangés par leurs vices,
Des marâtres sans cœur qu’on mettait au supplice
Allaitaient des serpents qui leur mordaient le sein,
On cuisait dans des fours allumés à dessein,
Et quelques-uns étaient, pour leurs crimes immondes,
Plongés et replongés dans une hideuse onde.
La pauvre Mariuccia chercha, d’un œil hagard,
Son époux, qui était bien loin de son regard,
Et ne le trouva point. Elle vit, chagrine,
Son oncle le curé, plus loin sa cousine,
Et d’autres de la piève, et qu’elle connaissait.
Mais ce qui l’effraya plus, quand elle passait,
Fut de voir des Maures, qu’accablaient les chaînes
Et étaient attachés à d’immenses chênes,
Rongés par des vautours immenses et vainqueurs
Et qui éternellement leur dévoraient le cœur.
Elle arriva enfin dans un endroit sombre
Où une pluie de feu tombait avec l’ombre.
Le pauvre Matteo était là ! Pâle et nu,
Et si changé qu’à peine elle le reconnut.
Il frémit à sa vue : « Hélas ! Ma pauvre femme,
S’écria-t-il, que fais-tu en ces lieux infâmes,
Toi qui es si pure ? » elle ne répondit pas
Et lui fit signe de la suivre. Mais lui, las,
Gémit : « Comment veux-tu qu’avec toi je vienne ?
Je suis lié, comme tu le vois, par ces chaînes. »
Mariuccia de sa croix toucha alors ses fers,
Et il s’en libéra. En sortant des enfers,
Devant la porte ils virent une terrible bête :
C’était un sinistre dragon à sept têtes
Qui vomissait des flammes, et comme un lion furieux
Rugissait avec bruit. Voyant ce monstre odieux,
Mariuccia se jeta avec véhémence
Aux bras de son époux, et dans sa peur immense
S’écria : « Sauve-moi ! ». Dès qu’elle eut dit ses mots,
Le charme fut rompu. Des mondes abismaux
Un tourbillon jaillit, emportant dans ses ailes
L’époux et l’épouse pour lui pleine de zèle.
Il les emporte, on ne sait où, éternellement.
Une jeune fille viendra loyalement
Les sauver de ce noir tourment, un jour, peut-être,
Mais le Diable est malin et les enfers sont traîtres.

[FIN DU CONTE: LA CROIX MAGIQUE]


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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