mercredi 15 août 2012

La création de Pandore


La création de Pandore


 Zeus, voulant se venger des hommes, créa une femme
Douce comme le printemps, en insufflant une âme
A l’argile qu’Héphaïstos lui-même pétrit.
Dès qu’elle commença à vivre, elle sourit
Et elle rayonnait comme le jour et l’aurore,
Les dieux éblouis lui choisirent pour nom Pandore,
La sublime Aphrodite lui donna la beauté,
Héra la jalousie et la curiosité,
Hermès l’éloquence et Athéna la sagesse ;
Bien qu’elle fût femme, on eût dit qu’elle était déesse
Car les douze frères divins et généreux
A cette créature dont ils étaient amoureux
Firent maints dons. Artémis lui apprit à sourire,
Apollon à chanter et à manier la lyre,
Arès lui donna la force, et Poséidon
La contemplant comme s’il implorait son pardon,
Lui apprit à calmer les ondes courroucées.
Elle était fragile et comme la pensée
Presque immatérielle. Les morsures de l’air
Qui amoureusement caressait sa blanche chair
Quand il passait près d’elle, la rendaient toute rose,
Quand elle souriait, ses yeux disaient de douces choses,
La terre verdissait, quand elle passait, sous ses pas.
Aphrodite dit à son frère : « Le trépas,
L’horreur, le châtiment et la noire vengeance,
C’est ce que tu promets à cette mortelle engeance,
Mais cette femme dont le sourire est si doux
Est de ta bienveillance et non de ton courroux
Le présent que ta main droite fait à cette race !
Quand on voit cette femme, on rêve qu’on l’embrasse,
Je suis la déesse des amoureux émois,
Mais cette femme charmante serait pareille à moi
Si elle n’était point une simple mortelle !
Les oiseaux qui chantaient pour moi chantent pour elle,
Les rivières disent son nom et les dieux sont éblouis
Par son front qui comme le soleil reluit !
Quand elle marche, elle fait tomber de la lumière
Et des morceaux diaphanes de sa fange première,
Tout l’Olympe admire ses seins à moitié nus
Et des dieux elle parle le langage inconnu,
Elle foule les nuées et les prairies vertes,
Du charme incomparable de ses lèvres entrouvertes
Héphaïstos en rêvant m’a maintes fois parlé.
Est-ce ainsi que tu châties le feu volé ?
Aurais-tu oublié quelle est la différence
Entre le châtiment et la récompense,
De Prométhée le nom sinistre et triomphant
Et les péchés des hommes, en créant cette enfant ? »
Zeus dit à Aphrodite : « N’imite point mon épouse
Et d’une mortelle ne sois point jalouse,
Pandore que tu décris, ma sœur, est un beau mal,
A l’humanité son sourire sera fatal,
Car la vengeance a de plus sûrs présages
Quand elle a des mains blanches et un charmant visage.
La race de Prométhée sera châtiée ; attends. »

Quand la belle Pandore, devenue jeune, eut vingt ans
Zeus lui dit : « Maintenant il est temps que tu descendes
Sur Terre, car les mortels te souhaitent et t’attendent,
Ils t’aimeront, mais tu n’en aimeras qu’un seul :
Épiméthée, qui n’est point un blanc aïeul
Mais un beau jeune homme, frère de Prométhée.
Tu seras obéie, tu seras redoutée,
Va, ma fille. » Héphaïstos, l’habile artisan,
D’une mystérieuse boîte lui fit présent
Et lui ordonna : « Tu la garderas fermée. »
Des poètes Pandore devint la bien-aimée,
Elle  fut chantée, elle fut adorée, les rois
Suppliaient ses charmes bénis avec effroi
Comme s’ils étaient ses sujets, et les reines
Furent jalouses de cette beauté sereine
Qui n’avait qu’une robe blanche et un noir fardeau
Et qu’elle portait sans qu’il ne courbât son dos.
Épiméthée la vit, tomba amoureux d’elle,
Elle consentit à être son épouse fidèle.

Dix ans passèrent. La boîte, présent des dieux,
Demeura fermée. Mais les regards curieux
De Pandore, en sondaient les ténèbres noires.
Elle se disait : « Les dieux dont tout chante la gloire
M’offrirent cette boîte, mais je ne puis l’ouvrir
Et comme une dépouille, je dois la couvrir
Du linceul éternel de mes regards sombres !
Qu’est-ce que les dieux ont caché dans cette ombre ?
Y ensevelissent-ils des joyaux ou de l’or ? »
Un jour, rongée par la curiosité qui mord
Les esprits des humains, elle ouvrit la boîte ;
Comme des spectres sortent d’une tombe étroite,
Elle en vit, chargés d’une effroyable mission,
Sortir le Vice, la Tromperie, la Passion,
La Vieillesse chenue, la pâle Famine,
La Folie qui égare, la Maladie qui mine,
La Guerre qui gronde et la Misère qui se tord.
Pandore terrifiée s’écria : « J’ai eu tort
En désobéissant aux dieux ! Je suis maudite !
Pardonne-moi, Héphaïstos ! Pardonne-moi, Aphrodite !
Pardonnez-moi, ô, dieux du ciel ! Voyez mes pleurs,
Entendez les prières que vous dit ma douleur,
Ne châtiez pas tous les hommes en châtiant ma faute ! »
Les dieux entendirent, dans l’Olympe aux cimes hautes,
Les prières de Pandore, et ils en furent émus.
Comme par la colère Zeus, par la pitié mu,
De la boîte, avec le Mal et la Souffrance,
Fit sortir la douce lueur de l’Espérance.


Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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