jeudi 10 mai 2012

Marzouki et le palais hanté


Marzouki et le palais hanté

Toute Révolution apporte son lot de légendes. Quelques jours avant la fuite de Ben Ali, des rumeurs ont circulé selon lesquelles le palais présidentiel de Carthage serait "hanté". Moncef Marzouki lui-même (actuel président provisoire de la République tunisienne) affirme qu'il l'est bel et bien (lire, par exemple, cet article). Le poème que vous allez lire s'inspire de ce pieux mythe.

Marzouki, dans ton manoir hanté
Entends-tu gémir les victimes ?
Frémis-tu souvent, épouvanté
Par ce cri qui sort de l’abîme ?

Dans cette vaste chambre où tu t’endors
En oubliant nos martyrs blêmes,
Quand la nuit vient, sombre comme le sort,
Vois-tu errer les noirs fantômes ?

Leurs nobles plaies sont souillées du sang
Qui coula pour l’éternelle Patrie,
Ils rugissent, ténébreux et puissants,
Et te disent, quand dans l’ombre ils crient :

"Roi, tu règnes car nous sommes morts !
Pour te reposer sur ton trône,
Tu gravis l’escalier de nos corps
Et nous posâmes la couronne

Sur ta tête chauve, ô, roi des rois !
Tu revins de ton exil sombre
Grâce à nous, fier et sans effroi !
Héros, nous bravâmes les ombres

De la dictature et du pouvoir,
Et aujourd’hui, tu nous oublies
Et tu vois ton sceptre sans nous voir,
Pleins de courroux, de mélancolie !"

Entends-les, Marzouki ! Spectres hagards,
Tu les maudis et ils te maudissent,
Tu n’oses point regarder leurs regards
Qui te rappellent tes artifices !

Tu les maudis, non sans frémir,
Car dans ta royale et noire couche
Ils t’empêchent souvent de dormir
Avec leurs rugissements farouches,

Et ils te maudissent car tu souris
Sans remords, à leurs bourreaux infâmes,
Président du pouvoir épris
Comme un poète d’une femme

Et comme un amoureux d’un baiser
Rêveur et doux, mais éphémère,
Qu’une amante lui donne pour l’embraser
Avec ses lèvres de Chimère ! 



Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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