mardi 8 mai 2012

Les soupirs d’un chômeur tunisien


Les soupirs d’un chômeur tunisien


"Ô, ministres cruels ! Voyez gémir
Un sombre condamné qu’on oublie
Et qui, seul dans la nuit, vous supplie
D’entendre enfin ses éternels soupirs !

Séduit par vos patriotiques discours
Comme par le regard épris et complice
D’une femme au cœur plein d’artifices
Et pourtant radieuse comme le jour,

Je croyais voir, devant mes yeux éblouis,
Les anges terribles de la Justice,
Venus pour me sauver du supplice,
Armés de leur foudre qui reluit,

De dignité, d’équité, de labeur,
Vous me parliez, orateurs d’Athènes,
Ardents comme Socrate et Démosthène !
Et moi je vous écoutais, rêveur !

Pour vous, vous croyant sincères, j’ai voté,
Sur vos têtes j’ai mis la couronne
Appesantie par l’or qui rayonne
Dans l’azur de vos noires majestés,

Mais vous m’avez oublié ! Je suis las
De vos mensonges et de vos promesses !
Loin de mes soupirs et de ma détresse,
Vous riez et vous ne me voyez pas !

Que m’a fait à moi cette révolution
Dont vous chantez sans cesse l’aurore ?
Jadis j’ai chômé ; je chôme encore
Et vous me contemplez sans compassion !

J’ai souvent faim et je suis souvent saoul,
J’ai souvent faim et toujours je chôme !
Eprise de mes charmants diplômes,
Nulle femme ne me prendra pour époux,

Mal-aimé, fardeau pour le monde entier,
Mon père est mort et ma mère est lasse
De me donner des sous pour que je passe
La nuit dans la taverne du quartier !

Rois qui régnez et que j’implore en vain,
Ô, je vous hais et je me déteste !
Dans l’ombre j’étais, dans l’ombre je reste,
Et hier est pour moi comme demain!"



Par: Mohamed Yosri Ben Hemdène

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